Ethan
Lorsque j'ai vu ces trois badauds s'approcher d'Ariel et de mon meilleur ami, je n'avais qu'une envie : courir pour les aider. Eliakim s'était arrêté, donc nous l'avons rattrapé. Il dit à notre attention, tout en faisant comme s'il parlait à Noé :
-Ne faites rien. Ces mecs vous écrabouilleraient en moins de deux. Et s'ils remontent jusqu'à moi, je ne donne pas cher de ma peau et de celle de ma famille. Désolé, mais depuis l'incident d'hier soir, ils me suspectent déjà d'avoir amené des riches, donc je ne peux pas intervenir. Il ne reste plus qu'à espérer un miracle.
Je voyais bien qu'il n'y croyait pas lui-même. Le plus gros des trois hommes venait de tirer sur le capuchon d'Ariel. Il faisait comme s'ils flirtaient avec elle. J'eus envie de vomir et je détournais le regard. Emma pâle me tira soudain par la manche :
- Regarde ! Il y a un gars qui arrive...le plus baraqué d'entre eux n'a pas l'air d'apprécier son intrusion. Oh ! Ils vont se battre !
À présent, moi aussi, je suivais la scène. Le nouvel arrivant, bien qu'il fasse une tête de moins que son agresseur, remporta la bagarre. Je fus soulagé de voir que les deux autres étaient partis, avec nonchalance et qu'il ne restait que mes amis et le vainqueur. Noé s'exclama :
-Eh ! Mais c'est...
-C'est personne. Personne, le gronda légèrement son frère. Il faut continuer le plan maintenant. Laissez-nous quelques mètres d'avance.
Nous sommes arrivés au métro sans aucun autre problème. Je fus surpris de voir le nombre de gens qui portaient un voile. Le wagon que nous avons pris n'était pas très fréquenté. En même temps, peu de pauvres travaillaient en plein jour dans les quartiers riches. S'ils y allaient, c'était le soir, pour ranger, réparer ou faire le ménage.
Arrivés en ville, nous avons trouvé sans trop de mal des toilettes publiques. Avec soulagement, j'ai enlevé mon voile. Retrouvant les autres, nous avons décidé de nous suivre à distance raisonnable. J'étais avec Micah cette fois. Lui et sa sœur - ainsi que Benjamin et Gamaliel sans doute - étaient déjà venus ici. Pas moi. Ni Ariel. En effet, nous étions tous les deux le nez en l'air, émerveillés, mais aussi apeurés, par la grandeur des lieux. Je regardai alors tout autour de moi. Des buildings de plus de cent étages nous encerclaient. Parfois, j'entrevoyais un bout de ciel, gris et brumeux. Il me semblait que les dirigeants avaient réussi à faire fuir la pollution très haut dans l'atmosphère, mais je sentais pourtant que l'air était lourd et puant. Soudain, je me suis senti mal. J'ai voulu m'arrêter, mais nous avions déjà perdu assez de temps comme ça. Moi qui croyais connaître la ville par le biais de l'école, je me trompais. Le lycée était finalement très excentré.
Enfin, je vis le bus devant nous. Nous sommes montés à l'intérieur. Le chauffeur nous a souri d'un air hypocrite avant de dire, d'une voix qui sonnait faux :
- Bonjour et bienvenue dans mon véhicule.
Je ne l'aimais pas. Je voyais bien qu'il nous léchait les baskets. Sans doute pensait-il que nous étions de riches fils à papa. Derrière nous, un homme plutôt misérable tenait une fillette pâlotte, dans ses bras. Elle avait les yeux rougis et vides. Le conducteur les regarda avec dégoût avant de lâcher :
-Vous ne pouvez pas entrer.
-Mais pourquoi ! s'écria l'homme. Ma fille doit se rendre d'urgence à l'hôpital public ! Je vous en prie !
-Il...il n'y a plus de place !
L'homme perdit patience et s'approcha de l'horrible chauffeur :
-Mais regardez un peu ! Il reste encore des sièges ! C'est parce que je suis pauvre, c'est ça ? Vous allez laisser crever ma fille pour une histoire de frics ? Juste parce que je gagne moins que vous ? Mais c'est du délire !
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12 - Le Chemin
RastgeleSeriez-vous prêt à abandonner vos préjugés pour découvrir votre véritable Ennemi ? L'écart entre les riches et les pauvres est devenu quasiment infranchissable. Dans cette société pourtant, les élites cherchent à garder une sorte d'apparente égalité...