Jour 11

11 2 0
                                    

Il est bientôt 16h. Je suis fatiguée comme jamais. Il a fait blanc toute la journée. J'ai fini mon shift avec Shan il y a quelques minutes ; ce sont Snoo et Julien qui nous ont remplacé. Bon courage à eux! J'ai les yeux explosés. Il y a eu un brouillard intense toute la journée ; la nuit noire a laissé place à un jour blanc. Par moment, nous distinguions à peine l'extrémité du bateau, heureusement que les radars existent! Je pense que c'est la première journée où j'ai autant attendu ce moment délicieux où je vais pouvoir m'allonger sur mon lit et enfin pouvoir fermer les yeux.

J'aime bien la brume, ça habille le paysage, on flotte sur des nuages, des montagnes apparaissent comme par magie, des reliefs mouvants ; l'imagination est  à son comble, mais tout peut arriver, le bateau avance dans du coton, il faut sans cesse être sur le qui-vive. Almalric écrit, ça fait deux heures qu'il gratte du papier, deux heures qu'il dépeint les paysages par des mots. J'aimerai lire ce qu'il écrit, que peut-on écrire pendant deux heures de suite ? Mais lui, il est parti, il est dans son monde. Il ne parle pas, lui, il écrit. Je ne sais presque rien de lui, il ne se livre jamais. Il ne parle pas. Hier, à table, c'était flagrant : la mer était calme, Élouan était sur le pont avec Julien, avec les autres, nous étions dans notre coin de loisir dans la cale ; nous avons mangé tous les quatre. Snoo et Shan racontaient des anecdotes de voyages, nous rigolions, nous avons parlé ensuite de sport, la conversation allait bon train, mais Amalric n'a pas lâché un seul mot. Je ne lui poserai jamais de questions, je n'aurais pas cette indécence, mais comme il ne parle pas, je ne sais même pas s'il nous apprécie...mais je pense quand même qu'il nous aime bien, il sourit souvent quand Shan raconte ses histoires. C'est un loup solitaire ; un vieux loup de mer. 

Shan, c'est vraiment le comique de la bande, je l'aime bien, il a toujours le mot pour rire, il a un million d'histoires à raconter, je doute souvent de leur véracité, mais ce n'est pas grave, cela fait partie de son charme. 

60 jours en mer - on est tous dans le même bateauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant