Chapitre 17

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Vendredi 4 juillet 2025

21 h 51, mon téléphone bipa. Un message de Lucas :

La voiture est prête. Je t’envoie un SMS quand nous serons arrivés. Bisou.

Je ne répondis pas.

Dans la loge, je trouvai L’Émissaire devant le mur du fond, attentif, les bras croisés dans le dos.

— Salut.

Il pivota légèrement et l’éclat vert de ses yeux apporta une touche de couleur dans tout ce noir.

— Salut.

Je contournai l’estrade ronde réservée au médaillon qui patientait, suspendu dans les airs, et m’avançai vers lui.

— Qu’est-ce que tu fais ?

— Regarde, dit-il avec un signe de tête.

Au milieu de mur s’affichait un long listing. Je ne l’avais pas remarqué de loin.

— C’est le classement, m’expliqua-t-il. Le nombre d’équipes a diminué. Nous sommes en bonne position à la sixième place.

— Sixième ? Bof, c’est pas glorieux.

— Personnellement, je trouve notre score encourageant, commenta-t-il en se frottant les mains.

— Il n’y a que le premier qui gagne, rappelai-je.

— Certes.

Il me fixa intensément et leva un doigt qui m’hypnotisa.

— Cependant, Wave, si on prend en considération le fait que nous ne nous connectons que quelques heures par jour, que notre équipe est au complet, que nous avons fait le plein d’énergie et que nous possédons tous les trois un medkit, je crois que c’est honorable.

L’Émissaire savait analyser la situation et faire de longues phrases ! Il m’impressionnait. J’observai encore une fois les résultats de près.

— Oui, vu sous cet angle, tu as raison, admis-je.

Je me détournai du mur et balayai la pièce des yeux.

— Pas de nouvelles d’Eo ?

— Non, c’est étrange d’ailleurs, répondit-il d’une voix préoccupée. Sa carte est là et jusqu’à présent, il arrivait toujours avant nous.

— Il ne devrait pas tarder, soupirai-je.

Je m’installai virtuellement dans mon fauteuil. Cela me fit bizarre de ne rien sentir sous moi. Je commençais un peu trop à m’habituer à l’interface Sensation. L’Émissaire vint me rejoindre et s’assit dans celui d’Eo à côté de moi. Nous restâmes silencieux un moment, chacun plongé dans ses pensées. Je fixais mes baskets qui pointaient sous mon ample pantalon noir ; L’Émissaire avait croisé les bras sur sa poitrine et contemplait le plafond, aussi dépouillé que les murs de la loge.

— Alors, Wave, quelles sont tes impressions sur ALE ? s’enquit-il soudain de sa voix grave et tranquille.

— Euh… je ne sais pas trop en fait.

— Tu ne te poses pas de questions ? s’étonna-t-il.

— Si, plein ! Je me demande surtout où cela va nous mener !

— Tu veux dire, comment va être notre futur ?

— Euh, non, pas vraiment ! grimaçai-je. Je me demande plutôt comment le jeu va se terminer.

— Ah ! je comprends. Tu as envie de savoir si nous allons gagner.

— Exactement.

L’Émissaire me regarda avec une telle insistance qu’il m’aurait fait rougir si je n’avais pas été sous ma forme d’avatar. Je peinais à soutenir ses yeux scrutateurs, alors je trichais en me focalisant sur son piercing au sourcil. Quand il reporta son attention sur le mur devant nous, je soufflai. J’avais beau me sentir beaucoup plus à l’aise en sa présence, ce gars-là dégageait une aura qui m’intimidait parfois.

ALE 2100Où les histoires vivent. Découvrez maintenant