Chapitre 9

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LOS ANGELES - STUDIOS SPIELMAN
13h45.

- Vingt mille dollars ? je répète, abasourdie.
- Considère ça comme une prime, Samantha. Et en plus de ça, les prochains singles feront un carton. Ta notoriété montera en flèche, m'explique encore mon père.

Je considère le contrat posé devant moi, sur la table de réunion en marbre. Blake est déjà prêt à signer le sien, après avoir essayé de me convaincre pendant près d'une heure.

- C'est seulement pour deux mois Sam, c'est rien. Et ce sera un coup de pub parfait pour nous tous ! On est amis, souviens-toi. Il n'y a rien qui pourrait mal se passer, me dit mon ami en me souriant.

Son entrain m'apaise un petit peu. D'après lui, il faut voir ça comme un jeu, et non une contrainte. Après tout : il s'agit seulement de faire semblant devant les photographes. Et puis, avec vingt mille dollars, je pourrais enfin m'acheter une voiture.

- Evidemment, ça ne supprime pas la clause sur ton contrat de travail qui stipule que les relations entre les membres des studios sont interdites. Les vraies relations, je veux dire, ajoute mon père.

Je garde un court moment de réflexion avant d'attraper le stylo qu'il me tend. Mais je ne signe pas tout de suite.

- Et si j'étais cataloguée comme "la manager qui sort avec ses artistes" dans tout le pays après ça ? je demande soudain.
- Tu as fait du très bon travail depuis que tu es ici, et tout le monde le voit. D'ailleurs, John Stevens de l'agence "Music and us" m'a beaucoup parlé de toi. Il est jaloux de ne pas avoir de Samantha dans son équipe, évidemment. Alors ne t'en fais pas pour ça. Et puis, personne ne sait que nous avons un contrat anti-relations chez nous, alors personne ne te blâmera.

Blake me regarde, toujours en souriant, tandis que mon père regarde sa montre. Nous sommes samedi, il doit probablement avoir quelque chose de prévu avec des gens super riches qui n'ont pas l'habitude de patienter.

Je reprends le stylo et décide de signer la pile de feuille devant moi, en priant intérieurement pour que tout se passe bien pendant ces deux prochains mois.

***

LOS ANGELES - VILLA DE ASHER HEMMINGS
19h06.

     Après être allée prendre quelques affaires chez moi, Brandon est venu me chercher pour m'amener directement chez Asher. Quand j'arrive devant l'entrée, pleins de souvenirs me montent déjà à la tête. Des bons comme des mauvais.

Debout sous le porche, je n'ai pas le temps d'hésiter que la porte d'entrée s'ouvre déjà. Asher me regarde, les sourcils froncés. Ses traits sont toujours aussi tirés que depuis qu'il a quitté mon appartement ce matin. Après lui avoir énoncé la proposition de mon père, il n'a plus vraiment parlé et à très vite écourté sa visite.

- Salut, je dis en ne le quittant pas des yeux.
- Entre.

Sa mâchoire est crispée, je sais qu'il contient quelque chose qui pourrait exploser à tout moment. J'entre alors en silence, m'imprégnant de l'odeur familière de l'endroit.

- Je pose mes affaires dans la chambre d'amis ? je demande en faisant rouler ma valise jusqu'à l'escalier.
- Je vais le faire, me répond t-il soudain en attrapant mon bagage.

Je le suis des yeux jusqu'à ce qu'il disparaisse de ma vue, perplexe. Froid, mais attentionné. Deux mots qui se contredisent et qui pourtant résument parfaitement Asher à cet instant.

Pourquoi suis-je étonnée ?

Je pars en direction de la cuisine pour me servir un verre d'eau, histoire de ne pas rester plantée dans le salon sans rien faire. Alors que j'ouvre les placards un à un pour trouver la vaisselle, je fais une découverte qui m'interpelle : derrière l'une des portes sous l'évier se trouvent une bonne dizaines de bouteilles, certaines presque vides, certaines a moitié entamées. Mais aucune d'entre elles ne sont pleines. Whisky, vodka, tequila.. il y en a pour tous les goûts. J'empoigne alors le Jack Daniel's et l'inspecte, comme si c'était l'objet d'un crime.

