Chapitre 15

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LOS ANGELES - VILLA DE ASHER HEMMINGS
21h00.

Toutes mes affaires se trouvant chez Asher, je n'ai pas eu d'autre choix que de revenir. Je me sens vraiment stupide, et je sais qu'il va se faire un plaisir de me pointer du doigt. J'en arrive presque à espérer, un tout petit peu, que Brandon n'ai pas bien fait son travail et que le leader des Wavers soit sorti ce soir. Mais quand j'aperçois la Ferrari en remontant l'allée, je me rend à l'évidence : il va forcément falloir que je l'affronte à un moment où un autre.

Je monte les quelques marches du perron et entre dans la villa. L'entrée et bizarrement très calme, et je m'aperçois quand je m'avance dans le couloir que tout à l'air en ordre dans le salon. Je dépose alors ma veste sur le porte-manteau et me dirige vers la cuisine, pour constater que la bouteille que j'ai arrachée à Asher tout à l'heure est toujours au même endroit que lorsque je l'ai posée, et que le liquide a l'intérieur n'a pas diminué.

Je regarde autour de moi, je fais le tour de la pièce plusieurs fois, mais je n'entends toujours rien. Je n'ai pas envie d'aller à l'étage, de peur de le croiser. Je ne suis pas encore prête, et ce petit moment de répit est plutôt bien venu. J'ai le cœur gros ce soir, bien plus que je ne l'aurais pensé, et ça ne m'étais pas arrivée depuis bien longtemps.

- Aller, juste un verre, ça ne peut pas me faire de mal, je murmure pour moi-même.

Je m'approche de la bouteille et me sers un premier verre, que je bois cul-sec. Puis un deuxième, que je garde à la main. Le but n'étant pas d'être complètement bourrée, mais seulement d'apaiser mes émotions.
Le dos contre le frigo, je me laisse glisser le long de la paroi pour me retrouver assise par terre. Je bois petit à petit, gorgée par gorgée, pendant plusieurs longues minutes. Ma conscience est partie si loin que lorsque j'aperçois une silhouette appuyée contre le bar de la cuisine, je ne réagis même pas. Asher s'approche lentement de moi, les bras croisés sur sa poitrine, me dominant de toute sa hauteur. Curieusement, il n'a pas l'air en colère. Et j'ai encore plus honte qu'il me voit perdre le contrôle ainsi alors qu'il apprend encore à garder le sien.

- Qu'est-ce que tu fais ici ? me demande t-il simplement.

J'hésite à lui répondre. En réalité, j'aimerais juste me rendre à l'aéroport sans un mot de plus. Mais Asher a se pouvoir sur moi qui me fait toujours me pousser dans mes retranchements.

- J'apprends de mes erreurs, je lui réponds avec un niveau sonore a peine audible.

Il pousse un long soupir et vient s'asseoir devant moi, contre le plan de travail. Les cheveux en bataille, des cernes sous les yeux, je m'aperçois qu'il est encore plus beau que quand il est tiré à quatre épingles. Et ça aussi ça m'énerve, parce que ça fait battre mon cœur à mille à l'heure. Alors que je ne lui ai jamais rien demandé.

- Tu avais raison, je lui dis.

Un boule grosse comme un ballon s'est formée dans ma gorge et je ne peux retenir la petite vibration dans ma voix.

- Tu n'es pas un menteur, je suis désolée. J'aurais du t'écouter, j'en serais pas là à boire sur le sol de ta cuisine alors que je me bats avec toi pour pas que tu le fasses. Je suis vraiment nulle, hein ? Je comprends pourquoi tu bois finalement, et tu as peut-être raison en fait. D'ailleurs, pourquoi tu n'as pas bu, toi ? C'est pas moi qu'on ramasse à la petite cuillère d'habitude, c'est toujours moi qui aide les autres. D'ailleurs, je devrais peut-être arrêter. Ouais, c'est ça. Je vais tout arrêter et repartir chez ma mère et..
- Arrête ça. Premièrement, je n'ai pas bu parce que j'avais envie d'avoir toute ma tête pour pouvoir composer. Et quand je te vois la, je me dis que j'ai bien fait. C'est quoi ton but ? Tu veux devenir une loque comme moi ou quoi ? Reprends toi. C'est toi qui me sauve Sam, on inverse pas les rôles.

