Six heures du matin approchaient à peine mais Lucy en avait assez d'attendre entre ces draps qui n'étaient pas les siens sans parvenir à trouver le sommeil. Elle se sentait poisseuse et si elle avait cru que la nuit précédente avait été mauvaise, celle-ci lui démontrait au contraire qu'elle avait été fabuleuse, en comparaison.
Décidément, rencontrer les Holmes n'avait été ni bon pour sa ligne, ni bénéfique pour son rythme circadien pourtant habituellement bien rodé et à cette cadence, sa santé elle-même finirait par en pâtir. Elle pourrait les remercier, et ses clients n'auraient qu'à faire de même pour l'humeur massacrante qu'elle aurait à leur offrir toute la journée durant.
Dehors, la nuit était encore épaisse mais Lucy n'avait plus la patience de rester entre ces quatre murs. Si elle se débrouillait bien, elle aurait le temps de repasser chez elle, de se prendre une bonne douche et d'enfiler des vêtements propres avant d'entamer sa journée. Et si elle était véritablement efficace, peut-être pourrait-elle-même s'offrir une micro sieste avant d'aller montrer sa tête de déterrée au travail – elle entendait déjà les blagues vaseuses de Dan au sujet de sa nuit prétendument chaude et Lucy se sentait déjà d'humeur à le mordre si de telles bêtises venaient à franchir les lèvres de son collaborateur fétiche, faisant fi de son affection pour lui.
La jeune femme poussa un profond soupir et repoussa enfin ses couvertures. Au pied du lit, l'attendaient sagement ses chaussures couvertes de boue sèche. Elle réenfila son pantalon avant de glisser ses bottines à ses pieds, elle évita habillement son reflet dans le miroir par crainte de sa sale gueule du matin et enclencha la poignée de la porte de la chambre.
Calé dans son canapé, une couverture décharnée remontée jusque sous son nez et laissant à l'air libre ses orteils que Lucy supposait glacés, Holmes ne semblait toujours pas avoir digéré le fait qu'elle ne lui pique son précieux lit pour la nuit. Comme s'il était du genre hypersomniaque, de toutes manières ! A qui voulait-il faire croire cela ? Trop fatiguée et irritée pour trouver à répliquer quoi que ce soit à ce regard assassin, la jeune femme se contenta de souffler d'agacement et de lancer, aussi aimablement que possible, un sincère :
- Bonjour, j'espère que vous avez bien dormi.
- Votre présence n'était pas si indispensable, lui cracha Holmes en guise de salutation. Angel n'a pas fait d'autres cauchemars de la nuit. Je n'hésiterai pas à dire à John combien son analyse a été mauvaise et oubliable, une fois encore, qu'il n'était pas obligé de me forcer à me coltiner votre sale mine au réveil.
Le voilà qui était blessé dans son ego qu'une « imbécile » comme elle – du moins devait-il le penser – ne parvienne mieux à lire au travers de sa nièce adorée que lui, le grand et célèbre Sherlock Holmes. La jeune femme balaya la critique d'un revers de la main ; elle avait déjà eu sa dose d'ego surdimensionné à gérer au cours de sa vie sans avoir besoin que celui de Holmes ne vienne s'ajouter à sa liste. S'il préférait rejeter sur elle son incapacité à saisir toutes les nuances de l'être humain, à comprendre que chaque esprit était une machine bien huilée si semblable au premier abord et si différente lorsqu'on y regardait un peu plus attentivement, grand bien lui fasse.
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𝙳𝚘𝚌𝚝𝚎𝚞𝚛𝚎 𝙴𝚟𝚊𝚗𝚜 : 𝚕𝚎𝚜 𝚖𝚎́𝚊𝚗𝚍𝚛𝚎𝚜 𝚍𝚎 𝚕'𝚎𝚜𝚙𝚛𝚒𝚝
Hayran KurguIl ne faut guère plus que l'assassinat d'un espion britannique à la retraite pour lancer le célèbre duo Watson/Holmes à la poursuite d'une folle enquête de plus. Néanmoins, la coopération avec la seule proche de la victime s'avère un peu plus ardue...