- Qu'est-ce que tu fais ?

La voix d'Asher me fait sursauter et la bouteille m'échappe des doigts pour venir s'écraser au sol. Elle se brise en un millier de petits morceaux, et le liquide ambré essaye déjà de traverser le tissu de mes chaussures. Je regarde Asher, me préparant déjà à affronter la tornade qui va s'abattre sur moi. Mais à mon plus grand étonnement, il ne dit rien. Il ne bouge même pas d'un centimètre.

- Je suis désolée ! je m'exclame en commençant à rassembler les débris.

Il s'approche de moi et ferme la porte du placard, avant de me faire signe de ne rien toucher.

- C'est pas grave. Il n'y a rien pour toi dans ce placard, demande moi la prochaine fois que tu chercheras quelque chose. Je vais appeler la femme de ménage.

Son ton est assez froid mais maîtrisé, et je sens qu'il cherche à éviter la confrontation.

- Asher, si tu veux aller mieux, il va falloir que tu te débarrasse de tout cet alcool.
- Je ne vais pas boire, Samantha.
- C'est pourtant ce que tu as fait à peu près tous les jours jusqu'à présent.
- Je te l'ai dit, je veux changer.
- Alors, pourquoi est-ce que tu veux vraiment garder tout ça ? Je ne peux pas me permettre de perdre mon temps avec toi cette fois. J'ai déjà assez à faire avec le boulot, et puis ce nouveau contrat qui va..

Je ne finis pas ma phrase, consciente que j'en ai déjà trop dit. Asher s'approche encore un peu plus de moi, assez pour sentir la douce odeur d'après-rasage émanant de son visage. Mon corps réagit au quart de tour et j'ai l'impression que je dérive. J'en arrive même à me demander si les nuages au paradis sentent la même chose, quand il fixe son regard au mien, l'air sérieux :

- Un nouveau contrat ? Tu as accepté celui de ton père ?
- Non.. Je n'ai pas encore décidé, je mens.
- Et est-ce que tu compte l'accepter ?
- Je n'en sais rien, Asher ! Mais si il le faut, et bien je le ferais !

Il détourne le regard et passe sa main dans ses cheveux. Quelque chose ne va pas, je le sais. Il est touché. Mon cœur me crie littéralement de le prendre dans mes bras et de lui dire que je préférerais mille fois être avec lui plutôt qu'avec Blake. Mais je ne peux pas. Et je l'ai déjà prévenu ce matin : je viens en tant que manager, et rien d'autre.

Il se détourne et se dirige vers le salon. Il prend rageusement sa guitare posée contre le mur, et s'assois sur le canapé en grattant quelques cordes. Au moins, il fait beaucoup d'efforts pour ne pas exploser, je dois bien l'admettre.

J'attends quelques minutes pour le laisser respirer puis je décide de le rejoindre en m'installant sur un des fauteuils.

- La chanson à enregistrer avance bien ? je le questionne.
- Tu veux dire la merde qu'à écrit Blake ? Je ne jouerais pas ça. C'est hors de question.
- Pourquoi ? Elle est pourtant..
- Elle est merdique. Ouais. Exactement.
- Si elle ne te convient pas, pourquoi est-ce que tu n'as pas proposé une des tiennes ?

Il ne me répond pas et continue à triturer son instrument. Je comprends alors qu'il ne me donnera pas de réponse pour l'instant, alors je laisse tomber.

Je le regarde jouer un moment, bien consciente des frissons qui me parcourent le corps. Je reste ainsi à l'écouter pendant plusieurs minutes, jusqu'à ce que je m'assoupisse, et que je finisse même par m'endormir complètement.






*

BACKSTAGES WITH YOU, T2 - ÂMES ACCORDÉES Où les histoires vivent. Découvrez maintenant