12 - Le Chemin

Chapitre 22

Eliakim 

Après avoir passé pas mal de temps dans ces fichus conduits, j'ai finalement réussi à trouver une sortie dans un couloir vide. C'est grâce à ma mère que j'ai pu être engagé en tant que serveur pour ce gala à la gomme. Il manquait des serveurs, maman avait été choisie pour compléter l'effectif. J'ai sauté sur l'occasion : je me suis proposé à sa place. J'avais obtenu les informations que je voulais, mais je devais rester à mon poste. Je m'étais déjà absenté trop longtemps. Je faisais tout mon possible pour ne pas avoir à croiser les tronches des jeunes snobinards du lycée. Dans le coin que je m'étais attribué, il n'y avait presque que des adultes et c'était tant mieux. Enfin, façon de parler, car en réalité les adultes ne valent pas mieux que leurs rejetons. Ils nous regardaient, de cette façon méprisante qui leur est propre et, à chacun de mes pas, je me sentais humilié. Soudain, je me suis brusquement arrêté. Rachel riait avec Judith. Je ne l'avais jamais vue aussi détendue. Je ne savais pas d'ailleurs qu'elle savait rire autrement que comme une pouf. Une dame s'approcha alors de Rachel. Elles avaient l'air de se disputer. Cela m'était égal. Je repartis faire un tour de salle. Après une demi-heure à servir coupes d'alcool et petits fours, une porte-fenêtre ouverte attira mon attention. Il y avait trois marches qui donnaient sur une petite terrasse. Je sortis et vis que cet endroit semblait être au milieu de cet ancien château. Je contemplai cet énorme bâtiment quand j'entendis une voix derrière moi :

- Garçon ? Apportez-moi un verre !

Je me retournai avant de me figer. Elle lâcha :

-Toi ? Ici ?

-Et ouais Rachel. Moi, ici. Autant te dire que je déteste ce travail presque autant que je déteste mes employeurs et toutes leurs cliques, dis-je avec désinvolture.

-Retourne donc à l'intérieur et fiche-moi la paix. Tu es bien la dernière personne que je veux voir !

Elle tourna vivement la tête, mais je vis le coin de ses yeux briller dans la nuit.

-Tu pleures ? demandais-je, gêné.

-Qu'est-ce que ça peut te foutre ? Moque-toi, vas-y ! Je sais que tu en meurs d'envie !

-Je ne suis pas un bâtard à ce point.

Elle était assise sur une sorte de table de pique-nique de luxe :

-Ah oui ? Ce n'est pas l'image que tu donnes pourtant !

-Et c'est toi qui dis ça...

J'allais partir quand nous entendîmes un bruit sourd que je ne connaissais que trop bien :

- C'était quoi ça ? s'écria Rachel.

Une vitre explosa non loin de nous :

- Planque-toi sous la table !

-Hein ?

-Fais ce que je te dis !

Elle s'exécuta avant de demander :

-Que ce passe-t-il ?

-Ce sont des coups de feu...

-Oh non ! Il faut que j'aille les aider ! Il faut que je mette ma famille à l'abri !

Elle essaya de se relever, mais je la retins par le bras :

-Mauvaise idée mademoiselle Turner !

-Lâche-moi Eliakim !

-Tu sais très bien que si tes parents étaient là, ils insisteraient pour que tu sois à l'abri ! De toute façon, tu ne bougeras pas d'ici.

Elle arrêta de gesticuler, vaincue. Nous étions à genoux. Elle avait peur. Elle était même terrifiée. Son mascara avait commencé à couler. Sans doute en même temps que ses larmes. Elle souffla :