15. Mamie Ayumi

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Gosuto, Seishin et les chats dévalent le long chemin étroit en pente qui les sépare désormais de la maison où a grandi Gosuto.

- Plus vite, il faut qu'on se dépêche, tout cela m'inquiète, dit Gosuto en courant aussi vite qu'il peut.

- Les petits risquent de ne pas vous suivre si vous courrez à cette vitesse, dit Milo. Ils n'ont toujours pas mangé, je vous rappelle!

Gosuto regarde par dessus son épaule et voit Seishin et Phoenix courir comme des dératés pour le rattraper. Il s'arrête, fait signe à son fils de s'arrêter et pose sa main sur son épaule:

- Ecoute mon grand: je vais devoir aller très vite jusqu'à chez Mamie. Du coup je ne vais pas t'attendre, mais ne t'inquiète pas; je vais juste m'assurer que Mamie va bien et je reviens te chercher, si jamais tu te perds. Normalement ça devrait aller, regarde.

Gosuto pointe son doigt en direction d'une toiture rouge foncé qui surplombe toutes les autres:

- La maison de Mamie, c'est celle ci. Tu descends la rue, et arrivé tout en bas il y a un croisement. Tu prends à droite, tu cours sur un peu moins d'un kilomètre et tu y seras. Tu ne pourras pas la rater.

À peine Gosuto a-t-il fini sa phrase qu'il se retourne d'un bond et court à une vitesse invraisemblable, disparaissant en quelques secondes de la vue de Seishin et Phoenix. Même Milo semble être à la traîne, allant jusqu'à rater son virage à droite à l'intersection et finissant dans un fracas assourdissant dans les poubelles en contrebas, avant lui aussi de disparaitre au coin de la rue.

- Allez Phoenix, tu as entendu Papa, il nous reste encore un bon kilomètre et on sera chez Mamie, dit Seishin en serrant les poings de détermination.

Les deux amis se mettent à courir dans la rue, suivi de près par les sept autres chats. Le virage à droite est brillamment négocié, et c'est une rue un peu plus large qui s'ouvre devant eux. Les foulées s'enchaînent, Seishin se focalise sur son souffle pour maintenir un rythme soutenu, tout en surveillant Phoenix pour s'assurer qu'il tienne le coup. Le garçon réalise alors que son jeune chat court à la même vitesse que lui, ou plus exactement, c'est Seishin qui court aussi vite que les chats. Tout d'un coup, Seishin et Phoenix se rendent compte que le mobilier urbain semble bouger. Ils ralentissent et regardent médusés la maison à leur gauche qui semble danser, tandis que les lampadaires tremblent comme si le froid ambiant les faisait frissonner.

- Un... Un tremblement de terre, dit Seishin en reprenant ses esprits. Ce n'est rien, il faut juste attendre que ça se calme. Reste près de moi, dit-il en faisant signe à Phoenix de se rapprocher.

Les sept autres chats ralentissent la cadence et finissent par s'arrêter en attendant la fin des secousses. Cette dernière est aussi brutale que les secousses elles-mêmes, tout s'arrête d'un coup. Les oiseaux, qui se sont tus le temps du seisme, retrouvent peu à peu leur voix et remplissent l'effrayant silence de leurs joyeux gazouillis. Le groupe reprend aussitôt sa course en direction de la maison.
En très peu de temps, ils arrivent devant le bâtiment au toit rouge foncé. La maison est imposante, belle, d'un blanc immaculé qui contraste avec le gris terne des bâtiments voisins. Seishin scrute minutieusement la maison, dans l'espoir de voir son père dans les environs, mais il ne voit personne. Il décide de s'approcher de la porte d'entrée et fait signe aux chats de prendre position tout autour de lui. Dans un silence absolu, les chats forment un cercle autour de Seishin et Phoenix.
C'est la voix de Gosuto qui vient rompre le silence:

- Aaaah mon petit bonhomme est là! Viens par ici, il faut que tu vois ça.

Seishin regarde les chats et leurs fait signe de le suivre. Il contourne les murs de la grande maison, et débouche sur une vision tout à fait inattendu; le niveau supérieur de la maison est éventré, et un gigantesque oiseau de proie gît sur le sol, la tête enfouie sous les gravas. Gosuto pose la main sur sa nuque et son regard en dit long sur sa surprise:

- Je n'arrive pas à croire que Maman ait réussi un truc pareil...

Milo évalue l'imposant tas de plumes en un regard, puis souffle:

- C'est une compagne de Gardien, quand même, ce n'est pas n'importe qui...

C'est une voix inconnue qui se manifeste alors dans le dos de Seishin, avec un accent japonais marqué et une inhabituelle douceur:

- Je n'allais quand même pas me laisser faire! Qu'aurait dit ton père si je ne m'étais pas défendue?

Seishin, Phoenix et les sept chats se retournent tous en même temps et font face à une dame à l'allure singulière, un peu plus grande que Seishin. Ses cheveux noirs et soyeux descendent élégamment sur son visage légèrement marqué par le temps, et masquent à peine deux yeux malicieux qui pose un regard bienveillant sur le jeune garçon:

- Oooooh comme tu as grandi Seishin! Tu as l'air drôlement fort... Mais... D'où sortent tous ces chats?

La dame sert tendrement Seishin dans ses bras. Elle se rapproche en tendant la main vers les félins, tout en lançant des petits cris pour les amadouer. Seishin regarde la scène et reprend ses esprits:

- Mamie? Mamie Ayumi?

La dame lève la tête tout en caressant les chats:

- Oui Seishin?

Le garçon ne répond pas. Il est juste très heureux de revoir sa grand-mère qu'il n'a connu que tout petit, et il est surtout très touché de voir qu'elle se comporte très naturellement avec lui malgré la distance et les longues années sans se voir.
Ce moment de bonheur est interrompu par une nouvelle secousse sismique, moins brutale que la précédente, mais qui fait sursauter Ayumi. Elle regarde Gosuto, fronce les sourcils et s'adresse à lui en japonais:

- Préparez-vous. Ils vont revenir. Ils sont tout proche.

Le Gardien des Chats : La Lune de SangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant