"Tu es ce que tu es"
Castiel se demandait souvent s'il possédait bien certains gènes de cet homme. Qu'avait-il en commun ? Le cadet des Novak n'avait pas son nez, ni ses cheveux, ni sa couleur, ni sa peau, ni son regard et il avait encore moins le même caractère qu'Emmanuel.
Cela faisait bien une vingtaine de minutes qu'il l'écoutait parler, à croire que son père aimait entendre le son de sa propre voix, sans que Castiel ne parvienne à dire un seul mot.
Autrefois, dans un passé peut-être pas si lointain que ça, le jeune Novak aurait simplement acquiescé à ses paroles et se serait écrasé lamentablement face à lui, plus par dépit que par peur.
Aujourd'hui, ce n'était plus le cas, et même si Castiel le laissait parler, il n'avait pas pour but de s'excuser ou de lui donner raison. Il avait agi ainsi parce que son père ne lui en avait pas laissé le choix.
C'était cet homme le coupable. Pas Castiel. Il ne l'était plus.
"Alors, désormais, si tu te décides à faire ta forte tête et à me désobéir, tu vas vraiment rencontrer mon mauvais côté et tu sais que je ne le veux pas. Toi non plus." termina le monologue du père Novak.
La maîtresse de maison, jusque-là aussi effacée que les autres jours, s'avança légèrement dans la pièce pour déposer sa paume sur l'épaule de Castiel, gentiment installé sur l'un des divans du salon.
"Je n'accepterai pas que tu le frappes comme tu l'as fait, Manu." fit la voix doucereuse derrière lui.
"Dois-je te rappeler ce qui m'a poussé à le faire ?"
"Je suis homosexuel, Papa. Homosexuel ! Est-ce une raison pour me frapper ? Est-ce si terrible pour toi de voir ton enfant heureux dans les bras de la personne qu'il aime ? Si tu n'es pas fier de ce que tu as engendré alors pars ! Retourne en Chine ! Ferme les yeux sur ce que je suis !"
Castiel ne resta pas plus longtemps concentré sur la mine éberlué de son père, sans doute choqué qu'il lui tienne tête, et il continua sur sa lancée, bien trop désireux d'évacuer toute son incompréhension face à ce père.
"Je ne t'ai pas demandé de rester près de nous, je ne t'ai pas non plus demandé ton avis sur mes relations amoureuses et je n'accepterai plus que tu le fasses. Je suis ainsi et je resterai ainsi. Je ne changerai pas pour toi et si tu n'es pas prêt à l'accepter, je pars."
"Tu partirais où ? Te réfugier à nouveau derrière le petit cul de ton petit-ami ?" fit Emmanuel, dédaigneusement.
"Petit-ami que tu appréciais beaucoup, il me semble, non ?"
Jeu de regards entre eux, Castiel ne flancha pas. Il l'avait assez fait auparavant. Il n'était plus le même et il se devait de le montrer à Emmanuel.
"Il est aussi malade que toi." gronda-t-il finalement en détournant les yeux.
"Parce que tu penses qu'aimer les hommes est une maladie ? Tu n'as aucune ouverture d'esprit, père, et je trouve ça malheureux."
Le père de famille fusilla Castiel du regard sans rien émettre et cela était un peu comme une première victoire.
Gabriel crut bon d'apparaître à cet instant et Castiel lui en fut reconnaissant. Il savait que malgré leur différent, Gab' était avec lui, qu'il était autant contre leur père que lui.
Il s'installa rapidement au côté de Castiel tout en l'observant et se permit de lui faire un léger sourire pour le pousser à continuer.
Oui, Castiel était vraiment heureux de l'avoir près de lui.
"Je suis venu, ici, pour te dire que je n'accepterai pas que tu lèves à nouveau la main sur moi. Je suis venu pour mettre les choses au clair avec toi. J'aimerais revenir mais si tu penses ne pas pouvoir vivre avec moi alors je partirais pour de bon."
"Manu, s'il-te-plaît, je veux que-"
"Je sais ce que tu veux, Amy." coupa Emmanuel en reportant rapidement son attention sur son fils. "Tu serais prêt à faire souffrir ta mère ? Tu crois qu'elle supporterait ton départ ?"
"Je ne suis pas le seul à prendre cette décision, ce sera ta faute Emmanuel. Pas la mienne."
"Qui es-tu, Castiel ? Je ne vois plus le fils que j'ai engendré !"
A cet instant, le jeune Novak eut envie de gifler son propre père. Comment pouvait-il penser le connaître, lui qui foulait le sol de la maison quinze jours par an ? Comment pouvait-il seulement le juger alors qu'il n'a jamais fait parti de sa vie ?
"Comment oses-tu dire ça ? Tu n'as jamais été là pour mes anniversaires, pour ceux de Gaby, pour nos fêtes en famille ! Comment peux-tu prétendre me connaître ?" hurla-t-il en se levant, foudroyant son géniteur.
"Je suis celui qui t'a nourri, qui t'a donné un toit où dormir, qui t'a habillé, celui qui te permet de faire des études et cela a un prix, Castiel ! Tu n'as aucun droit de jugement !"
"Mais toi, oui ? Tu as le droit de juger mes préférences sexuelles ?"
"Cette conversation ne rime à rien. Va dans ta chambre !"
"Je ne suis plus un bambin, Papa, et je n'ai plus aucune envie de rentrer dans tes cases !" soupira Castiel en contournant le canapé pour attraper son sac sagement positionné à l'entrée du salon. "Je suis désolé maman, j'aurais souhaité que cela s'arrange."
Il ne jeta pas un seul regard vers Amélia et se contenta de soulever son sac, ses yeux rivés dessus. Pourtant, il sentit une légère pression se poser sur son épaule, l'arrêtant dans ses mouvements, et il tourna le visage pour apercevoir les yeux de sa mère luire d'une détermination nouvelle.
"Depuis que tu es là, je perds Castiel et Gabriel reste enfermé dans sa chambre ou sort sans même m'en parler. Je ne te laisserai pas m'enlever mes fils, Emmanuel."
Un silence se répercuta dans la salle durant de longues secondes. Castiel avait du mal à reprendre conscience, ses pensées restaient centrées sur les mots dits par sa mère. Était-elle prête à voir partir leur père ? A le sortir de chez eux ?
"Si tu ne veux pas faire l'effort d'aimer tes fils pour ce qu'ils sont alors je te demanderai de partir."
Castiel vit Gabriel se lever lentement, son corps tourné vers leur père, et s'approcha de ce dernier avec douceur. Ce dernier qui semblait ne pas parvenir à refermer sa bouche, incrédule.
"Et juste pour info, Papa, je suis bisexuel." ricana Gabriel en lui tapotant l'avant-bras.
"Tu ne peux pas…" commença Emmanuel en alternant son regard sur Amélia et Gabriel.
"C'est à toi de prendre la bonne décision, Manu. J'aime mes fils peu importe le choix de vie qu'ils souhaitent, peu importe leurs préférences, et je veux faire partie de la leur. Qu'en est-il pour toi ?"
Castiel était à deux doigts de pleurer mais, au lieu de ça, il se jeta simplement dans les bras de sa mère, heureux qu'elle accepte tel qu'il est.
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(Castiel)Un amour incroyable
Ficção AdolescenteL'invisible et le populaire ? Le banal et l'excellence ? Deux adolescents que tout oppose et pourtant... Le premier amour, le vrai, le beau."