Histoire des Elfes - la Dynastie Noire

Chapitre 17

Kirina tombait de sommeil, elle ne parvenait plus à suivre que mollement, et sursauta lorsque la voix de sa mère claqua comme un fouet : 

" - Kirina ! Tu dois écouter, c'est très important ! Je ne te permettrai pas de t'endormir jusqu'à ce que j'ai fini.

- Elle va finir par s'endormir et tu n'y peut rien, ma chérie, dit une voix grave derrière le dos de la Souveraine, qui appartenait à Ivemm. Laisse-la donc dormir, elle ne pourra pas écouter si tu l'y force dans cet état."

La Souveraine capitula et Kirina rejoignit son lit jusqu'au lendemain matin, où elle se leva, fraîche et reposée. Elle alla se restaurer dans l'immense salle à manger, où la Souveraine Talina lui rappela qu'elle avait une leçon ce matin-là. Elles s'assirent donc comme à leur habitude, et Talina continua : 

"- Ce matin-là, donc, fut terrible pour les insurgés. Tous trouvèrent une cachette chez d'anciens voisins, proches, amis, et les gamins des rues aidèrent beaucoup également, mais de nombreuses personnes furent sorties de force de leurs foyers, et les maisons furent brutalement fouillées, comme toujours dans ce genre de circonstances. 

La troupe de Sangs-Mêlés et Elfes Rayés qui étaient sortis la veille avec l'aide de leurs quatre meneurs ne purent rien tenter. Ils avaient bien tenté de fabriquer des cordes, mais cela n'avait pas trop réussi, et, étant donné leur état, il aurait fallu plus d'une nuit pour construire des échelle taillées dans des troncs de bois ; Ils avaient donc décidé de se cacher dans un petits bois non loin dans le cas où on chercherait à les poursuivre, eux aussi. 

Téania, Keltt, Deiann et Arnn étaient en panique. Heureusement, Ellania s'était souvenue d'une bonne cachette, juste dans la muraille, là où personne ne reviendrait les chercher. Ils s'y terrèrent le temps de culpabiliser à l'idée des autres Sangs-Mêlés cachés, et sortirent ensuite pour sauver de leur mieux ceux qui n'avaient pas encore été repris par la milice Elfe et les Gardiens. L'espace était petit, et ne pouvait accueillir grand monde, mais Deiann l'agrandit du mieux qu'il peut en utilisant une métamorphose partielle, de manière à déloger les pierres plus facilement avec ses griffes, tandis que les insurgés se passaient les pierres jusqu'à l'extérieur, où d'autres personnes les chargaient sur un chariot qui passait par là, vide, rentrant sans doute chez lui. De pierre en pierre, il y eut plus d'espace pour les insurgés qui se faufilaient discrètement dans les rues jusqu'à la muraille, espérant ne pas être pris par les gardes de la ville et de la Souveraine. En une matinée, une bonne partie des insurgés restants étaient sauvés, et les miliciens commençaient à fatiguer. La Souveraine ordonna une pause, et tous les miliciens rentrèrent dans leurs casernes et abris. 

A ce moment-là, le feu vert fut donné pour tous les insurgés, qui sortirent de leurs cachette pour rejoindre le reste du groupe. On tenta de dénombrer les absents, et il fut constaté avec désolation qu'au moins un cinquième des rebelles encore dans la ville s'étaient fait prendre.

Deiann, qui avait travailllé sur la muraille en largeur, continua, et le trafic de pierres continua, jusqu'à ce qu'il perce un trou avec l'aide d'autres Sangs-Mêlés qui, eux aussi, pouvaient se métamorphoser. Ce fut ainsi que le reste des insurgés fut sauvés. Une question s'imposa de force : Partir et abandonner les autres, aux mains des Elfes, ou rester et tenter de les sauver, au risque de tous se faire prendre ? La question était douloureuse, et pendant que l'on débattait de cela, Ellania se concentra sur ses sens et sortit de la cache très agrandie. Elle chercha attentivement les odeurs typiques des Sangs-Mêlés et Elfes Rayés, différentes de celles des Elfes, et la trouva mêlée à l'odeur du sang, et de la mort. Bouleversée, elle rentra à l'intérieur et annonça qu'elle partait en éclaireuse. On la conjura de ne pas faire cette bêtise, les miliciens pouvaient ressortir à tout moment, mais elle n'écouta pas et suivit la trace que lui procurait son flair. Elle arriva bientôt sur une place, où tout les volets et les portes étaient fermés, et où il n'y avait personne d'autre que les cadavres des insurgés, tous égorgés, éventrés, carbonisés, massacrés. C'était une hécatombe. Téania regarda le spectacle un moment, les deux mains sur sa bouche, et repartit dans l'autre sens en courant. Elle arriva sans encombre à l'abri, et tous levèrent les yeux sur elle lorsqu'elle rentra dans la cache. 

"- Alors ? Demanda quelqu'un. On va les délivrer ? 

Téania regarda la personne, un jeune Elfe Rayé au corps sec, mais nerveux et musclé. Elle répondit doucement : 

- Il n'y a plus personne à sauver. Ils sont tous morts, massacrés par les Elfes."

Et elle s'effondra dans les cris de tous les insurgés, qui pleuraient leur perte. 

Lorsqu'elle se réveilla, tout le monde était en train de parler en même temps. Certains avaient l'air paniqué et d'autres en colère. Deiann était agenouillé à côté d'elle et lui demanda : 

"- Est-ce que ça va ? 

- Oui, murmura-t-elle. Mais c'était tellement horrible...

Le regard de Deiann se fit sombre et il dit : 

- On va fuir d'ici. Ce n'est plus possible de rester. Le temps de calmer la troupe et on y va."

La troupe, comme disait Deiann, ne se calma que bien plus tard, et il fut décidé qu'ils ne partiraient qu'au crépuscule. 

Ce soir-là, ils sortirent un à un de leur cachette, allèrent se planquer dans un bosquet, le temps que les portes se ferment, puis marchèrent le long des murailles, avant de rejoindre le petit bois au nord de Mennta, où ils se repossèrent pour la nuit et où ils retrouvèrent les évadés de la veille. 

Le lendemain matin, la troupe entière se mit en route ; Ils avaient décidé de se séparer en petits groupe et d'envoyer les plus costauds en premier et en dernier, de façon à surveiller les arrières et les avants. Un code de sifflements fut convenu entre tous, et chacun l'appris par coeur au cas où, quand bien même il ne savait pas siffler. 

Et enfin, ils se mirent en marche."

 "- Mère, que vont-ils devenir ? Demanda Kirina. 

- Tu le verras dans la suite, quoique je passerais rapidement sur leur périple. Nous avons presque terminé l'histoire."