VIII

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Cela fait bien des minutes depuis que j'ai laissé le centre. J'ai écourté ma rencontre avec Liya, car je devais voir  le directeur du centre, le Dr Sainvil. Cela m'a bien arrangé, j'avais besoin de fuir Liya. Je me suis sentie bien trop faible face à elle. J'ai organisé le transfert de mes patients à d'autres psychologues. J'ai décidé de garder Liya, mais en y réfléchissant je ne pense pas que ce soit une bonne idée.

Aujourd'hui, j'ai pleuré comme une madeleine devant Liya. Et, je n'ai même pas remarqué qu'elle s'était mise à pleurer aussi. Je suis censée l'aider à aller mieux. Quand je lui raconte mes problèmes, qui font monter des souvenirs qui lui sont douloureux, je ne l'aide vraiment pas.

Garder Liya n'est définitivement pas une bonne idée. Je vais en parler au Dr Laval, il faut que je la transfère aussi le temps que je reprenne. Car, si on apprenait mon marché avec elle cela nuirait à mon engagement en tant que psychologue. Je ne dois pas donner une raison de mettre en cause mes compétences.

J'ai déjà cinq minutes à la rue Rebecca à Pétion-ville dans un embouteillage. Mais sérieusement, j'en peux plus d'attendre que la circulation soit fluide. Je sors du ligne, je gare ma voiture sur le côté et je mets à marcher. Il est environ 4h30, je vais marcher jusqu'à la place St-pierre, j'ai pas envie de rentrer aussi tôt à la maison. Après je reviendrai récupérer ma voiture et rentrer.

Le portable d'un homme juste devant moi sonna et je me souviens du mien que j'avais mis sur silencieux. Je le prends dans la poche de mon veston et vérifiai mes notifications. J'ai des messages et des appels manqués de Devon. J'ai un appel manqué de ma soeur Natacha, je vais la rappeler car les jumeaux passent un mois avec elle aux États-unis. Au moment où j'allais rappeler Chachou, un appel rentra j'inspire à fond et répond..

-Allô

-Ça va? Je t'ai appelé à plusieurs reprises. J'ai même appelé ton bureau et Diane m'a dit que tu étais pas disponible. J'imagine que c'était faux.

Cela fait une semaine depuis que je n'ai pas entendu sa voix. Cela me fait un bien fou en même temps, j'ai envie de lui raccrocher au nez. Sa voix est fatiguée. Je l'imagine, pinçant la base de son nez, tout inquiet. Je mord ma lèvre inférieure en me rappelant d'avoir demandé à Diane de refuser d'une façon ou d'une autre tout appel venant de lui et ceci jusqu'à nouvel ordre.

- Que veux-tu?

Je l'entends soupirer. Je crois qu'il passe ses mains dans ses cheveux. A chaque fois qu'il est nerveux il fait ce geste.

-Te parler, Miv. Tu me manques

-Devon, tu es sûrement un hypocrite mais pas un con. Si j'ai pas répondu à tes messages ni tes appels c'est parce que je ne voulais pas te parler. Je suis pas obligée de te faire un dessin.

-Je veux rentrer à la maison. Mes enfants me manquent.

Je poussai un rire nerveux, en lui disant;

- C'est aussi ta maison, tu as le droit d'y vivre. Mais, sache que si tu y remets les pieds je m'en irais. Quant à  tes enfants, ils sont à New-york. Achètes-toi un billet et fiches moi la paix.

-Miv, je suis tellement désolé.

-Pas plus que moi, Devon. Pas plus que moi..


-Que veux-tu, Miv?. Tu refuses qu'on en parle, tu veux pas me voir. Tu réponds pas à mes messages. Veux-tu vraiment gâcher 6 années de vie commune?

  Hein? ah non. Il n'a pas osé.

-Moi, Devon. Moi, gâcher 6 années de vie commune.  C'est pas moi qui ai trahi l'autre. Ce n'est pas à moi que mon époux ne suffisait plus et qu'il a fallu que j'aille voir ailleurs. Tu ne manques pas de toupet.

-Miv, ajouta-t-il d'une voix plaintive, je me suis excusé. Je sais que les mots ne suffiront pas, je suis prêt à faire tout ce que tu veux pour être à nouveau avec toi.

-Si le nous, comme tu le penses si bien aujourd'hui t'importait, Je suis sûre que nous ne serions pas là. Nous n'aurions pas au cette discussion. Tu ne peux t'en prendre qu'à toi même.

-Mivida, penses aux enfants.

-Les enfants? Nos enfants? Dis-moi Devon à chaque fois tu allais vers ta maitresse, les images de tes enfants t'ont-elles hantées? Non, je ne crois pas. Comment peux-tu me demander de faire une chose que toi, tu n'as pas pu faire?. Rien ne t'a ébranlé Devon, rien. Ni ce que toi et moi on a vécu. Aucune de nos promesses,  Aucun de nos rires, de nos moments. Rien ne t'a empêché de me tromper, pas même notre amour. Tu n'as même pas songé à Dieu. Au moins la crainte de Dieu pourrait t'empêcher de me tromper qui de plus, à plusieurs reprises. Même face à ça, tu as été qu'un insensible. Je doute que l'image de nos enfants pourrait y faire face.

-Je suis tellememt désolé chérie..

-Le pire, c'est que tu rentrais tout les soirs à la maison comme si de rien n'était. Il y avait toujours un dossier important sur lequel tu as dû travailler tard et qui te rendait tellement fatigué. Tu n'as pensé qu'à toi. En égoïste et hypocrite que tu es!!

-Pardonne moi, chérie. Je m'en veux de t'avoir causé du tort. Je t'aime Miv. Je te veux dans ma vie. S'il te plaît, pense à nous, pense à notre famille.

Ces mots arrivèrent à mon cerveau comme un coup de fouet. Je ferme les yeux pour empêcher aux larmes de couler. Hors de question d'attirer le regard curieux Haïtien sur moi.

-Au fait, je te prends en exemple. Et je vais penser à moi. Rien qu'à moi..

-Je n'étais pas moi-même, Miv. Tu me connais.

-Moi aussi, je ne suis que l'ombre de moi-même en ce temps. Encore une raison pour ne penser qu'à moi.

Sans aucune autre forme de convenance, je raccrochai. Je ne pouvais plus l'écouter avec ses mêmes excuses. J'en ai assez.. Je veux que cela s'arrête, que cette douleur cesse. Mais chaque jour, je me lève en espérant une fin qui j'ai l'impression n'est pas pour sitôt... Comment oublier les coups provenant de celui qu'on aime? Comment effacer tout ce que j'ai ressentie avec lui ses 6 dernières années?

Les blessures finissent toutes par guérir, mais cela prend du temps.. Il me faut encore beaucoup de temps.

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