Chapitre 9- [Enfance de porcelaine]

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J'entrevois qu'il se lève, il part au comptoir et je regarde la fenêtre pour essuyer mes yeux. Je suis toute pâle. La pluie et le vent frappent sur la vitre.

- Viens, je vais te raccompagner.

Je me lève et le suis. Quand la porte s'ouvre le vent frais me surgit dessus. Il fait froid, la pluie est glacée et inonde mes vêtements. J'accompagne Mr. Segfrid et arrive devant sa voiture. Je ne connais pas les voitures, ça ne m'intéresse pas mais la sienne est très élégante. Il m'ouvre la portière passager et ferme derrière moi. Il entre, j'attache ma ceinture et il se frotte les mains pour se réchauffer dans la voiture. Ses cheveux blonds sont trempés et retombe sur son front.

- Tu veux qu'on en parle ?

Il s'attache et démarre la voiture. Il allume le chauffage. L'air chaud sèche mes larmes et réchauffe mes mains.

- Je peux comprendre la raison qui t'empêche de parler à ta marraine mais si tu as besoin de te libérer je suis là.

- Ça a commencé quand j'ai eu 6 ans. Chaque soir, après l'école, mon père venait me chercher. Ma mère travaillait tard le soir et elle n'était pas souvent là. Je la voyais le matin et le midi. Mais un soir mon père n'a pas suivi le chemin de la maison. Il faisait nuit, c'était pendant un hiver... Il m'a dit de rentrer dans cette grange. Il y avait plein de peluche, des jouets incroyables et un petit lapin... C'était une surprise pour noël. Chaque soir on s'y rendait et il jouait avec moi, j'avais même appelé le lapin Gabin, mon amoureux de la petite école. Puis il y a eu ce jour. Il avait été viré pour avoir fréquenté une collègue et l'avoir harcelée. J'ai compris avec le temps. Mais je savais que c'était mal. Il était en colère contre tout son entourage et a détruit la grange. Il a balancé le lapin contre le mur. Il a arraché les peluches et... Quand il n'y avait plus rien à casser... C'est moi qu'il a...

Mes mains tremble, mon corps est prêt de me quitter. Mon professeur reste calme et silencieux à côté de moi.

- Il m'a regardé droit dans les yeux avec le plus mauvais des regards. Jamais personne ne m'avait fait aussi peur... Ses grosses mains étaient autour de mon cou et je ne me rappelle même plus le nombre de fois où je l'ai supplié d'arrêter... Je ne sentais plus mon corps, je ne pouvais plus respirer, je voyais flou, mon cœur se battait. Je me suis évanouît juste après et quand je me suis réveillée, j'étais dans mon lit. Ma mère hurlait et j'entendais du verre éclater depuis ma chambre. Il a menacé ma mère de la tuer si elle en parlait. Je ne suis pas aller à l'école pendant 3 mois et pendant ce temps je n'ai jamais parlé. Mon père est parti avec cette autre femme après et il nous a abandonné. Ma mère s'est suicidée car elle savait qu'il n'aurait pas ma garde. Elle avait déjà tout prévu...

Je regarde mes mains, blanches et froides. Mes larmes me brûlent mais elles me font le plus grand des biens. J'ai encore tout en tête mais c'est moins douloureux. Je soupire et relève la tête pour regarder mon psy du jour. A ma grande surprise il se détache et me prend dans ses bras. Il pleure et me caresse la tête pour me calmer.

- Avait-il fait d'autre chose ? Aussi violente ?

- Il a... Essayé de me... Il...

Là je ne peux pas. C'est trop. C'est trop.

- Il t'a fait quoi ? Axelle, montre-moi si c'est plus facile ! Je ne vais rien te reprocher je te le promets ! Tu peux me toucher, tu peux me frapper ! Je ne dirais jamais rien à personne.

Mes yeux croisent les siens, ils m'appellent et veulent me sauver. Je me détache et monte sur ses genoux. C'est étrange que ce soit mon prof mais c'est plus facile. Je ne dis rien et prend ses poignets. Je dévoile les miens cachés par mes manches et lui montre. Mes cicatrices de mes scarifications. Il me regarde et cache mes poignets. J'enlève alors ma veste et lève mon t-shirt. Je lui fais passer la main sur mon tatouage et il l'a retire aussitôt.

- Ça vient de quoi ?

- Brûlures.

Je baisse mon t-shirt. Je remets ma veste et je ne suis pas convaincue de ce qui va suivre. Je vais vraiment le faire ?

- Il t'a fait des choses physiques ?

J'ai posé mon majeur sur mes lèvres puis sur les siennes. Simuler un baiser n'a jamais été aussi douloureux. Il prend ma main et me reprend dans ses bras. Je m'étale contre lui et toutes mes peines sont soulevées, certes pas toutes mais celle de tout garder pour moi. Je me sens lourde à chaque minute qui passe. Et je me laisse somnoler dans les bras de mon sauveur.

J'entends la voix de ma marraine, elle est douce, comme toujours, mais paraît inquiète.

-Je suis désolée... Ça doit être son père... Il est venu hier sans autorisation...

-Ce n'est rien. Ou est sa chambre ?

Tout n'est pas très nette mais je me dirige vers ma chambre, puis j'arrive dans mon lit. Ses bras me lâchent et je m'étale dans mon lit. La couverture me réchauffe vite.

C r y  B a b yOù les histoires vivent. Découvrez maintenant