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L'odeur dans cette boulangerie est juste beaucoup trop appétissante pour mon pauvre estomac. Si ça continue je vais finir par mourir de faim avant même d'avoir pu me sustenter.

Finalement vient mon tour et je demande un sandwich mexicain. J'aime bien tout ce qui est épicé. Ma commande en main, je vais rejoindre Lynn et Marnie à l'étage de l'enseigne, dans la partie avec les tables destinées aux clients.

Je leur souris, trop impatiente pour sortir la moindre phrase. Mon repas me fait trop envie même si ce n'est pas de la grande gastronomie. Nous sommes installées juste à côté des fenêtres, de ce fait nous pouvons observer la rue et les gens qui l'empruntent.

Cela fait déjà deux jours que j'ai eu cette altercation avec Alex, et pour tout dire je ne vais pas spécialement bien. J'arrive à sourire et rire avec mes amis, mais au fond de moi j'ai un espèce de stresse ou d'angoisse constante vis à vis de cette histoire. Cela me pèse lourd sur le cœur et ce n'est franchement pas agréable.

Alex ne m'a toujours pas reparlé évidemment et je ne sais même pas s'il compte le faire un jour. Ah je n'aime pas ça. Avoir de telles pensées négatives me rebute et n'est pas dans mon tempérament.

Et évidemment dans ma tête, ça fuse dans tous les sens. Un coup je me dis que j'irai le voir bientôt, puis l'heure d'après je me persuade que je n'en aurai jamais le courage, puis je reviens sur ma décision encore et encore. Je me questionne sur tout et n'importe quoi de manière beaucoup trop répétitive. Penser autant me fatigue.

Pour tout dire, ces derniers jours, je n'ai aperçu Alex qu'une seule fois. Je suis persuader qu'il m'évite méticuleusement. Et ça me fait l'effet d'une aiguille s'enfonçant dans mon cœur quand j'y pense.

Je soupire et me mets à observer la rue principale de ma ville. Lynn et Marnie sont occupées à regarder de vieilles vidéos de leur passé et à en rire. Je n'ai pas spécialement envie de mettre le cœur à l'ouvrage et de rire avec elles. Je suis bien à l'instant présent, confortablement installée dans ma déprime passagère.

Je leur en ai parlé, ainsi qu'à Rosy et Ève. Quasiment le soir même si je me souviens bien. De toute façon ça se voyait comme le nez au milieu de la figure que je n'allais pas bien. Je suis un total livre ouvert quand je le veux, donc c'est pas compliqué de deviner.

Elles sont comme moi, démunies face à la situation. Elles se sont excusées de ne pas pouvoir m'aider si ce n'est de me dire de garder espoir et de me battre pour garder l'amitié d'Alex. Elles sont adorables, et même si je n'attendais rien venant d'elles, le soutien quelles m'apportent me réchauffe le cœur. Je sais que ce caractère solitaire et cette manie de vouloir régler tout toute seule est quelque chose de complètement idiot. Pourquoi ne pas prendre l'aide proposée si celle-ci est sincère et bienveillante?

J'observe à présent la supposée lycéenne qui attend le prochain tram. Peut-être qu'elle a une vie merdique elle aussi. Je dis ça mais y a pire que moi, y a toujours pire que soi de toute façon. Mais laissez moi exterioriser ma tristesse quelques temps, c'est chiant d'être jugé tout le temps si jamais t'ose te plaindre.

Elle est avec son casque et doit sûrement écouter de la musique. Ça serait trop bien si c'était du classique à fond dans ses oreilles. Mais y a plus de chance que ça soit une des musiques du moment qui sont peu entraînantes. Enfin pour les autres si, mais moi j'aime pas. Être dans les codes c'est pas pour moi visiblement.

Il y a aussi ce jeune garçon qui vient d'arriver à l'arrêt. Avec ses cheveux courts bruns, et ses lunettes. Pendant un bref instant, j'ai cru voir Charlie. Mais ce n'est pas elle, et heureusement d'ailleurs, sinon je me serais sentie encore plus mal qu'à l'instant.

Je ne lui ai pas reparlé depuis longtemps quand j'y pense. Et malheureusement pour mes pauvres sentiments, c'est bien mieux comme ça. Je n'ose même pas imaginer quelle genre d'image de moi elle doit avoir à présent.

Le souvenir de cette fin de journée dans le train me fait toujours autant d'effet.

Je soupire, les joues et les pommettes chaudes et sûrement rosées. Je vois les filles se retourner pour voir si je vais bien puis se reconcentrer sur leur discussion après m'avoir souri.

Je me souviens dans les moindres détails toutes les sensations qui m'avaient envahie ce moment là. Les centaines de papillons qui s'étaient incrustés dans mon ventre. Ils reviennent dès que je pense à elle.

Et ça me fait peur.

Peur de croire à la possibilité que je me sois attachée si vite. Peur de la faire souffrir et de me faire souffrir moi. Et tant qu'on en parle, j'ai aussi peur d'engager une relation. Je ne sais pas ce que c'est, je n'en ai jamais eu, et ça me fout la trouille.

Il y a trop de facteur comme ça, qui m'oblige a devoir couper les ponts avec Charlie. Mais malgré tout je l'apprécie. Et ça me tue de m'éloigner ainsi.

Je déteste cette situation, je déteste ce dilemme, et je déteste la solution.




















•ᴄʀᴜsʜ

ᴄʀᴜsʜOù les histoires vivent. Découvrez maintenant