20 - Le collier de diamant

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- Bonjour Madame. Je cherche un collier à offrir à ma petite-amie pour son anniversaire. Qu'est-ce que vous pouvez nous proposer ?

J'adressai un large sourire à la femme derrière son comptoir tandis que Tyron, derrière moi, faisait de même. Un de ses bras reposait dans mon dos, sa main contre ma hanche encore douloureuse, tandis que l'autre tenait un appareil photo factice.

- Mais bien sûr mes enfants, venez suivez-moi.

A peine eut-elle tourné le dos que je perdis mon sourire, douloureux pour mes lèvres crispées. Je redressai les yeux vers Tyron, méconnaissable. Il était l'archétype du parfait touriste. Un pantalon en tulle noir, une chemise à fleurs sous sa veste d'hiver matelassée, des lunettes de soleil sombre et de longs cheveux longs attachés en queue de cheval. Il avait laissé pousser sa barbe, et était loin du bandit recherché dans tout l'état. Il ressemblait bien à la moitié des hommes de cette ville en saison touristique.

Quant à moi, les deux hors-la-loi avaient également tenu à ce que je sois méconnaissable. Ils m'avaient affublé d'une horrible doudoune rose sur une robe rayée, des bottes à talons avec lesquelles je manquais de m'écraser à chaque pas, une perruque brune qui me grattait le cou et des lentilles de contact bleus. J'ignorais où ils avaient pu avoir tout ça et, en fin de compte, n'était pas sûre de vouloir le savoir.

Et j'étais en ville. C'était sans doute le plus extraordinaire. Je croisai des gens, des sourires, je tombais sur des boutiques décorées au couleurs de noël en vue de l'arrivée des fêtes. Pour moi, tout c'était arrêté il y a quatre jours, et c'était troublant de voir que, pour tous ces gens, la vie continuait toujours. Mon monde, le peu de repère que j'avais... je les aveint perdus, comme tout le reste.
Heureusement, je n'avais croisé personne de ma connaissance dans les rues. Enfin, je craignais le plus mon père et John.
Dieu sait ce que Tyron aurait pu faire si qui que ce soit me reconnaissait. En venant jusque cette boutique, la plus grande bijouterie du coin, je m'étais arrêtée face à face à un poteau. Face à face avec moi-même, ou plutôt une affiche de moi. C'était une photo prise il y a quelques semaines, sur laquelle je semblais bien ignorante de ce qui allait arriver. En-dessous, un texte rouge affichait :

DISPARUE LE 3 DÉCEMBRE

MORGANE FREEMAN, 19 ANS

SI VOUS VOUS VOYEZ CETTE PERSONNE, APPELEZ IMMÉDIATEMENT LA POLICE OU LE 06.34.59.82.71

J'avais immédiatement reconnu le numéro de John, et j'avais eu un pincement au cur en voyant ces affiches, collées sur les murs, les poteaux, les boutiques à intervalles régulières, abimées par la pluie et le froid. Il me cherchait. Et, oh combien j'aurais aimé pouvoir lui faire parvenir que j'allais bien.

Tyron me poussa dans le dos en suivant la dame, et je marchai le plus naturellement possible. Je me rappelai les conseils des deux frères qui, avec la distance, ressemblaient plus à des ordres. Sois la plus naturelle possible. Souris, croise le regard des gens, ne regarde pas partout autour de toi. Le plus dur était sans doute d'empêcher mon corps entier de trembler.

Tant en avançant dans l'arrière-boutique, j'enregistrai le plus de détails possibles autour de moi. Seulement, je n'avais encore jamais essayé de regarder un maximum de choses pour toutes les retenir, et j'ignorais si j'en serais capable. Mon cerveau n'était pas programmable quand je le souhaitais, et c'était bien là le problème. Il gardait les infos qu'il voulait garder, et non celles que je voulais, moi.

La vendeuse s'arrêta devant une armoire vitrée, où reposait un collier certi de diamants bleus. Je n'avais jamais été fan des choses qui brillaient. Seulement, je devais admettre que ce bijou était... sublime. Fin, délicat, presque modeste malgré les diamants aux milles étincelles. La dame me sourit en voyant mon vif intérêt pour son bijou :

Mémoire en CavaleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant