Le contrat

41 1 0
                                    

Ludovic

Je suis sur le point de franchir le seuil, qu'un gémissement meurtrit me parvient. Le temps se suspend un instant, mon cœur se fait violence pour ne pas accourir à son chevet. Mon instinct me dicte de la retrouver mais ma conscience me retient « tu dois t'en aller. » « Quitte, sans te retourner ». Je ne peux pas, sa souffrance me tord les tripes. Je tourne la poignée pour m'en aller, cependant mes jambes se soudent au plancher, elles sont remplies de béton invisible. Un trou béant a remplacé mon ventre, dois-je partir ou rester et la convaincre que notre histoire à aucune issue? Mon âme-sœur ne m'est pas destinée, cela est contradictoire mais vrai. Cet amour est condamné depuis le début, quand tout le monde connaîtra le secret malsain que nous détenons, il n'aura que du dégoût; j'aime l'ex de mon frère jumeau, mon verdict est tombé, je suis désaxé. Un faible gémissement de torpeur retentit de nouveau. C'est une évidence, je dois lui parler. Mes pieds se retournent et se dirigent vers la source des faibles lamentations. Mon corps me porte machinalement vers Hugo, une brève conversation s'entame dans mon brouillard mécanique, ma bouche lui demande la permission de la retrouver, mon corps agit seul, mes mouvements sont automatiques, être forts pour nous deux est la solution.

Me voilà assis sur le lit, je tiens sa main, sans tendresse. Je reste doux, pourtant mon discours est froid. Mon âme contemple la scène de là-haut, il me crie des hostilités. « Crétin ne fait pas ça! tu vas le regretter. » « L'amour de ta vie a besoin de toi, tu dois te battre pour votre amour avorter trop tôt.»

Ma conscience se débat dans une mer agitée. Je laisse glisser les mots sur ma langue et ferme mes tympans pour minimiser les casses, que mon être subit.

Je m'approche doucement d'Aurélie pour lui chuchoter mes certitudes non assumées, mon pouce caresse doucement sa paume. Mon regard se brouille sous sa chaleur et mon esprit refait surface. Mes larmes roulent sur mes joues sans que je puisse les retenir, du feu se repend dans ma trachée.

Je force les mots, les énoncés inévitables pour nous :

-Auré, notre histoire est morte dans l'œuf, nous n'avons pas le droit de semer la discorde dans notre entourage, je dois te protéger de nous, tu es sorti d'un monde parsemer de malheur. Le retour à la noirceur n'est pas une option, ta vie doit respirer le bonheur et non la pourriture du mépris.

Elle secoue la tête pour rejeter mon discours criant de vérité.

- Je ne veux pas te perdre, je t'en supplie, nous devons trouver une solution. L'option qui n'est pas envisageable pour moi est de te perdre. Depuis ton départ, je ressens un manque en moi, un creux qui n'arrive pas à se combler. Je suis peut-être centrée sur moi-même en te demandant de rester, mais je n'ai assez qu'on se joue la comédie. Nous avons besoin de l'un comme de l'autre pour respirer correctement. Je te propose une trêve, un apprivoisement de notre situation.

Surpris et désabusé de la tournure de la conversation, je la questionne sans attendre sur la trêve, ma voix se fait brutale et sec :

- Que proposes-tu au juste?

Elle avale sa salive bruyamment avant de reprendre :

- On pourrait se revoir en même temps que nos amis respectifs, s'apprivoiser tranquillement et voir si une amitié pourrait ressortir de tout cela.

Amis! elle me niaise là.

Je ne réponds pas à son idée loufoque pourtant elle détient une solution temporaire, cela pourrait calmer mon manque d'elle mais je dois établir des règles pour ne pas vouloir étouffer ce Hugo. Le voir faire des choses qui m'auraient été assignées dans un monde parallèle me fou les boules.

Le jumeau de mon exOù les histoires vivent. Découvrez maintenant