Chapitre 5 : "T'es-tu décidée à progresser ?"

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Chapitre 5 : « T'es-tu décidée à progresser ? »

Les flammes brillèrent dans son regard espiègle. Elle sentit la chaleur caresser son visage. Les mèches embrasées firent danser les ombres dans ses cheveux d'or qu'elle rejeta en arrière d'un geste de la main. Ainsi s'achevait sa vie de petite fille. Bientôt, la fumée grise et blanche emporterait ce qui restait de son innocence. Elle ne serait plus futile et naïve. Elle renaîtrait dans un nouveau corps. Ce serait le début d'une nouvelle vie. Enfin elle pourrait mettre à profit son intelligence bien plus développée que la normale. Adieu l'ingénuité, adieu l'exubérance, adieu l'enfance. Elle ferma les yeux et sentit son cœur battre la chamade. L'odeur légère de la cire brûlée monta à ses narines. Avant que l'horloge ne sonne la dernière heure, elle se concentra sur son vœu le plus cher. Un petit pli se forma entre ses sourcils froncés. Puis, elle prit une profonde inspiration. S'appuyant de tout son poids sur la table, les bras tendus, elle se pencha en avant et souffla les bougies de son gâteau d'anniversaire. La pendule du salon sonna quinze heures. Un large sourire illumina le visage de la petite blonde. Elle était enfin une adolescente ! Sa mère la serra dans ses bras et lui offrit son cadeau. La demoiselle hésita un instant sur l'attitude à adopter. La modération n'avait jamais été son truc. Alors tant pis ! Elle déchira fougueusement le papier brillant et laissa éclater sa joie par un cri strident.

- C'est exactement ce que je voulais ! s'exclama-t-elle.

- Nous nous en sommes doutés quand tu nous en a parlé pour la centième fois cette semaine, se moqua son frère aîné.

Elle le frappa du poing avant de le serrer dans ses bras de toute sa force de fillette. Bizarre. Elle se serait crue plus costaude que ça.

- Merci ! Merci ! répéta-t-elle cependant, le visage enfoui dans le pull de son frère.

Mais dans le ciel bleu azur, le tonnerre retentit soudain. L'enfant tressaillit. Ses pupilles se rétractèrent. Et tout se brouilla.

- Tu es de retour.

La sorcière revint à elle.

- Qu'est-ce qu'il s'est passé ? demanda-t-elle à son mentor.

- Tu viens d'avoir une vision.

Oshun hocha la tête. Elle posa la main sur sa poitrine haletante. Enfin. Enfin... Cela faisait des semaines que l'Androgyne tentait de lui transmettre les lois du sixième sens. Rêves, visions, prémonitions... Le monde de l'avenir et de l'inconscient n'était pas un mystère pour son mentor. Mais l'esprit d'Oshun résistait. Elle était effrayée à l'idée de voir des choses qu'elle ne devrait pas, de devoir se consacrer à son apprentissage quitte à laisser tous ces pauvres gens qu'elle verrait se noyer dans le désespoir. Elle tentait de rationnaliser. De toute façon, elle ne savait pas comment les aider ni comment les trouver. L'Androgyne lui répétait que cette compétence était sacrée et qu'il fallait qu'elle écoute ce que le monde avait à lui dire. Mais au lieu de la sermonner, son mentor aurait mieux fait de lui apprendre à contrôler ces visions le cas échéant. Car cette fois, cela avait marché. Et la sorcière était plus ébranlée qu'elle ne l'avait jamais été. Elle avait été prise de court.

Oshun tituba. Son maître la soutint. Il balaya l'horizon du regard. De ses yeux sombres, il dissuada le paysage de s'émouvoir. L'océan s'anima de nouveau. Les nuages grondèrent.

- Viens, ordonna le mentor en attirant Oshun vers un rocher.

La sorcière n'opposa aucune résistance et s'assit.

- Était-ce si terrible ? l'interrogea l'autre.

Oshun repassa les images dans sa tête. Le ciel bleu, l'herbe verte et les rayons dorés du soleil. Les rires de l'enfant courant dans le jardin fleuri. L'air chaud et frais du printemps.

OSHUNOù les histoires vivent. Découvrez maintenant