Elle ne me répondit pas et tout au long de la courte route je me demandais si je n'y allais pas pour rien, je fus certaine que non lorsque je vis que Sarah m'attendait, appuyée contre le mur en crépi d'une façade de maison bordant la route. Elle aurait pu au moins me confirmer sa venue pensais-je en me rapprochant d'elle.
"Salut.
- Oui, salut. Alors pourquoi tu voulais me voir ?
- Comme ça, j'en avais envie."
Je tombais des nues, elle n'avait aucune idée de ce que j'allais devoir affronter en rentrant, tout ça parce que mademoiselle avait envie ? Bien que cela ne soit pas dans mes habitudes, je sentis un sentiment de colère monter en moi, une irrésistible envie de lui demander pour qui elle se prenait à faire sortir les gens comme ça, juste par envie mais avant que je n'eus le temps d'ouvrir la bouche, elle vint se blottir contre moi. Stupéfaite, je ne savais pas comment réagir autrement que la laisser faire. Une fois ce moment gênant passé, elle se recula, le regard fuyant vers le sol, gênée elle aussi à première vue.
" Pardon, me dit-elle.
- C'est pas grave... Ça sera sans doute pas la chose la plus bizarre de la soirée."
J'essayais de sourire mais difficilement, nous venions de partager quelque chose d'assez nouveau pour moi et j'avais apprécié, de ce fait, je me sentais aussi honteuse qu'elle, si ce n'est plus.
" Merci d'être venue, c'est cool.
- Tu m'as dit que tu devais me parler et que ça pouvait pas attendre demain...
- Oui mais en fait... Tu vois..."
Son regard n'avait pas quitter le sol, ses bras me tenaient toujours par la taille, je n'avais aucune idée de ce qu'elle me voulait en réalité, et surtout je me sentais perdue. Comment un simple message m'avait fait réagir comme je l'avais fait, bravant l'autorité de ma mère, sortant le soir, ce qui était une première pour moi, à dix-sept ans, j'avais presque honte de me l'avouer à moi même, comment ais-je pu venir jusqu'ici, pourquoi m'avait-elle prise dans ses bras, pourquoi avais-je autant apprécier ? Tant de questions qui se bousculaient dans ma tête et aucun fragment de réponse à leur fournir.
" T'as froid Valentine ?"
La question me surprit tout d'abord puis je réalisais que je tremblais.
"Un peu, mentis-je. Ça te dirait qu'on marche un peu ?
- Oui."
Elle se décala et j'avançais machinalement dans la rue par laquelle j'étais venue.
"Attends, pas par là. De ce côté."
Elle m'indiqua la rue de gauche, j'ignorais bien pourquoi mais lui fis confiance et nous traversâmes. Les magasins étaient tous fermés, évidemment, notre petite ville s'éteint passé dix neuf heures, même les cafés sont fermés. Nous avancions dans un lourd silence, elle ne m'avait toujours pas dit la raison de son insistance à me voir, je me doutais bien que ce n'était pas pour cet imprévu petit câlin. Son regard avait quitté le trottoir lorsque nous nous sommes mise en route, elle me regardait fixement maintenant et au moment où j'allais ouvrir la bouche pour lui demander une nouvelle fois la raison de son obstination à me voir c'est elle qui prit la parole avant même qu'un son ne sorte.
"Plus tard. Il y a un petit parc avec des bancs pas loin, je te dirai tout là bas. Ça me permettra de réfléchir aussi en chemin à comment te le dire. "
Je ne voyais pas quoi répondre à cela, je me contentais de hocher la tête et de continuer d'avancer. Je voyais bien de quel parc elle parlait, j'y avais même été quelques fois en étant plus jeune, en compagnie de mes parents, il y avait là deux ou trois bancs ainsi qu'une vielle balançoire et un tourniquet, à cette époque mes parents s'entendaient encore assez bien, du moins la petite fille que j'étais n'avait rien remarqué. Je me rappelais joyeusement cette époque tout en avançant, le bout de la rue se profilait à l'horizon, doucement nous nous en approchions. Je sentis mon téléphone vibrer dans la poche de mon jeans mais n'y prêtais aucune attention. Je me doutais que l'appel que j'étais en train de recevoir provenait de chez moi, le collègue de mon père devait être partit.
![](https://img.wattpad.com/cover/181494444-288-k494186.jpg)