1787 :
Lorsqu'elle faisait le marché pour sa mère, souvent un ou deux hommes s'arrêtaient pour la saluer. Au début elle rougissait brusquement mais à force la surprise n'était plus d'actualité, ainsi l'habitude et la lassitude avaient pris une place plus importante que la timidité qu'elle portait. Étant donné la taille du village, elle avait fini par reconnaître tous les hommes qu'elle croisait. Elle savait qui était marié, fiancé, qui était riche, pauvre, fou ou érudit...Et aucun ne semblait lui convenir. Elle avait atteint l'âge d'être mariée mais refusait de se soumettre à une autorité maritale pour le moment. Voulant le bon, voulant avoir un choix varié, elle projetait de gagner le village voisin afin de trouver la perle rare. Alors qu'elle déambulait au milieu des marchands qui hurlaient le prix imbattable de leur produit, un jeune homme l'interpella :
-Mad'moiselle Lejeune !
Elle se tourna vers la source de cet appel subit et enjoué. Elle tenait fermement son panier en osier où reposait une miche de pain qu'elle venait d'acheter. Heureusement, ce jeune homme lui était connu. C'était Philibert, le fils du voisin. Il s'approcha de Mademoiselle Lejeune :
-'Peux vous ramenez à la ferme ? Demanda-t-il avec politesse.
Ce fils de paysan était sûrement le plus gentil et simplet que Mademoiselle Lejeune n'avait jamais connu. Elle avait dû mal à comprendre ce garçon de son âge, sa compagnie n'était pas des plus agréable mais refusant de lui faire de la peine elle accepta :
-Bien sûr Philibert, avec joie.
-Comme vous parlez bien, pour sûr. Bafouilla-t-il gêné par sa manière rustre d'articuler les mots.
Elle sourit et il rougit. Il est vrai qu'elle avait eu de la chance. Aucun des enfants de ses voisins ne parlaient correctement. Ils étaient facile de comprendre ce qu'ils disaient mais leur vocabulaire était loin d'être varié, au contraire. Ils sortirent tous deux du village pour gagner leur résidence, la ferme de leur famille. Philibert parla de la naissance d'un petit veau néanmoins il fallait lui trouver un petit nom et personne n'avait réussi à ce mettre d'accord. Ils habitaient à un quart d'heure à pied du centre du village vendéen. Ce fut avec une joie contenue que la jeune mademoiselle quitta l'ennuyeux Philibert. Il la salua de la main en souriant gaiement. Il faisait beau cependant le blé poussait difficilement dans les champs. La pluie avait manqué cet automne et l'arrivée du printemps n'annonçait rien de bon. L'habitation où elle résidait était la même que tous les paysans, éleveurs ou laboureurs. Il y avait plusieurs bâtiments, ceux qui avaient un toit, étaient recouverts de chaume. L'un des bâtiments était aux murs fins, maintenait à l'abri la charrue et divers autres instruments. Il touchait la maisonnette des Lejeune, dans laquelle le grenier était consacré à la conversation du blé, quand il y en avait. Les champs qui entouraient la maison étaient entourés de fossés protecteurs recouverts de ronces par endroit. Marchant sur un chemin caillouteux, la jeune mademoiselle s'empressa d'ouvrir l'unique porte abimée qui menait dans la maison. Elle la ferma rapidement et scruta la pièce. Il n'y avait personne. Elle ôta son foulard qu'elle portait sur ses épaules dès qu'elle sortait. La salle dans laquelle elle se trouvait était très simple, à l'image de la vie qu'ils devaient mener, elle et sa famille. En effet il y avait trois pièces : le salon qui faisait salle à manger et cuisine, une chambre pour trois, et une petite salle d'eau qui servait seulement quand son frère avait la gentillesse d'aller chercher des seaux d'eau au puits. Elle s'approcha de l'âtre où mourraient quelques flammes qui avaient servis à chauffer une soupe pour le déjeuner. Tout à coup quelqu'un rentra :
-Louise ! S'écria le nouvel arrivant. Regarde ce que m'a donné Monsieur Gaspard !
Le garçon de dix-huit ans tendit un petit miroir à sa sœur. Elle le saisit et se regardait en bougeant l'objet afin de voir toutes les partis de son visage. Elle avait des cheveux blonds, sales à cause de la terres, longs mais attachés grossièrement à l'arrière de la tête, des pommettes saillantes, des petits yeux foncés, le tout avec un visage fin et gracieux comme jamais personne n'avait vu dans les parages. Sûrement à cause de la consanguinité. Les Lejeune ont été épargnés grâce à leur grand-père maternel qui était un soldat étranger. Selon ce qu'on acceptait de leur raconter. Leur arbre généalogique, parsemé de blanc, traduisait l'étrangeté des origines de leurs ancêtres:
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Le lys et les entailles
Historical FictionFin du XVIIIe siècle: Louise Lejeune aspire à plus que sa vie en campagne dans sa Vendée natale. Quittant son domicile pour la capitale, son frère s'inquiète...À juste titre...Leurs escapades à Paris va les conduire à fréquenter des personnages hau...