Jour 51

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Cette nuit, je suis de service avec Amalric. Nous nous comprenons d'un regard, sans un mot. Il reste à la barre pendant que je descends une des voiles. Je commence à la plier quand je le vois qui s'approche pour m'aider.

- Ça va manquer tout ça ; cette immensité, tout cette eau. Ma prochaine mission n'est que dans trois mois... Ça va être long. Il va falloir apprendre à vivre comme tout le monde, se couler dans le moule, faire semblant d'être libre et en sécurité sur la terre ferme alors que c'est ici qu'est la Liberté, prisonnier dans ce bateau, sans autre issue que celle de se laisser aller au fil de l'eau, au grès du vent.

- Tu repars où ?

- Tour de l'Atlantique avec escales, pendant huit mois. Sur un ancien chalutier que je retape avec d'autres. Avec un équipage beaucoup plus grand. Au moins vingt personnes. Ça va faire bizarre.

Nous avons replié la voile. Sans un mot. Il n'y avait pas de nostalgie dans sa voix, il sait profiter de l'instant présent. De retour à la barre, un spectacle grandiose nous attendait : un coucher de soleil du feu de dieu. Des couleurs de partout. Des poissons sautant hors de l'eau dans les vagues. Éblouis, nous regardions l'horizon chatoyant. Un ciel crépusculaire violacé. Nous restions sans bouger, bouche bée. Anesthésiés. Émerveillés. 

Nous avons vu de multiples couchers de soleil depuis le début de notre aventure, mais tous sont uniques! 

60 jours en mer - on est tous dans le même bateauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant