9. Je fais connaissance avec mes petits camarades

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Le soleil se levait sur la forteresse rouge. Ses timides rayons éclairaient d'une lumière pâle la forêt enneigée, faisant étinceler les moindres cristaux de glace prisonniers des hautes ramures.

  C'est fou comme j'ai l'âme d'un poète, parfois…

  C'est nettement moins poétique de dire qu'il devait être six heures du matin et qu'au lieu de dormir comme un bienheureux, je me faisais réveiller par cette fichue lumière qui traversait ces fichus rideaux même pas capables de l'arrêter. Ils ne connaissaient pas les volets dans ce pays ?

  Avec un soupir de résignation, je compris qu'il était impossible de me rendormir. Une fois n'est pas coutume, je restai allongé dans mon lit, fixant le plafond. Je n'avais ni ma console, ni mon ordinateur. Que voulez-vous que je fasse dans ces conditions ? Si au moins j’avais mon portable… Oh, mais j'avais mon portable.

  Je me précipitai vers ma valise qu’on m’avait apportée pendant la soirée, et l'ouvris en faisant tomber quelques paires de chaussettes au passage. Celles-ci me rappelèrent ma mère, et j'eus du mal à imaginer que moins de vingt-quatre heures plus tôt, j'étais encore à la maison. L'émotion fut passagère. J'en avais un peu assez d'être le petit dernier, et j'étais content de pouvoir enfin prouver ce que je valais. Même si c'était en fabriquant des cadeaux sous les ordres d'un lutin maniaque. Et si j'avais enfin trouvé ma voie ?

Hm...

  Je mis enfin la main sur ce que je recherchais : mon portable. Dans l'immédiat ce n'était déjà pas si mal. Cependant, je ne pus m'empêcher de laisser échapper une exclamation déçue. Pas de réseau, ni de Wi-Fi. Évidemment. Ce serait trop facile. Mais qu'est-ce que je faisais dans ce coin perdu ?

  Lentement, traînant des pieds, je retournai à mon lit dans lequel je m'affalai, la face contre les draps. Réveil moisi, journée pourrie. Voilà qui caractérisait à merveille mon état d'esprit.

  Je me tournai pour me mettre sur le dos, et détaillai ma chambre. Une petite fenêtre donnait sur la forêt, encadrée par des rideaux (rouges, vous vous attendiez à quoi?), un lit bien sûr, une armoire dans laquelle j'étais censé suspendre mes vêtements (ce genre de besogne peut bien attendre quelques semaines, non?), un bureau (quelle blague !) et la porte qui mènait au couloir de l'internat. Le tout ne devait pas faire plus de dix mètres carrés. Je notai la présence d'une horloge, qui indiquait six heures trente. Au moins, ils comptaient le temps normalement dans ce château fort. C'était déjà ça.

  Bon. Puisque j'avais du temps devant moi, autant commencer mon installation tout de suite. Pour la deuxième fois, je me traînai jusqu’à ma valise, de laquelle j'extirpai un échantillon de mes posters préférés. Mais je n'eus pas le temps de les fixer au mur, comme j'en avais l'intention, car on frappa à ma porte. Si tôt le matin ?

  J'ouvris la porte un peu brusquement, peut-être, car la jeune fille qui se trouvait derrière recula d'un pas. Ou peut-être était-ce devant mon apparence au réveil. Cheveux hirsutes, pyjama froissé et expression profondément débile. Je vous laisse imaginer le tableau.

  — Euh... bonjour.

  C'était la jeune fille aux cheveux et aux yeux verts.

  — Je venais pour te prévenir qu'on est tous les dix dans le salon pour faire connaissance et comme tu n'étais pas encore là on s'est dit qu'il valait mieux venir te chercher même si on risquait de te réveiller car ce serait dommage que tu rates ça alors il m'ont envoyée pour te chercher mais si ça te déranges tu peux encore dormir.

  Wahou. Elle avait tout prononcé d'un seul souffle. Je ne savais même pas que c'était possible de parler aussi longtemps sans respirer.

  La fille dut prendre mon expression ahurie pour un refus car elle recula encore d'un pas.

Le mage rouge. Le roman de l'Apô-ny, tome 1 (histoire terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant