Le lendemain, Alya fut tirée du sommeil par le son peu agréable du réveil. Il était aux alentours de sept heures moins vingt, l'heure pour prier Fajr (la première prière de la journée).
Imrân se leva, puis resta un temps assis sur le lit, dos à la jeune femme, les coudes appuyés contre ses cuisses, les mains droit vers le mur et les doigts entremêlés. Il semblait vouloir reprendre ses esprits et se débarrasser d'un brouillard de faux-sommeil qui embrumait sa raison. Il passa ses mains sur son visage, laissant échapper un soupir inaudible. Il était épuisé, après tout c'était à peine s'il avait fermé l'œil de la nuit.
Alya n'était pas en bien meilleur état elle non plus. Elle avait les yeux enflés de sommeil, les traits du visage un peu confus. Elle errait entre la réalité et l'imaginaire du rêve. Allongée, faisant face au plafond, les yeux à demi-clos, elle avait un léger mal de tête qui cognait doucement contre les parois de son crâne, des coups suivant un certain leitmotiv. Elle voulait s'étirer, mais son corps endormi ne répondait de rien. Les yeux voilés, elle suivit du regard Imrân qui se levait enfin sur ses longues jambes.
Il se rendit en premier lieu à son armoire et en dégagea une serviette et un change de elle-ne-sut-voir-quoi. Alya maintenait toujours sur lui son profond regard à l'aspect vitreux.
Quand il se retourna vers elle pour lui faire part d'une chose, Alya se leva d'un coup par pudeur et ramena sur elle leur couette. Seulement, dans son brusque mouvement, le voile enroulé en comme un turban qui retenait jusque-là faiblement ses cheveux demeura étendu sur l'oreiller. Elle arborait un visage bien trop ensommeillé, comme si elle se trouvait entre la frontière du conscient et de l'inconscient, pour comprendre ce qu'il en était. Imrân, plus par habitude que par surprise, détourna le regard, toutefois cela ne suffisait pas à faire disparaître de son esprit la première apparence de sa femme sans voile. À remarquer que ce n'était pas sous le meilleur jour qu'Alya se fit voir de son mari.
— Je vais prendre une douche, tu peux dormir encore un peu si tu veux.
Alya acquiesça sans vraiment trop comprendre, mais ce qui fut certain c'est que dès qu'il quittât la chambre, elle se laissa tomber rudement contre l'oreiller. Elle ne s'était pas rendu compte qu'elle n'avait plus de voile sur la tête. Elle s'endormit aussitôt en récupérant à la volée quelques minutes réparatrices de sommeil.
Au bout d'un temps court mais raisonnable, le jeune homme revint dans la chambre. D'une main sur la poignet de la porte, de l'autre occupée à étancher ses cheveux mouillés d'une petite serviette en coton, il contempla sa femme le visage paisible entre les draps défaits. Si de prime abord il avait détourné le regard en un temps record si bien qu'il en demeurât à l'esprit que quelques bribes d'une image puzzlée s'étant dissipée peu à peu sous une eau tiède, il la fixa, là, un moment sans se soustraire à la vue qui s'offrait à lui, silencieux.
Il était surpris, mais rien ne laissa trahir sur son visage ce sentiment. Il ne s'attendait pas à la voir sans voile de si tôt, et encore moins voir ses cheveux. Il s'était préparé psychologiquement soit à la voir sans cheveu, soit très peu dû à sa maladie, or, elle était là, allongée et entourée d'une auréole sombre cachant partiellement des bouts de son visage. Et même si ses cheveux n'avaient pas de leur consistance originelle, ils demeurèrent d'une longueur remarquable, d'une épaisseur acceptable et d'un soyeux accentué par la lumière tamisée d'une lampe. Elle avait l'air apaisée de loin. Il ne souhaitait pas la réveiller. Il s'avança un peu plus près du lit laissant la porte légèrement entrebâillée, et put déceler un peu plus de son expression faciale. Elle n'avait plus les sourcils froncés, ni le pli de la bouche raidie. Il se détourna d'elle jugeant l'avoir trop dévisagée, et se sentit coupable comme quelqu'un qui épiait en cachette alors qu'il ne s'agissait là que de son épouse qu'il contemplait.
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From Dunya to Jannah
RomanceAlya, âgée de tout juste vingt ans, est une jeune femme douce et aimable. Elle a grandi au sein d'une famille musulmane et pratiquante ; son père est à la fois imam et directeur de la mosquée dans la ville où ils vivent, et elle, elle y travaille à...