Je jetais un coup d'œil à gauche, puis à droite avant de traverser la route. Je suis sortie la maison sans en aviser personne. Normale puisque la mission que je fais est supposée être secrète. Heureusement que j'ai toujours été distraite et effacée sinon mon secret serait découvert depuis fort longtemps dans ce quartier où les gens aiment tellement parler de ce qui ne les regarde même pas.
Je marche encore un long moment avant de tourner à gauche dans une ruelle sans issue. Je continue jusqu'à une maison où le gardien semble dormir. J'ai déjà fait un repérage des lieux depuis que j'ai su pour ma grossesse. Dès les premiers signes de mon état, j'ai commencé malgré mon jeune âge, à chercher des solutions. La première qui me soit venue à l'esprit était l'avortement mais j'avais deux contraintes majeures : un j'ai été éduquée de manière responsable et la religion a toujours occupée une grande place dans ma vie d'où ma réticence à tuer une vie et la deuxième est que je n'ai pas un franc pour payer le fameux infirmier qui pratique l'avortement dans notre zone d'habitation. D'après mes copines de classe qui ont déjà eu à avoir recours à ses services, il demande beaucoup d'argent. Vous allez me demander avec une telle éducation comment je me suis retrouvée enceinte ? Moi-même je me pose la question. Je n'ai jamais eu à fréquenter les garçons à cause de ma tante qui me mène la vie difficile. Elle a été la deuxième épouse de mon père après ma mère. Dès qu'elle a posé les pieds dans ce qui était une maison paisible, elle a juré à tout le monde que ma mère et moi quitterons la maison. Ma mère qui au paravent était une femme sans histoire est devenue au fil du temps le sujet de discussion de tout le quartier. En effet, elle et ma tante se disputent à longueur de journée et mon père assiste à ces disputes, impuissant. Je sors de mes pensées et avance doucement.
Je dépose délicatement le paquet que j'ai entre les mains près des fleurs de cette immense maison. Je suis déjà venue ici et c'est la raison pour laquelle j'ose espérer que ma fille sera entre de bonnes mains. Je refais le chemin inverse avant que quelqu'un se rende compte de mon absence dans la maison.je m'appelle Oumou Kalsoum Diop et je viens d'avoir 17ans. Mon père s'appelle Aboubacar Diop et ma mère, paix à son âme, s'appelait Maréme Diallo. Je suis en classe de terminale et ma famille et moi vivons à Dakar. Ma tante que je surnomme la dragonne s'appelle Bintou mais on a surnomme Binette. Je suis brillante à l'école et à quelques semaines des examens, me voilà accoucher sans assistance.
Ma mère est décédée lorsque j'ai eu douze ans et depuis lors, je vis l'enfer sur terre dans ce qui devait être mon havre de paix et de joie. Chaque jour, avant d'aller à l'école, je dois me taper tous les travaux de la maison et dés fois, je suis obligée de rester pour soi-disant cuisiner. Heureusement que l'administration de l'école comprend ma situation sinon je serais depuis lors exclue. Il y a des domestiques à la maison, pour être précise, il y en a deux : une femme et un homme qui, lui est chargé de faire les lourdes tâches.
Mon père est respecté dans tout le quartier à cause de sa fortune mais à la maison, c'est ma tante qui fait la loi et le beau temps. Elle a un fils de dix ans et une fille qui vient de fêter ses sept ans. Jamais anniversaire de petite fille n'attiré autant de monde. Avant même le lever du soleil, on sentait à des kilomètres à la ronde qu'il va se passer un important événement dans la maison. Dès que je suis sortie de la chambre que je partage avec Astou la domestique, ma tante m'a carrément fait savoir que je suis indésirable dans sa maison. Ça m'arrange car j'ai un devoir de philosophie et bien que je sois en série scientifique, je veux décrocher une bonne note. J'ai donc quitté la maison pour ne revenir que le soir et j'ai trouvé la maison remplie de monde. La fameuse bande de femmes influentes de ma tante est bien présente. Chacune est parée de ses plus beaux habits et les bijoux ne sont pas en reste. A bien y regarder, on pourrait penser qu'elles ne sont venues que pour étaler la richesse de leurs maris. Leurs enfants aussi sont là. Le traiteur avec ses serveurs s'activent pour satisfaire tout ce monde. Puisque je sais que je suis indésirable à cette fête, je trace mon chemin pour aller me réfugier dans l'aile réservé aux domestiques, là où est ma place. La fête a duré la majeure partie de la nuit et il a fallu que la police intervienne pour que ça s'arrête.