Une larme roule toute seule sur ma joue. Depuis quand est-ce que mes émotions se montrent en plein jour ?

- J'ai peur qu'en venant ici, j'ai fait une bêtise. Rien ne va depuis que je suis arrivée.
- Mais si tu étais restée à Miami, peut-être qu'il se serait passé autre chose et tu aurais regretté de ne pas être venue ici.

Je réfléchis un instant à sa remarque, mais la nostalgie m'emporte encore plus quand je pense à ce que j'étais avant. A ma force de caractère, ce mur que j'avais réussi à construire autour de mon cœur, le courage dont je faisais preuve..

- Venir ici ne m'a rien apporté de positif.
- Ah ouais ? Pourtant tu en a fait des choses. Tu nous a aidé, avec le groupe, tu as décroché le métier de tes rêves en très peu de temps.. et tu as rencontré ton meilleur ami, si je ne me trompe pas ? Et puis, tu as été là à chaque fois que j'ai déconné. Et ça je peux te dire que c'est un exploit.

Quelques souvenirs de nos moments passés avec Luke me traversent l'esprit et me remontent un petit peu le moral. C'est vrai que je n'ai connu d'ami comme çà nulle part ailleurs, et je ne l'en remercierais jamais assez.

- On peut vivre avec des regrets, crois-moi. On peut même en effacer certains, si on s'en donne les moyens, recommence t-il. Quel a été ton plus grand regret depuis que tu es ici ?
- C'est débile, vraiment.
- Allez, dis le moi.
- Ne pas t'avoir vu jouer Not Ready sur scène en est un, je répond très vite. Je ne sais pas si c'est le plus gros, mais c'est celui au quel je pense le plus souvent.

Il me regarde sans rien dire pendant plusieurs secondes, et je crains de lui avoir fait peur. Mais il se lève au bout d'un moment et me tend la main pour me relever.

- Viens, me dit-il en m'emmenant près du piano.

Nous nous asseyons sur le banc et, après quelques longues respirations, il se lance. Les premières notes résonnent autant dans la pièce que dans ma cage thoracique, et lorsqu'il commence à chanter, mes mains viennent toutes seules l'accompagner sur les touches de l'instrument, comme s'ils avaient toujours été faits pour ça. L'instant est tellement beau, tellement magique, que si je devais choisir un seul moment de ma vie pour le vivre en boucle pendant un millénaire, je choisirais celui là.

A la fin de la chanson, je suis à bout de souffle, je n'avais même pas remarqué que j'avais chanté avec lui sur les derniers refrains. Nous laissons la fin des notes s'atténuer dans la pièce sans un mot, malgré les sanglots qui redoublent en moi et qui débordent de mes yeux.

- Je n'ai même jamais regardé une seule vidéo de votre tournée, je murmure. J'avais tellement peur de ne rien ressentir à travers l'écran.. je voulais garder ce souvenir intact, de toutes ces heures que l'ont a passé à faire ces arrangements.
- C'est ma préférée, me répond t-il en se tournant vers moi. Pour les mêmes raisons.

J'essaie de me ressaisir en respirant doucement, mais mes doigts tremblent encore sur le bois du piano.

- Demande moi quel est mon plus grand regret, me lance t-il tout à coup.

Je ne comprends pas bien pourquoi il me dit cela, mais je m'exécute quand même.

- Asher, quel est ton plus grand regret ?

Ses pouces viennent essuyer mes joues humides, attirant mon visage assez près du sien pour que je sente son souffle se mêler au mien.

- C'est qu'on ne soit pas ensemble, alors qu'on sait tout les deux que ça devrait être le cas, chochote t-il en déposant un baiser sur mon front.

Nous restons ainsi un moment, jusqu'à ce qu'Asher décide de se relever. Il me prend la main sans même me poser de question et me conduit à l'étage, puis dans sa chambre, où nous nous écroulons sur le lit. Ma tête dans le creux de son épaule, ses bras autour de moi, j'ai l'impression d'être intouchable. Parce qu'à cet instant précis, je sais que rien ni personne ne pourra venir changer les sentiments que j'ai pour Asher Hemmings.

*

BACKSTAGES WITH YOU, T2 - ÂMES ACCORDÉES Où les histoires vivent. Découvrez maintenant