Et si on essayait ensemble? TOME I

1] Chapitre 8 : La fête.

La fameuse fête ressemblait en réalité à une fête foraine. À l'exception que la grande place qui précédait les stands et les attractions avait été transformé en piste de danse. Le monde était fou, c'était quasiment impossible de ne pas se perdre dans la foule.

Lorsque Alex se gara sur la chaussée, il était déjà pressé de s'y rendre.

-Je vous préviens, doucement sur la bouteille. Celui qui vomit dans ma caisse, je lui explose le crâne.

Ils descendirent de la voiture et, ensemble, ils se mêlèrent à la foule.

Les heures défilaient et les étudiants étaient infatigables. La plupart se défoulait sur la piste de danse et certain l'avait délaissé pour explorer quelques attractions.

Isabelle et Nate étaient partis depuis de longues minutes déjà, la brune voulait absolument qu'il lui gagne une peluche. Elle avait toujours rêvé que quelqu'un le fasse et Nate, en bon ami, n'avait pas pu résister. Annabelle avait offert un clin d'oeil à la brune et ce n'était pas passé inaperçu aux yeux d'Alex. Il n'avait cependant fait aucune remarque.

Ce soir, il voulait juste s'amuser.

-Je vais nous chercher à boire, je reviens! S'écria sa sœur pour se faire entendre par-dessus la musique.

Alex hocha simplement la tête et l'observa s'éloigner avant de la perdre de vue dans la foule. Il reporta alors son attention sur la fille à la peau matte qui dansait à ses côtés depuis un moment déjà. Alex se souvint lui avoir déjà parlé quelques fois l'année passée, lorsqu'ils avaient quelques cours en commun. Elle était toujours d'humeur joyeuse et avait toujours quelque chose d'amusant à raconter.
Si sa mémoire ne disfonctionnait pas, elle s'appelait Ruby. Aujourd'hui, elle était visiblement accompagnée d'une amie, tout aussi jolie qu'elle, qui vint se mêler à leur danse. Lorsque la nouvelle venue attira l'autre fille contre elle pour échanger un baiser fougueux, Alex s'écarta dans un sifflement. Il laissa échapper un léger rire alors qu'il s'éloignait de la foule. Ses yeux vagabondèrent partout, à la recherche de sa sœur. Lorsque enfin, ils la trouvèrent, son sang se glaça. Son visage s'assombrit et il ne perdit pas une seconde pour se précipiter à son chevet.

-Lâche-la, enfoiré! Cria t-il alors qu'il poussa violement le garçon qui retenait sa sœur contre les bennes à ordures.

Probablement déjà bien alcoolisé, il se retrouva les fesses sur le sol, sonné par sa chute.

Annabelle resta immobile alors que ses yeux suivirent son frère se ruer sur le garçon encore sur le sol. Les coups s'enchaînèrent. Alex se déchaînait. Rien ne semblait pouvoir l'arrêter. Pas même les maigres protestations du garçon, qui n'arrangeaient en rien la situation dans laquelle il se trouvait.

-Je l'ai pas forcé, elle m'a pas repoussé!

La colère du brun se décupla. Il n'en revenait pas.

-Espèce de fils de... Je vais te tuer!

Un énième coup de poing, plus violent que les précédents fit hurler le garçon. Annabelle sortit enfin de sa torpeur. Le craquement qu'elle venait d'entendre lui tira une grimace et de nombreuses larmes. Il venait de lui briser le nez, ou la mâchoire, elle l'ignorait. Le sang provenait de partout...

-Alex, arrête! Réagit-elle finalement.

Elle n'obtint aucune réaction.

Alors, posant ses mains sur le bras de son frère pour l'empêcher d'asséner un nouveau coup de poing, elle hurla de nouveau:

-Alex je t'en supplie, arrête!

-Dégage!

Alex tenta d'échapper à sa prise et ce qui devait arriver, arriva. Annabelle recula sous la force de l'impact. Elle apporta une main à sa bouche et observa avec horreur le sang se répandre sur ses doigts. Son coude avait violement heurté sa lèvre alors qu'il se débattait.

Cette fois, elle avait obtenu une réaction. Pas celle qu'elle aurait souhaité, évidemment. Il ne l'avait pas fait exprès, elle le savait. Mais bon sang, pourquoi fallait-il toujours qu'il réagisse de manière aussi incontrôlable?

Pétrifié, Alex la fixa durant de longues minutes. Le garçon avait déguerpi à l'instant même où il en avait eu l'occasion. Alex se redressa et tenta de s'approcher de sa sœur mais s'arrêta brusquement. Ses mains tremblantes voulurent la prendre dans ses bras mais il en était incapable. Il était figé. Son visage qui, il y a quelques minutes encore n'exprimait que de la colère, était désormais figé par l'horreur.

-Je suis... je suis désolé. Je ne voulais pas... Je suis désolé, Anna. Je suis désolé. Répéta t-il.

Comme la brune, les larmes coulaient sur ses joues.
Il tourna la tête et ses yeux tombèrent sur le sang immaculant le sol. Annabelle s'approcha de lui aussitôt, tendant la main vers lui comme pour le rassurer mais son frère recula aussitôt, manquant presque de trébucher.
L'adrénaline redescendue, il prenait conscience de ce qu'il venait tout juste de se passer. De ce qu'il venait tout juste de faire. Annabelle l'avait compris et, comme toujours, elle voulait le protéger. De ses pensées. De lui-même.

-Alex, ce n'est pas de ta...

-Ne dis rien aux parents... L'interrompit-il brusquement, alors qu'il tournait la tête vers elle. S'il te plaît, Anna, ne leur dis rien. Tu me dois un service... C'est ce que je te demande de faire pour moi.

La lueur qui dansait dans ses pupilles lui faisait peur. Elle ne put que hocher lentement la tête et l'observer s'éloigner sans un mot.

Les larmes avaient cessé de couler. Le sang lui, non.

Bordel, que venait-il de se passer?

S'éloignant de sa sœur à grande foulée, Alex manqua de trébucher de nombreuses fois. Sa vision était trouble. Ses oreilles bourdonnaient. Son coeur battait vite. Trop vite.

Quand s'arrêterait-il? Quand une énième personne le provoquerait et qu'il lui donnerait un coup de trop, un coup qui lui serait fatal?

Cela finirait par arriver, il le savait. Et il avait peur. Peur des conséquences. Peur de ce que les gens penseraient de lui. Et par dessus tout, peur de lui-même.

Derrière le volant de sa voiture, il passa de longues minutes à fixer ses mains ensanglantées autour de celui-ci. Puis, après avoir retrouvé un semblant de respiration, il mit le contact et s'éloigna de cette fichue fête.

Jamais il n'aurait dû y mettre les pieds.

Il quitta la route pour se garer dans un champ, à quelques mètres de l'immense place où se déroulait la fête. Il entendait encore la musique résonner. Cependant, c'était calme. Il n'avait pas besoin d'aller plus loin. Personne ne pouvait l'apercevoir d'ici.

Il sortit de sa voiture et grimpa sur le toit de celle-ci pour s'y asseoir. Ne supportant plus la vision de ses jointures ensanglantées, il leva la tête et se mit à fixer l'horizon.

Le ciel était beau. Il brillait d'étoiles et la lune, pleine, était désormais visible.

Malencontreusement, ses pensées dérivèrent.

Il se mit alors à fixer une étoile en particulier parmi les milliers d'autres et pensa à son père.

Quelle aurait pu être sa réaction?

Aurait-il levé la main sur lui une nouvelle fois?

Ou l'aurait-il, au contraire, félicité d'avoir agis comme un homme?