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Une sensation de lourdeur s’était emparée de moi. En recouvrant la vue, j’étais complètement perdu. Ou étais-je ? Je ne connaissais pas cet endroit. Puis en cherchant au plus profond de mon cœur, si.  Je le connaissais. J’étais déjà venu ici quand j'étais plus jeune. J'y avais vu son visage pour la première fois alors que la vie quittait mon corps. Ses cheveux argentés et ses yeux clairs m’avaient fait tomber amoureux de lui.

Pourquoi tu as fait ça, Killik ?

Cette voix similaire à celle de Kairi venait d’Aïra. Malheureusement, j’étais incapable de le voir.

— Aïra ?
"Tu t'es planté dans le cœur alors je suis directement connecté à toi".
— Aïra, je suis désolé.
"De quoi parles-tu, Killik ? Est-ce si grave d’aimer un garçon aussi bienveillant que Kairi" ?
— J’aurais aimé que les choses se passent différemment.
"Je ne t’en veux pas, Killik. Je t’en voudrais si tu niais ton passé avec moi mais je te détesterais si quelque chose arrivait à ce garçon. Il est ton âme-sœur maintenant, alors je t’en prie, bat toi pour lui. Pour retrouver cet amour perdu entre vous deux. Si Kairi venait à mourir, je ne pourrais plus me réincarner. La vie qu'il est aujourd’hui est donc ta dernière chance."

Pour la première fois, Aïra me faisait part de ce qu’il avait sur le cœur. Pour la première fois depuis que je le connaissais. Aïra avait puisé beaucoup d’énergie afin de mettre Kairi sur ma route alors je devais saisir cette unique chance qu'il m'offrait. S’il arrivait quelque chose à cet humain, alors les efforts de son prédécesseur n’auraient servi à rien.

"J'ai malheureusement dû sacrifier sa mémoire pour le sauver. Killik, Kairi en savait beaucoup trop à cet instant, et nous en avions longuement parlé dans sa conscience. Je sais que ce n’était pas là, méthode la plus loyale mais Kairi n'a pas la force d'utiliser son pouvoir sur lui-même. Et malheureusement, il n’était pas prêt pour ce conflit".

Si je n'avais pas réussi à rencontrer les Alèthéias, j'avais pu échanger avec Aïra un court instant avant de me sentir partir. Mais je n’avais pas eu le temps de lui demander pardon. De m'excuser pour ce que je lui avais fait.

***

J'ouvris les yeux et vis en premier le visage du garçon sans nom au dessus en réalisant que je me réveillais.

—Kairi, viens voir ! Lui dit-il. Il a ouvert les yeux !

Plus loin dans la pièce, j’entendis les bruits de pas de Kairi se rapprocher.

— Oh, vous êtes enfin réveillé, constata-t-il avec un certain recul.

Mais je n’avais pas le temps d’être perturbé par sa réaction. Je me souvenais d’avoir retourné l’épée de Yutis contre moi et de m’être écroulé sur le sol. Puis il y avait eu cet échange avec Aïra. Mon geste ne m’avait pas permis de rentrer en contact avec les siens, mais directement avec lui.

Puis je regardais ces deux garçons qui se ressemblaient.

— Te voilà enfin, Killik.
— Lisla, je…
— Tu as réussi la première épreuve de Yutis. Mais ce n’est pas fini, me dit-elle en éloignant les garçons pour que je puisse me redresser.

J'avais une importante cicatrice sur le torse, comme j’en avais d’autres un peu partout. Mais celle-ci était l'une des plus importantes. J’étais prêt à sacrifier mon corps pour être aux côtés de Kairi qui ne m’avait pas lâché du regard. Si sa mémoire avait disparu, pas ses sentiments. Mais il était évident qu’il ne comprenne pas cette sensation.

— J'ai l’impression d’avoir dormi une éternité.
— Tu as dormi plusieurs jours en effet, me confia-t-elle.

D’ailleurs, le garçon sans nom et Kairi semblaient s'entendre. Je me demandais ce qu'il s'était réellement passé pendant mon sommeil. Je regardais Lisla retourner près de la fenêtre pour regarder la vue qu'elle avait d’Iris pendant que Kairi et l’autre parlaient entre eux. Malheureusement, j'étais encore trop fatigué pour comprendre leurs chuchotements ni même réellement comprendre ce qui s’était passé. Mais j’avais réussi la première étape de l’épreuve. J’étais mentalement prêt à passer la seconde. Mais pas mon corps. Pas tout de suite.

—Tu as vu la tête que tu as fait Kairi, quand il s'est réveillé !? Tu as rougis dès que ses yeux se sont ouverts !
— P-Pas du tout ! C-Ce n'est pas vrai ! Cria le jeune héros.

Pour ce soir, tous restaient au palais. Je m'étais levé de mon lit, lavé avant de prendre les couloirs pour me diriger vers mon bureau. Mais en chemin, j'aperçus cet étrange humain, et le surpris regarder à travers à travers l’une des portes quasiment fermée.

—Ne faites pas de bruits, me dit-il presque sous forme d'ordres. Ou il va m'entendre !

Je regardais également à travers l’ouverture pour comprendre qu’il s'agissait en réalité de Mikleo. Mon petit doigt me disait qu'il avait des vues sur lui. Mais je les imaginais très mal ensemble. Mikleo s’était toujours interdit d’aimer pour servir d'abord sa cause. Il était froid, sauf avec moi.

— Pourquoi tu ne le rejoins pas, au lieu de l'épier ?
— Et vous ? Pourquoi vous perdez votre temps avec moi alors que Kairi est ici ? Me rétorqua le garçon.

Sur le coup, j’eus envie de rire face à sa remarque. Mais il n'y avait rien d’amusant là-dedans. Au contraire, la réalité me rattrapa une fois de plus.

—Il n'y a plus rien entre Kairi et moi.
Mon interlocuteur sembla triste de ma réponse.
—Ce n’est pas vrai, ne dites pas ça.

Ce garçon me porta regard triste et plein de compassion. J'ébouriffai alors ses cheveux avant de le laisser épier Mikleo. Il avait quelque part raison, mais ce n’était pas aussi simple entre Kairi et moi. Malheureusement, il n’était pas temps pour nous de nous retrouver, auquel cas je ne me contrôlerai pas. Et je n’avais pas besoin de ça maintenant. J'étais arrivé dans mon bureau où Lisla m'attendait. Je ne la portais pas dans mon cœur mais elle restait une amie précieuse pour Kairi. Mais quand nous allions engagé la conversation, Kairi arriva dans mon dos, plus inquiet que jamais.

— Vous êtes là !

Son vouvoiement me perturba. Pourtant, il avait réussi à me tutoyer. Notre relation venait de faire un virage à trois cent soixante degrés. Mais une fois de plus, je ne lui montrais pas mes faiblesses.

—Oui, je vais un peu mieux mais toi, tu ne dors pas ? Les enfants devraient rester au lit.

Pas convaincu par ma réflexion pourtant si amusant, Kairi gonfla ses joues.

—Ne me prenez pas pour un enfant, voulez-vous ?

Puis il se mit à rougir alors que Lisla quitta la salle en me tapotant l’épaule discrètement.

— Je vous ai cherché.

Je m’étais mis à rire devant lui, le perturbant. Malgré sa perte de mémoire et sa façon de s’adresser à moi, Kairi restait Kairi.

— Pourquoi vous riez, j'ai dit quelque chose qu'il ne fallait pas ?
— Non, pas le moins du monde. J’étais venu chercher une veste pour sortir prendre l’air, c'est tout.
— Je peux vous accompagner, proposa-t-il.
—Les enfants ne sortent pas la nuit, jeune homme.

Quand je lui passe devant, il déglutit avant de me tenir par la manche de la blouse.

Idiot de roi…
— Kairi ?

Chamboulé, il mit ses mains devant ses lèvres. Mainte fois, il m'avait appelé ainsi. Je n’avais plus compté le nombre de fois où il m'avait sorti cette expression.

— Très bien. Allons-nous promener.

Je finis par céder afin qu’il ne reste par sur ça. Il me souriait tendrement, ravi de m'accompagner puis nous entamions une promenade nocturne dans les jardins du palais. Tel un enfant, Kairi faisait de grand pas avec ses petites jambes pour marcher plus vite. Quand il passa devant moi, je regardais avec intensité l'Yga.

— Cette veste ?

Soudainement, Kairi s’arrêta pour lever les yeux sur la lune.

—Cette veste est importante pour moi. Et si je ne me souviens plus qui me l'a offerte, elle porte votre odeur.

KILLIK ( KAIRI, Vol.2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant