E P I L O G U E.

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Le jour venait de se lever sur la capitale hollandaise mais les rayons du soleil avaient du mal à percer à travers les épais nuages. C'était une journée agréable pourtant avec une température douce, atteignant huit degrés Celsius. Le réchauffement climatique avait du bon juste pour cette douceur qui rappelait le printemps.

Erwin repoussa le drap sur son corps et prit soin de se lever discrètement avant d'étirer chaque muscle de son corps endolori. Il avait peu dormi la nuit dernière. D'abord, à cause des mains insistantes et expertes de Lise sur son corps. Puis, à cause de l'angoisse qui l'engloutissait. Aujourd'hui était le jour où Erwin mettrait un terme à sa correspondance avec la trentenaire. Il continuerait de la voir, de vivre avec elle, de l'aimer, mais il ne lui écrirait jamais plus de lettres. Lise le lui avait déjà demandé par le passé et Erwin s'y était tenu. 2015 était l'année où Lise ne reçut aucune lettre. Ni de Klaas, ni d'Erwin ou de quiconque. Pourtant, sur le bureau du hollandais, on pouvait y retrouver du papier à lettre de qualité et une enveloppe écru qui n'attendait qu'un courrier pour être comblé.

Erwin lança un coup d'œil rapide à Lise et se glissa hors de la cabine du bateau. Il salua son voisin qui s'était levé aux aurores et répondit d'un sourire quand ce dernier lui souhaita un joyeux Noël. Erwin n'avait jamais été particulièrement fan de ce jour de l'année. Sa famille était trop pauvre, quand il était petit, pour célébrer l'arrivée de Jésus dans le monde. Par la suite, Erwin avait fait des efforts pour sa fille, Madleen. Il ne voulait pas qu'elle ait les mêmes séquelles psychologiques que lui alors, chaque année, il se pliait en quatre pour que le sapin regorge de boules et d'autres guirlandes lumineuses avec, à ses pieds, des dizaines de boîtes recouvertes de papier cadeau. Erwin pouvait encore entendre les cris de joie de Marleen quand elle se réveillait, enfant, et découvrait ses cadeaux.

Avec le temps, elle avait cessé de crier et de venir le couvrir de bisous mais jamais elle n'avait oublié de lancer un regard bienveillant à son père devant les cadeaux qui l'attendaient. Elle l'avait même enlacé l'année de ses quinze ans pour le téléphone portable qu'il lui avait acheté alors que sa mère avait toujours été contre.

Erwin se servit une tasse de café qu'il avala en regardant la ville s'animer peu à peu. Il était presque neuf heures et les familles commençaient à se préparer pour le traditionnel déjeuner de fête. Les enfants s'étaient réveillés tôt, voulant s'assurer que le père Noël ne les avait pas oubliés et si la plupart profitaient encore de leurs jouets, d'autres se trouvaient déjà dehors dans leur pyjama. Erwin repéra un gamin d'une dizaine d'années en train de tester son nouveau vélo tandis que sa mère se rongeait les sangs en le voyant dévaler une descente. Erwin sourit.

Bientôt, Louis aussi serait là et il pourrait découvrir que le même type de vélo l'attendait sous le sapin.

Le quarantenaire avala une nouvelle gorgée de son café devenu froid et grimaça. Il abandonna sa tasse sur la table extérieure et passa devant le sapin sans s'y attarder. Il traversa la cuisine, l'espace salon, et regagna la salle de bains. Il avait besoin d'une douche avant de s'atteler à sa dernière lettre. Lise dormait encore profondément et ne se lèverait pas avant une bonne heure. Alors, Erwin s'attarda sous le jet de la douche avant de regagner la chambre, ses cheveux grisonnants encore mouillés. Il portait une chemise en lin blanche, plutôt évasée, et un pantalon marron en toile. La saison était douce et Erwin détestait les costumes. Cela lui rappelait son précédent mariage qu'il avait voulu protocolaire, entièrement ancré dans la tradition. C'était une autre époque – la sienne – et il devait maintenant conjuguer avec la nouvelle génération.

Lise l'aidait à se moderniser, à sortir progressivement de la bulle dans laquelle il avait l'habitude de s'enfermer, hermétique à l'environnement extérieur. Ils allaient à des concerts ensemble. Souvent, c'était au Paradiso ou encore, au Melkweg. Deux salles autrefois réputées pour accueillir de la house mais désormais, elles étaient plus connues pour les évènements d'avantage rock qu'elles recueillaient. Erwin avait toujours trouvé cette musique agressive, avec des paroles futiles et des amplis bon marché. Il s'était surpris à aimer le bruit discret de la basse qui avait pourtant un véritable rôle dans l'harmonie du groupe. Il aimait suivre le rythme donné par la batterie et tenter d'imiter les gestes agiles et précis du guitariste. Parfois même, il montait sur scène pour pouvoir ensuite se jeter dans la foule. Et si lui était mort de trouille quand il le faisait, cela faisait rire Lise alors, il recommençait. Encore et encore. Il voulait lui prouver qu'il savait s'amuser.

... et t'attendre à NoëlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant