La veille au soir, j'avais entendu Charles monter. A la dernière seconde, je m'étais étendue sous la couette du lit, enfouissant mon visage encore rougit par les larmes, sous les coussins. Je n'avais pas envie de subir un interrogatoire de Monsieur Aux Yeux Glacials. Il ne fallait pas qu'il en rajoute une couche.
Croyant que je dormais, il avait fait un minimum de bruit et après être rapidement passé à la salle de bain, s'était assoupi dans le divan, comme l'était son habitude.
A présent, le soleil était levé. Il perçait peu à peu les rideaux que j'avais tirés avant de me glisser sous les couettes. Il était tôt et pourtant, je ne parvenais plus à dormir. Mes pensées s'embrouillaient dans ma tête, je n'arrivais plus à rester immobile. Incapable de rester prostrée plus longtemps sous les draps, je repoussais les couvertures et me dirigeais sans aucun bruit vers le dressing. Je jetais un bref coup d'œil à Charles et sourit. Ce fauteuil ne devait vraiment pas être confortable... Il avait l'air beaucoup trop petit pour lui. Sa tête reposait en un angle assez bizarre, ses pieds dépassaient de l'accoudoir et il paraissait tout recroquevillé là-dedans.
Je passais la porte du dressing et alors que j'allais directement me saisir du maillot de la veille que je n'avais pour finir pas eu l'occasion de porter, mon regard tomba sur mes runnings. Je n'avais plus couru depuis combien de temps? Cinq mois? Prise d'une soudaine motivation, je m'emparais rapidement d'un t-shirt de sport et d'un legging, enfilais mes baskets et attachais mes cheveux en une toute petite queue sur le sommet de mon crâne... Ah. Oui. Les cheveux. Je n'avais plus de cheveux. Quelques uns s'échappaient d'ailleurs de ma mini-queue et rebiquaient dans ma nuque. Agacée de voir que déjà cette coupe m'ennuyais, je sortis de la chambre à pas de loup, en prenant soin de me saisir de mon casque qui trônait sur ma table de nuit.
Plus dynamique que jamais, je dévalais les escaliers quatre à quatre et me rendis dehors. Le soleil était fort bas, l'air encore humide mais jamais le ciel n'avait été aussi beau. Il était d'une couleur orangée, tirant doucement vers le rose.
J'avais hâte de courir face à ce fabuleux paysage.
D'un geste rendu précis par l'habitude, j'appuyais sur la connexion bluetooth de mon casque et enclenchais une playlist aléatoire que j'avais, dans un élan de motivation, appelée "time to do sport". Du Avicii dans les oreilles, je m'élançais dans la longue allée, pressée de parvenir à oublier ces pensées incohérentes qui m'abrutissaient l'esprit à cause de la tournure des récents événements.
***
Je foulais le bitume depuis plus d'une demi-heure. Je n'avais pas cessé de grimper. Et comme je l'avais espéré, mes pensées s'étaient calmées. Ma respiration était saccadée, mon pouls, élevé, mes joues étaient rouges et mes mains glacées. Pourtant, je ne m'étais jamais sentie aussi vivante. C'était exactement ce dont j'avais besoin: courir. Courir pour oublier. Je ne devais plus avoir couru depuis environ cinq mois et pourtant, mes pieds s'agitaient comme s'ils se souvenaient exactement de ce qu'il fallait faire. Ma respiration était forte, pourtant, je me savais capable de continuer encore une bonne demi-heure. Comme je montais depuis tout à l'heure, mes jambes faisaient de grandes enjambées. Je souris en repensant à mon père et notre séjour à la montagne où il m'avait appris à courir en altitude. J'avais appris cette fois-là qu'il n'était pas toujours facile de courir. A la montagne, on manquait facilement d'air. Les montées et les descentes rendaient la course beaucoup plus difficile mais aussi plus amusante. Les premiers jours, j'avais été essoufflée au bout d'à peine deux kilomètres, mais au fur et à mesure que je m'entraînais avec papa à mes côtés, j'avais trouvé mes repères. Maman avait toujours détesté courir, mais papa, il était comme moi, il adorait sentir son corps en mouvement, il détestait rester à la maison, enfermé à ne rien faire. De ce côté, je tenais de lui. Mais physiquement, je ressemblais à ma mère.
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La demoiselle au parapluie rouge
RomanceCharles est un fils à papa pourri gâté et a l'habitude que tous acquiescent à ses moindres demandes. Il a toujours reçu énormément d'attention étant donné qu'il est le fils du plus grand directeur de l'usine à papier de Cherwood & Sons. Cependant, s...