Le depart

566 39 2
                                    

2014
J'ai 24 ans.
Kayla, venait d'avoir 7 ans, quand elle allait rentrer en classe de CE1.

Elle venait de passer le week-end chez Yacine et Anna. Entretemps, ils avaient reçu un deuxième enfant, une fille prénommée Inaya.

Wassim et Inaya sont forts attachés à Kayla, leur grande sœur.

Wassim et Inaya sont forts attachés à Kayla, leur grande sœur

Oups ! Cette image n'est pas conforme à nos directives de contenu. Afin de continuer la publication, veuillez la retirer ou mettre en ligne une autre image.

(Kayla et Wassim son frère sur la photo)

Avant d'aller chez son père, Kayla m'avait appelée pour que j'aille la chercher un après-midi pour passer du temps avec elle. Je peux vous dire que, jusqu'à aujourd'hui, j'ai regretté de lui avoir dit non.😔

Le 28.08.2014

La date que je n'oublierai jamais. Le lendemain de mon anniversaire. Aux alentours de 15 heures, mon téléphone sonne :

-Kayla: « Allo Tati, ça va ?»

-Moi: « Ça va Al hamdu lillah ! Et toi mon bébé ?»

-Kayla: « Ça va Al hamdu lillah ! Je t'appelle pour te dire que maman et moi, on est en Turquie en direction de la Syrie. Maman dit qu'on ne se verra peut être plus.... »

Dit elle avec une voix émue.

-Moi: « Mais non ! Qu'est-ce tu racontes ? C'est impossible ça ! Tu sais très bien que je ne te laisserai jamais... Passe moi ta mère ! »

-Kayla : «Elle veut pas te parler. Elle pleure.... Je dois te laisser tatie. Maman dit que tu ne dois pas t'inquiéter pour nous. On te donne des nouvelles très vite !! »

Ah ce moment-là, c'est toute la terre qui s'écroule sur moi ! Évidemment, on était en 2014 et personne ne savait encore ce que c'est "Daesh".
Le califa El-Baghdadi ne s'était pas encore « auto proclamer ».
Mais moi j'habitais la Meinau.
Et j'avais déjà entendu que 4 gars de la Meinau étaient partis faire soi-disant de l'aide humanitaire en Syrie, deux sont morts et deux sont en prison.
J'avais aussi plusieurs copines kurdes qui revendiquaient sur les réseaux une appartenance à un groupe de combattants kurdes, aussi en Syrie.
Du coup, j'étais vraiment dans le flou total. J'entendais que plusieurs personnes de Strasbourg partaient pour se rendre en Syrie mais je ne connaissais pas leurs objectifs : est-ce que c'était bien ou mal ?
Une chose était sûre, c'était la guerre là-bas.
Et ça me rendais folle de savoir Kayla au milieu de ces bombardements.
Du coup, après cet appel, je fonce directe chez Myriam.

-Moi: « Myriam, c'est quoi ces histoires ? Pourquoi Bina elle part en Syrie ? »

-Myriam: « Ah bon! Moi, elle m'a dit qu'elle partait en Algérie. C'est Anissa qui l'a déposée à l'aéroport »

Anissa nous rejoint chez Mimi.

-Moi: « Anissa qu'est ce qui s'est passé ? Pourquoi tu l'a déposée là bas ? Fallait pas ! »

-Anissa: « Je te promets Leila, je savais pas. Elle m'a dit de pas t'en parler pour des raisons personnelles, elle m'a demandée de la déposer à l'aéroport pour partir en Algérie sois-disant ce marié. Je l'es crue moi, je me suis dit c'est ton ex belle sœur c'est entre vous, c'est elle qui voulait "te l'annoncer " »

C'est donc Anissa qui les a vues pour la dernière fois. Évidemment, ses excuses était parfaite, elle ne se doutait de rien. Bina était comme d'habitude, elle ne laissait rien paraître.

J'appelle Yacine, mon frère, pour le tenir au courant. Pour lui aussi, la nouvelle lui froid dans le dos.

Comment vous décrire Yacine ? Très grand, brun au yeux marron et sensible. Il a manqué énormément d'amour. Il a la nya dans son cœur. Il ne voit pas la méchanceté de ce monde. Kayla avait 1 an et demi quand elle a vu son père pour la première fois. Comme il était en prison, et qu'au début, il n'acceptait pas trop, il était devenu fou d'elle quand il l'a vue ! Elle avait le même portrait que lui. C'était étonnant la ressemblance.
Depuis, il faisait en sorte de l'avoir les week-ends et pendant les vacances.
Naturellement, c'est Anna qui habille, coiffe et s'occupe de Kayla quand elle est chez eux mais Yacine l'aime à la folie comme il aime tout ses enfants d'ailleurs.

Yacine, quand je lui ai dit, il s'est effondré.
Lui aussi avait des connaissances qui s'étaient rendues là- bas, en Syrie. Mais, comme moi, il ignorait pourquoi. Quand les gens parlent de ça à Strasbourg, ils ajoutent tous : « c'est des sectes ».

Pour moi, les sectes c'était dans la campagne, des gens qui restaient confinés entre eux, avec un gourou qui leur parle de je ne sais trop quoi, comme dans les films à la télé.

Bina, pour moi, c'était impossible qu'elle se fasse endoctriner par qui que ce soit. Elle a beaucoup trop de caractère, ses propres idées... Je ne l'ai jamais vue se faire influencer.

Du rire aux larmes Où les histoires vivent. Découvrez maintenant