chapitre 22

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"Et si, l'espace d'un instant, on oubliait les autres"

Castiel n'arrivait pas à déterminer la période exacte où il avait cessé de rire comme il le faisait actuellement. Elle semblait tellement lointaine, cette période insouciante et sans prise de tête.

Pourtant, depuis plus d'une heure, il était reposé, heureux, comblé et il commençait même à avoir quelques douleurs au zygomatique, le muscle de ses joues, à force d'autant rire. Ce qui n'était absolument pas pour lui déplaire.

"Gabriel et son côté protecteur-emmerdeur ! T'étais pas comme ça quand je t'ai connu !" se mit à dire Dean alors qu'il reprenait l'économe des mains de Gabriel pour continuer à peler les pommes de terre.

"Tu veux dire notre rencontre ? Quand tu m'as collé contre le mur pour admirer ma dentition de ta langue ? J'vois pas pourquoi j'aurais dit ou fait autre chose que d'y répondre."

Castiel se racla la gorge, mal à l'aise d'être à l'écoute de ce genre de choses. Il connaissait cette histoire depuis bien longtemps mais, à présent, il ressentait autre chose que de l'indifférence. De la jalousie ? Le besoin que Dean le rassure ? Lui dise que c'était simplement à cause de l'alcool ? Il ne comprenait pas pourquoi Gabriel rabâchait de nouveau cet événement. Il y avait prescription depuis, non ?

"C'était avant ça."

"Avant quoi ?"

Dean leva ses iris pour les poser sur Castiel, presque innocemment, mais ce dernier comprit le message et cela lui donna, de suite, l'envie de le remercier par un bisou. Dean le mettait en confiance avec ses paroles et Castiel n'aurait pas pu rêver mieux.

"Avant que Dean ne tombe amoureux de ton frère." continua Sam en haussant ses épaules avec nonchalance, comme si cette affirmation n'était qu'un faible détail dans la conversation.

"Avant que-quoi ?" hurla presque Gabriel en frappant ses paumes sur le plan de travail entièrement envahi d'épluchures.

Castiel, trop concentré sur les pupilles émeraude de Dean, ne prêta aucunement attention à l'échange autour de la table. Il sentait le pied de son fantasme lui caresser tendrement le mollet et il essayait simplement de se retenir de rougir pour ne pas attirer l'attention sur lui. Dean semblait également ne pas écouter les paroles des autres, il ne cessait pas de se mordre la lèvre en déviant son regard vers les lèvres de Castiel.

Ils étaient dans leur bulle. Tout simplement. Comme deux adolescents qui prennent lentement conscience de l'attraction entre eux.

Pourtant, un coup sec se répercuta sur le bras de Castiel qui en sursauta, brisant le merveilleux moment entre les deux hommes, et ce dernier porta son attention sur son aîné.

"Qu'y-a-t'il ?"

"Sam vient de balancer une bombe et y'a que moi qui réagit ?"

"Qu'est-ce que t'as dit, Sammy ?" demanda Dean en reprenant ses mouvements autour de la pomme de terre.

"Euh… Rien, rien…"

Castiel plissa les sourcils en voyant les joues de Sam devenir un peu plus écarlates au fil des secondes.

"T'essayes de faire quoi en fait, Dean-o ? Foutre Cassie dans ton pieu et le bazarder ensuite ? Lui faire croire que t'as réellement des sentiments pour lui ?"

Castiel leva les yeux au ciel avant d'abandonner le couteau sur la planche à découper et il se retourna vers son frère, un peu énervé que la discussion prenne une telle tournure.

"Gabriel ! Ce qu'il se passe ne te concerne en rien, je suis assez grand pour me faire ma propre opinion et-"

"Et si j'avais vraiment des sentiments pour lui, qu'est-ce que ça t'ferait ? Tu vas faire quoi ?"

Castiel entrouvrit la bouche avant de la refermer. Pourquoi est-ce que la conversation semblait mal partie pour lui gâcher sa première vraie heure de bonheur depuis longtemps ? Et puis, c'était quoi le problème de son frère à la fin ?

