Jour 5
Thème : Rêve
Mots : 968
Ship : Murphy x Raven
Avertissements :
Du fluff cette fois ! Mais mentions de violences quand-même...
Spoil saison 2, 3, 4 de The 100
Dès que le premier cri résonna dans la section silencieuse de la station spatiale, John Murphy s'arracha au sommeil, s'éjecta de sa couchette, et se rua dans la coursive. Une réaction dépouillée du moindre affolement, exécutée avec la diligence de l'habitude.
Il entra en trombe dans la cabine voisine à la sienne, où Raven Reyes se débattait contre ses démons nocturnes. Plaçant un genou sur son matelas, il la saisit à bras le corps au milieu de ses hurlements pour l'immobiliser, et la maintint fermement contre lui malgré ses ruades.
- Raven ! Raven, c'est bon. C'est bon, tout va bien. T'es en sécurité, tout va bien. Tout va bien.
La même manœuvre se répétait ainsi depuis des mois. Trois ans et demi sur les restes en orbite de l'Arche, et la mécanicienne était toujours la proie de crises de panique nocturne.
Rien de bien surprenant. Elle avait beau être une battante dotée d'une résilience inouïe, Raven avait subi des traumatismes physiques et émotionnels qu'un individu ordinaire ne pourrait endurer sans y perdre la raison.
- Shhh. Shhh. Tu es dans l'espace, Raven, la berça-t-il, le menton contre son crâne. Plus rien peut t'atteindre, c'est bon.
La jeune femme tremblait et suffoquait contre lui, sa respiration un sifflet saccadé entre ses dents serrées, sa peau brûlante couverte de sueur, les joues inondées de larmes intarissables.
On l'avait lacéré, perforé, drainé de sa moelle épinière. On l'avait criblé de décharge électrique. On lui avait déboîté les os, choqué le crâne, ouvert les veines pour la laisser se vider de son sang. Son cerveau avait été endommagé. Son cœur avait failli lâcher.
Secouée de hoquets, Raven cessa de gémir et de s'époumoner, rendue muette par le choc. Son pouls battait à un rythme paniqué, des spasmes défensifs l'agitaient.
- Voilà, c'est ça, c'est fini. Tout est fini. Pense aux sorties dans l'espace. Tu y es. Tu flottes. T'es une astronaute.
La mécanicienne toujours enveloppée dans son étreinte, Murphy poursuivait sa litanie, devenue si coutumière, tout en lui frottant le dos, le bras, flattant ses cheveux, murmurant contre son front, contre ses tempes moites.
Elle avait perdu tous ceux qui lui étaient proches.
Finn.
Sinclair.
Wick.
Elle avait été abandonnée, trahie, sacrifiée. Encore et encore.
Elle n'avait pas plutôt touché le bonheur du doigt que celui-ci tombait en poussière à son contact.
Et pourtant, elle était l'une des rares d'entre eux à avoir conservé son humanité intact. À continuer à aller de l'avant, à se battre, quoi qu'il arrive, quitte à boiter parce qu'elle ne pouvait plus courir, quitte à ramper parce qu'elle ne pouvait plus boiter.
Alors, quand elle s'enlisait dans les reviviscences des horreurs qu'elle avait traversé, Murphy venait l'en tirer. Chaque fois depuis des mois.
Parce que la longue de série de tortures qui ponctuaient la vie de la mécanicienne depuis qu'elle avait posé le pied sur terre n'avait commencé avec personne d'autre que lui. Celui qui lui avait tiré une balle dans les reins. Le responsable de sa claudication.
Lentement, Raven se détendit entre ses bras. Cependant il ne la lâcha pas temps que son souffle ne s'était pas apaisé, temps que son rythme cardiaque n'était pas redescendu. Il attendit qu'elle fut complètement revenue à elle.
Murphy se laissa aller en arrière, appuyant ses omoplates contre la paroi d'acier, la jeune femme serrée contre son torse. Toute notion de pudeur s'étant émoussée depuis longtemps sous l'effet de leur séjour prolongé en orbite, ni l'un ni l'autre ne se souciait du fait qu'elle ne portait qu'un shorty et un débardeur. Il dégagea néanmoins la couverture de sous leurs jambes afin de l'en couvrir, pour ne pas que la conjugaison de sa sueur et de la sécheresse de l'air recyclé ne refroidissent trop son organisme.
- C'est pas les cauchemars le pire, lâcha soudain la mécanicienne.
Sa voix était rauque d'avoir crié à s'en rompre les cordes vocales, mais lucide, dénuée d'effroi. Pouce traçant des cercles réconfortant sur son épaule, Murphy salua la fin de sa crise d'un ironique :
- Alléluia, elle a atterrit !
Ignorant la boutade, Raven reprit :
- Le pire c'est les rêves.
- Ah, nan. En fait elle plane encore un peu.
- La ferme, Murphy.
Le délinquant roula des yeux, plus amusé qu'offensé par la semonce, mais cessa tout de même ses moqueries.
- Pourquoi est-ce que les rêves sont pires que les cauchemars ? Interrogea-t-il avec un soupir résigné.
- Parce que, répondit doucement Raven, la joue contre son tee-shirt. Je rêve que rien de tout ça n'est réel. Qu'ils ne sont jamais partis. Qu'on ne m'a jamais... brisée.
Quelque-chose se contracta douloureusement dans la poitrine de Murphy. Son pouce s'immobilisa sur l'épaule de la jeune femme. Remarquant sa réaction, celle-ci releva la tête vers lui. Ses yeux sombres, si pleins de force et de vulnérabilité à la fois, captèrent les siens. Ses lèvres charnues s'ourlèrent d'un infime sourire.
- Mais il y a une chose qui est meilleure dans cette réalité-là. Une raison qui me donne moins l'impression de me crasher au réveil.
- C'est bon, Raven, l'interrompit-il. T'as pas besoin d'essayer de me faire sentir moins responsable.
Elle fronça les sourcils en une moue fâchée qu'il lui connaissait tellement bien, et qu'il trouvait chaque fois irrésistible. Puis, elle lui attrapa la main sans prévenir, et la guida sous la couverture dans un froissement de tissu, pour l'amener sur sa hanche, sous son débardeur. Il voulut résister, mais elle lui colla la paume contre sa peau, de sorte qu'il ne pouvait que sentir la petite boursouflure de sa cicatrice.
- Ça je regrette pas, Murphy, affirma-t-elle en lui adressant un regard ferme. Je te l'ai déjà dit. T'es pas responsable.
De sa main libre, il écarta les lourds cheveux bruns qui encadraient son visage basané.
- Et toi t'es pas brisée, Raven, répliqua-t-il.
Comme les yeux de la mécanicienne s'embuèrent de nouveau, il résolut d'épargner sa fierté, et enfouit son nez dans sa chevelure pour embrasser son front, lui permettant ainsi de laisser discrètement couler ses larmes.
VOUS LISEZ
𝐋𝐚 𝐧𝐞𝐢𝐠𝐞 𝐚𝐩𝐫è𝐬 𝐥𝐚 𝐫𝐚𝐠𝐞 | ʀᴇᴄᴇᴜɪʟ ᴅ'ᴏꜱ
FanfictionTous fandoms, tous genres, tous ships confondus. - Illustration de couverture réalisée par la talentueuse @-Borealis