HIDDEN [RÉÉCRITURE EN COURS]

Chapitre 30

La plupart des événements qui marquent nos esprits partent tous de quelque chose de petit. La musique nait d'une vibration. Un film voit le jour qu'à partir d'une simple idée. Un tsunami qui détruit tout sur son passage ne part que d'une simple vague. Une tempête n'est au départ que du vent, un souffle. Tandis qu'une guerre ne peut partir que d'une simple question. En l'occurrence, dans la cuisine où je me trouve, je pense qu'une nouvelle guerre est sur le point d'exploser.

Cela fait une bonne trentaine de minutes que je me bats pour que Sam daigne me répondre. J'ai tout essayé. D'abord, j'ai tenté la méthode du gros relou qui la colle à chacun de ses gestes puis la méthode du commis de cuisine mais après avoir failli foutre le feu à la cuisine en faisant brûler le chocolat, j'ai préféré abandonner cette idée. Il me reste que la carte du parleur relou. Pour attirer son attention, je suis prêt à poser toute sorte de questions. Plus futiles les unes que les autres mais qui, je sais, finiront par l'ennuyer ou l'amuser. C'est quitte ou double.

— Ô, grande Sam, tu as besoin d'autres choses ? De sucre ? De lait ? De la levure ?, demandé-je, assis sur un des tabourets de bar.

Ma petite flamme relève la tête vers moi. Son visage est strié par des traces de farine de part et d'autres de ses joues. De petites vagues se forment entre ses sourcils alors qu'elle les fronce en me regardant. Son agacement se lit dans son regard. Je vois bien qu'elle se retient de ne pas m'envoyer chier simplement parce que ma sœur et ma mère sont dans la pièce.

— Du beurre, finit-elle par me répondre. Il me faut du beurre, s'il te plait.

Mes sourcils se haussent d'étonnement alors que ma bouche forma un « o » de stupeur.

D'un bond, je saute de ma chaise pour me remettre sur mes deux jambes.

— Beurre salé ? Doux ? Fondu ? Mou ?, m'empressé-je de demander en me dirigeant vers le frigo.

Debout devant le frigo ouvert, je sens une tête passer par-dessus mon épaule.

— À quoi tu joues, sérieux ?, me demande ma soeur.

Lucy parle assez pour que je l'entende mais assez bas pour que les autres personnes présentes dans la pièce ne puissent pas nous entendre.

Faisant mine de chercher dans le frigo, je lui réponds sur le même ton :

— De quoi « je joue à quoi » ?

— Tu te fou de moi ? Tu n'as pas l'impression d'être le plus gros relou de la terre depuis tout à l'heure ?

— Hein ? Quoi ? Arrête, je suis vexé. Je vais lâcher une petite larme, dis-je sarcastiquement. J'en ai rien à foutre d'être relou. Je veux qu'elle arrête de m'ignorer.

Ma soeur fait un pas sur le côté pour se placer à côté de moi, les bras croisés.

— Un peu comme ce que tu as fait pendant des semaines, non ?