Mais, avant qu'il n'ouvre la bouche pour répliquer, les mots de Dean se déchiffrèrent lentement dans son esprit et il réalisa enfin. Est-ce que Dean sous-entendait qu'il avait réellement des sentiments pour lui ? De là à le traduire comme de l'amour, peut-être pas mais…

"Tu as des sentim… Pour moi ?"

"Pourquoi t'as l'air si surpris que ça, Cas ? C'est pas étonnant, si ?"

Castiel bégaya quelques mots, n'en comprenant pas lui-même leur sens.

"Pas étonnant ? Mec, tu t'es tapé presque tous les étudiants du bahut ! Alors, excuse-moi de douter, hein !"

"C'est à toi que je m'adresse ?" grogna Dean en fusillant Gabriel du regard.

Castiel ne savait plus comment réagir. Il était à la fois heureux, parce que Dean avouait clairement qu'il l'appréciait comme lui l'appréciait, mais il était aussi un peu angoissé, parce que, pour une fois, il comprenait parfaitement les accusations de son frère.

"Je… je ne sais pas, Dean. Je veux dire… qu'ai-je de différents des autres ? Enfin, comment veux-tu que j'arrive à te croire alors que tu ne me prêtes pas vraiment attention au lycée, que tu ne me dis rien ? Je ne savais même pas pour toi et Lisa ! Et puis, ce n'est pas parce que tu m'embrasses que je vais en comprendre la signification. Tu as embrassé beaucoup de monde alors-"

"T'es sérieux, là ?" fit-il dans un râle, son économe tombant sur le sol de la cuisine.

"Dean…" commença Sam en posant sa paume sur l'épaule de son aîné. "Essaye d'écouter ce qu'il a à-"

Un grognement se répercuta dans l'air alors que Dean se redressait entièrement de sa chaise, les traits de son visage se crispant. Castiel fut surpris de cette attitude, qu'avait-il dit de déplacé ? Il ne démontrait que les faits, non ?

"Je me suis mis des potes à dos pour te défendre ! Je me suis ramassé un pain dans la gueule pour toi ! J'ai du mettre une dérouillée à Dick pour qu'il arrête ses conneries ! J'ai du me retrouver chez le proviseur avec un prof pour que Métatron cesse de tenir le journal du bahut ! Et j'ai pas fini quand je vois ce que Lisa souhaite te faire ! J'ai du faire des putains de deal avec mon équipe pour qu'ils arrêtent de lâcher leurs nerfs sur toi ! Tu crois que je l'aurais fait si c'était pas le cas ? Tu crois que j'aurais supplié Benny pour qu'il m'aide si je ressentais rien pour toi ?"

Castiel n'avait pas pu se concentrer sur toutes les informations que venait de sortir Dean parce qu'il avait plus hurlé que parlé.

"Mais je ne savais pas tout ça ! Pourquoi n'es-tu pas venu m'en parler ?"

"Pour te dire quoi ? Putain, Cas, ça ne fait que quelques mois qu'on se connaît ! Je savais même pas pourquoi je faisais tout ça avant que je le réalise jeudi en te voyant ! Tu crois que moi j'ai pas souffert en me rendant compte de la réputation que les autres te donnaient ? De la façon qu'ils avaient de te voir ? Tu crois que ça a été simple pour moi de me retourner contre mes potes ?"

Il reprit son souffle, sa peau reprenant un peu de couleur, et il ramassa l'outil de cuisine pour le déposer sur le plan de travail.

"Viens, Sam. On rentre."

Si Castiel avait pu reprendre ses esprits à temps, il aurait pu le rattraper et lui dire qu'il comprenait, qu'il lui faisait confiance, qu'il l'aimait, mais il n'y arriva pas et prit conscience de son départ bien trop tard.

(Castiel)Un amour incroyable Où les histoires vivent. Découvrez maintenant