Pauvre dans le halal (Inspiré de faits réels)

Chapitre 8

Selen me fixe sans un mot, elle réfléchit à ce que je viens de dire, peut-être qu'elle pense que ma foi a baissé, que je vais m'éloigner de la religion, mais non. Je suis juste éprouvée et je ne sais pas comment gérer ça. Je n'ai plus de place pour les sentiments, si je pouvais juste passer à l'acte avec quelqu'un, dans le cadre du mariage, sans avoir à y mêler mon cœur, je crois que je serai moins triste.

- Donc, dit-elle en essayant de comprendre ce que je dis, tu voudrais te marier sans aimer ?

- Selen, je ne suis pas un homme mais j'ai autant de besoins qu'eux, et tu sais que depuis Imad...

Prononcer son prénom me fait bizarre mais je sais que tout est fini avec lui, je ne veux plus rien de lui. Je poursuis alors :

- Je ne veux plus aimer. Je ne veux plus me prendre la tête, ça me fatigue, il m'a fatiguée...

- Je comprends, mais garde la foi, c'est mieux de se marier par amour. Qui te dit que tu ne vas pas regretter de t'être mariée juste pour...le faire... ?

Je soupire, nous ne parlons pas trop de sexe d'habitude, mais le mariage rime avec amour, et je sais qu'un mariage d'intérêt ne finit pas toujours bien. Suis-je prête à prendre le risque ? Je me vois mal parler de ça avec un homme, il va me prendre pour une obsédée. Au pire, s'il ne comprend pas, c'est que ce n'était pas quelqu'un d'ouvert d'esprit, pas quelqu'un avec qui je pourrais m'entendre.

- Oui, mais qui dit que je ne regretterai pas de le faire ?

Elle lève les sourcils, l'air suspicieux, ne comprenant sûrement pas mon souhait. Pour le moment je ne veux pas en arriver là, je peux attendre, encore un peu. Je ne sais pas comment font les femmes de trente et quarante ans qui sont seules, je parle des croyantes, celles qui ne font rien hors mariage. Le problème c'est la crainte de Dieu, la peur de faire des péchés, c'est la foi, soit tu l'as, soit tu ne l'as pas. Et je l'ai. Alors il est normal de prendre ça au sérieux, et d'y réfléchir mûrement, posément, sans se précipiter.

- Ecoute, seul Dieu sait ce qui est bon pour toi. Si tu te lances dans un mariage sans amour, juste pour coucher, attends-toi à avoir des regrets, parce que l'un ou l'autre finira par ressentir plus, quand tu côtoies quelqu'un au quotidien, quand tu apprends à le connaître et quand tu le touches, tu ressens forcément des choses. Alors j'espère juste que ça ne te retombera pas dessus et que tu seras heureuse dans cette relation, quelle quel soit.

Je l'ai écoutée attentivement, j'ai imprimé chacun de ses mots, elle a raison dans le fond, mais je ne sais pas si elle a déjà ressenti ce que je ressens. Elle va peut-être bientôt se marier et vivre ce que je « rêve » de vivre, avec son futur mari, je l'envie beaucoup. Mais je ne peux pas me lancer dans le mariage pour le moment, je dois encore y réfléchir un peu avant de prendre une décision.

Elle n'a pas oublié que je dois lui raconter ce qu'il s'est passé devant le restaurant. Lorsqu'elle l'apprend, elle est sous le choc, excitée, elle applaudit et bien sûr, elle se fait des films. Mais je lui répète qu'elle ne doit rien dire, et que je ne peux pas lui montrer son numéro, même si c'est mon amie, elle le comprend, elle n'est pas jalouse, elle a déjà quelqu'un (peut-être) dans sa vie.

- Mais attends, il a accepté que vous gardez contact, juste en tant qu'ami ?

- Oui, je lui ai dit que je ne veux rien de plus.

- C'est bizarre, ce n'est pas le genre à avoir des amis filles, mais on dirait que tu lui plais bien.

Je penche la tête, l'air blasé, et dis :

- Je ne veux pas de ça, Selen, tu le sais, même si c'est lui, ça ne veut pas dire que je dois écarter les jambes et oublier mes principes.

- Justement en parlant de ça, tu veux un mariage sans amour, et bah voilà.