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Tout d'abord, il lui sembla que c'était un rêve. Un beau rêve à travers lequel il flottait, dans un océan de couleurs mouvantes. Un si beau rêve qu'il ne voulait pas le quitter.

Non! Veux pas! Veux pas!

Il lui sembla qu'on tentait de force de le faire émerger de ce songe si reposant. Soudain, ne voix se mit à hurler dans sa tête. C'était une voix de femme, aiguë et suppliante. Pendant un instant, il lui sembla qu'il reconnaissait cette voix. Ce timbre, cette intonation. Mais elle s'éloigna subitement, tout comme son rêve s'effaçait peu à peu, remplacés par une douleur fulgurante et autrement plus réelle. Il se rendit compte que c'était son corps qui hurlait de douleur. Tous ses muscles, toutes ses veines, toutes ses articulations protestaient en chœur. Il émergeait peu à peu, dans le monde horrifiant de la réalité. Le brouillard qui recouvrait ses yeux se dispersa et il papillonna des paupières. Ses repères chamboulés, il mit quelques minutes à se rendre compte de l'endroit où il se trouvait. Et pendant un instant de doute intense, il crut que son rêve n'avait jamais cessé. Tout était blanc. Les murs, la porte, les meubles, le cadre de la fenêtre, la télévision, le lit. Les coussins sous sa tête, les couvertures sur son corps. Sa robe de chambre légère imprimée aux couleurs de l'hôpital. Car il était évident qu'il était à l'hôpital. Quel autre lieu serait uniformément blanc comme cet endroit?

Un mal de tête intense le saisit et il se plia en deux pour vomir. Un frisson le secoua. C'était comme si son estomac faisait des saltos dans son ventre. J'ai peur...

Soudain, la porte claqua et un tourbillon brun entra dans son champ de vision. Des bras l'enlacèrent et le serrèrent promptement.

«Jimin! Tu es vivant! Je n'y croyais plus!»

Jimin ouvrit de grands yeux en entendant le jeune homme sangloter. Il ne lui rendit pas son étreinte. Il tentait de comprendre ce qu'il se passait et pourquoi il se trouvait là. Derrière le garçon brun se tenaient cinq autres individus qui le fixaient avec inquiétude. Chacun arborait une coupe et une couleur de cheveux différente : noir, bleu électrique, rouge sang, blanc et châtain clair. Mais ils avaient relativement le même style vestimentaire et tout en eux respirait la sympathie.

Celui aux mèches noires s'approcha et agrippa les draps blancs de ses doigts, anxieux. Sur son visage transparaissaient toutes ses émotions dans une tempête intérieure violente.

«Comment vas-tu, Jimin? demanda-t-il d'une petite voix.

-Mal, évidement, répliqua le jeune homme aux cheveux bleus. Il vient de se réveiller d'un coma de trois mois.

-En effet, je suppose qu'il ne doit pas être très frais.» ajouta un autre aux mèches rouges avec un sourire hésitant.

Jimin les observa tour à tour. L'amitié qui enveloppait leur paroles comme une couverture de compassion le rassurait. Il n'était plus seul dans ce monde trop vaste. Il était entouré. Simplement... il y avait un hic.

Le jeune homme brun leva la tête vers lui, les bras toujours passés autour de ses épaules. Puis il approcha son visage de celui de Jimin en fermant les paupières. Paniqué, le blond le repoussa avec force. Un feu intérieur lui brûlait la gorge, une seconde conscience au dessus de la sienne lui criait qu'il avait tort.

Ses yeux écarquillés virent les réactions abasourdies des personnes rassemblées dans la pièce sans vraiment les voir. Ses oreilles entendirent les sons étranglés qui provenaient de leurs lèvres entre-ouvertes dans une expression de surprise sans vraiment les entendre. Son esprit était ailleurs, concentré sur leurs visages.

«Mais... Jimin...»

Cette fois, il n'y tint plus. Un son étranglé sortit de sa gorge et il repoussa la main qui s'approchait de ses cheveux pour les caresser. Moi pas un chien!

(Mais qui es-tu?)

Il se jeta hors du lit, arrachant les perfusions plantées dans ses bras. Aussitôt, une alarme stridente retentit dans tout l'hôpital. Désorienté, apeuré, Jimin courut jusqu'à la porte en bousculant les garçons aux cheveux multicolores postés devant. Ceux-ci ne bougèrent pas lorsqu'il tourna la poignée. Ils ne le pourchassèrent pas lorsqu'il bondit dans le couloir comme un fauve enragé. Seul le jeune homme brun émit un hurlement étranglé. Et pour cause : les bras et les jambes de Jimin suintaient des ruisseaux de sang. Une douleur fulgurante remonta de la colonne vertébrale du blond, mais il ne s'arrêta pas de courir pour autant. À chaque pièce, chaque couloir qu'il traversait, des gens essayaient de l'attraper, de le coincer d'une manière ou d'une autre. Mais d'une manière ou d'une autre, Jimin les évitait, alors qu'un voile sombre tombait peu à peu sur ses yeux...

«Jimin!!»

Celui-ci se retourna. À la tête des Blouses-Blanches qui tentaient de le rattraper, il y avait le jeune homme brun. Étrangement, le cœur de Jimin se mit à battre encore plus fort et, dans son inattention, il faillit se prendre une porte. Il l'ouvrit et se précipita à l'intérieur d'un petit cagibi. Des balais et des seaux en équilibre sur des étagères lui tombèrent dessus et il se jeta dans ce fouillis ménager. Après quelques secondes interminables, le jeune homme brun déboula à son tour dans la petite pièce et s'immobilisa. Son regard survola l'amas d'objets et Jimin se mit à sangloter sans pouvoir s'en empêcher, trahissant sa position. L'autre s'approcha doucement, les mains levées, avec un sourire encourageant. Jimin hurla et protégea son visage de ses bras. Des gouttelettes écarlates éclaboussèrent le visage du jeune homme. Derrière lui, des dizaines de Blouses-Blanches se pressaient en chuchotant. Une peur vieille comme le monde s'empara des tripes de Jimin qui hurla de plus belle.

«Jimin, c'est moi, dit le garçon brun d'une voix suppliante malgré son sourire. C'est moi. Sors de là...»

Le blond se roula en boule contre le mur en sanglotant, couvert de sang des pieds à la tête. Une crampe s'était réveillée dans son estomac, l'obligeant à se tenir le ventre à deux mains. Ses yeux se couvraient peu à peu d'un filtre noir et opaque. Tremblant, il ancra son regard voilé dans celui du jeune homme.

«Qui tu es...?» murmura-t-il.

Avant de perdre connaissance.



FIN

ՏᎪᏙᎬ ᎷᎬ 1 ʲⁱᵏᵒᵒᵏOù les histoires vivent. Découvrez maintenant