Étreinte (V2)

Combats

Yuzu

Quand j'avais reçu un mail très officiel de ma Fédération pour une réunion exceptionnelle, j'avais flairé le problème à des milliers de kilomètres.
Et j'avais vu juste.

-Je suis sûr que vous avez conscience que nous n'avons que les meilleures intentions à votre égard et que nous souhaitons votre réussite, déclara l'un des responsables qui tournait sur ce même disque depuis au moins quinze minutes avec toutes les tournures de phrases possibles et imaginables.

-Bien sûr, je vous suis extrêmement reconnaissant pour tous les efforts que vous fournissez, m'inclinai-je en jouant le jeu tant que je ne savais pas exactement de quoi il en retournait.

-Nous espérons donc que vous prendrez en compte nos conseils et agirez en accord avec ce qui est attendu d'un athlète représentant le Japon.

-N'est-ce pas ce que j'ai toujours fait ? Avez-vous des réclamations ?, demandai-je en haussant un sourcil interrogatif.

-Ne nous en voulez pas si nous avons quelques doutes sur votre environnement de travail.

Environnement de travail ? Le Cricket Club ?

-Je ne suis pas certain de comprendre, hésitai-je en balayant du regard les hommes d'affaires assis devant moi.

-Comment expliquer sans qu'il n'y ait de malentendu... Voyez vous, il y a des personnes, un certain nombre, qui nous ont fait part de leur inquiétude...

-Mon Club a les meilleurs résultats depuis au moins trois ans, qu'est-ce qui pourrait inquiéter qui que ce soit ?

-Pas le club, intervint un autre homme. Plutôt ceux qui le fréquentent, et que vous côtoyez.

-Dites les choses clairement, réclamai-je. Je ne comprends vraiment pas où vous voulez en venir.

Je les vis se racler la gorge et détourner le regard avec gêne avant que l'un d'entre eux ne se lance.

-Le patineur avec qui vous partagez votre coach, Javier Fernandez senshu. Les gens se posent des questions, de plus en plus : il y a des vidéos, des photos, même certains commentaires faits en conférence de presse...

Encore ?! Ils n'auraient pas pu me faire un mail ou simplement venir pleurer au téléphone comme d'habitude ?!

-Je vous arrête immédiatement, soupirai-je. Il n'y a rien entre Fernandez senshu et moi, il est simplement européen, donc plus tactile que nous : toutes les interactions que nous avons, il les a aussi avec d'autres patineurs.

-Nous n'en doutons pas, m'assura-t-il avec un faux sourire. Malheureusement ce n'est pas le cas de tous vos sponsors... Vos plus gros soutiens financiers aimeraient être rassurés, vous pouvez le comprendre, n'est-ce pas ?

-Ils peuvent l'être : je suis célibataire et compte le rester, Fernandez senshu a une petite amie, il n'y a aucun problème à voir nulle part.

-Ça ne leur suffira pas. Ne pouvez pas faire une déclaration public ?

Mais qu'est-ce qu'ils racontaient ?!

-Une déclaration public ? Pour promettre que Jav- Fernandez senshu a une petite amie et que je suis célibataire ?!

-Pour rassurer les gens sur votre sexualité, corrigea-t-il.

Gardons notre calme.

-Je refuse. Ma vie privée ne regarde que moi, je ne ferai pas de déclaration, grondai-je. De toute façon si les gens pensent que je suis gay, ce n'est pas une déclaration qui les convaincra de l'inverse.