DEAL ?

Chapitre 19

La fin de la journée arrive assez lentement. En même temps c'est bien connu, quand on a hâte de quelque chose, le temps nous séparant de ce quelque chose paraît infini. Une vraie torture...

Marina et moi sortons du lycée toutes les deux. J'ai hâte de voir où elle habite ! Je ne peux m'empêcher de penser au fait que mes parents ne sont même pas au courant de ça. Mais cette pensée de culpabilité est vite chassée quand je me rappelle que je vais très certainement passer un bon moment.

- J'espère que tu as de la monnaie sur toi ? me demande-t-elle quand nous arrivons à son arrêt de bus.

Je hoche la tête positivement. Prévoyante que je suis, j'ai mis l'argent nécessaire à deux tickets de bus dès qu'elle m'a proposé l'invitation. Marina me prévient que son bus passe dans quinze minutes, et nous commençons à parler de nos vies. Je lui explique notamment la situation avec mes parents, mais nous sommes interrompus quand Caleb arrive par derrière et fait peur à Marina, qui hurle. Je ne saurais pas dire ce que je ressens à ce moment-là, mais ça m'a fait quelque chose. Serait-ce de la jalousie ? Non... Enfin, pourquoi elle et pas moi ?

- J'espère que tu te rends compte qu'à cause de toi, je perds une séance de travail, rit Caleb en s'adressant à mon amie.

Contente de savoir que maintenant, il le prend à la rigolade.

- Pauvre chou, répond la rousse en faisant la moue. Dis plutôt que Albane va trop te manquer.

Caleb pouffe de rire, et c'est à ce moment-là que notre bus décide d'arriver. Dommage... J'aurais bien aimé savoir sa réponse, mais c'est raté puisque Marina attrape mon bras et m'entraîne vers le véhicule.

- A demain ! crié-je à Caleb en me laissant tirer.

Ce dernier me sourit et me fait un signe de main avant de s'en aller.

***

Le trajet dure environ dix minutes. Ai-je oublié de mentionner que c'est la première fois de ma vie que je prends le bus ? Certainement. De toute façon, ce n'est pas étonnant. Quand nous sortons du véhicule, Marina trépigne d'impatience. En même temps je peux la comprendre, ce n'est pas à Lucie qu'elle montrerait ses créations...

Nous marchons quelques instants, puis Marina me lâche un "tadam" quand nous nous arrêtons devant chez elle. La maison est assez petite, la peinture beige sur les murs commence à se faire vieille et le jardin n'est pas vraiment entretenu. Pas de fleurs et de plantations comme c'est si joliment fait chez les Northwin. Je n'ai pas l'habitude de ce genre d'habitations. Mais je ne peux pas juger, c'est peut-être très charmant à l'intérieur ! Et puis, il peut y avoir pleins de raisons au manque d'entretien extérieur : le manque d'argent, de temps...

Je suis mon amie qui passe par le petit portillon, traverse le jardin en sortant une clé de sa poche, puis ouvre la porte.

- Bon ce n'est pas très grand, mais bienvenue chez moi ! m'annonce-t-elle quand la porte s'ouvre.

Marina se décale pour me permettre d'entrer en première. Je le fais donc, et je suis ébahie par le nombre de tableaux qui sont accrochés sur les murs du couloir.

- Tous ces tableaux ont étés réalisés par ma mère, m'explique-t-elle quand elle remarque que je regarde partout. Elle est peintre, enfin... Elle l'était à ses heures perdues, aujourd'hui elle n'a plus le temps avec son boulot.

La rouquine me fait une rapide visite du rez-de-chaussée. Il y a effectivement un certain nombre de tableaux dans toutes les pièces, ainsi que de nombreux objets de décorations, mais je trouve cela très chaleureux. Bien plus que ma maison minimaliste avec des tableaux pas très beaux et hors de prix. Elle m'explique qu'à l'étage, il y a sa chambre et celle de ses parents, qui ne sont pas là car ils travaillent. Au vu de la tristesse quand elle me parle d'eux, j'ai l'impression qu'ils ne sont pas très présents pour elle à cause de leur métier.

- Maintenant, je vais te montrer ma pièce préféré ! s'écrie Marina.

Elle ouvre une porte qui révèle des escaliers descendants en colimaçon, devant mener à un sous-sol. Nous y pénétrons et je suis émerveillée en entrant dans ce sous-sol. Le fameux atelier de création de vêtements de Marina. Tissus, croquis, machines à coudres... Tout y est. Je m'approche d'une robe portée par un mannequin. Elle est vraiment magnifique, Marina a un talent fou.

- Tu aimes ? me demande-t-elle, une lueur dans les yeux.

- J'adore Marina, tu es super douée !

Elle me remercie en me souriant chaleureusement. Mon amie me montre ensuite d'autres créations qu'elle a réalisées, et je suis vraiment heureuse de ce moment passé avec elle.

- Dis, Albane... dit Marina en s'asseyant sur un tabouret.

Je fais de même en attendant qu'elle pose sa question.

- Je sais que ça peut te paraître un peu tôt pour demander ça, continue-t-elle, mais Caleb, il te plaît ?

Mon coeur accélère quand elle pose cette question. Comment dire... Autant lui répondre sincèrement.

- Je n'en sais rien, je réponds tout simplement.

- Plus de détails, s'il te plaît ?

J'inspire lentement.

- C'est vrai qu'il est beau, que je pense assez à lui et que j'aime passer du temps à ses côtés, mais... Je ne pense pas vraiment qu'une fille comme moi puisse lui plaire.

Marina soupire :

- Alors déjà, tu vas reprendre confiance, parce que tu sais quoi ? Ca fait peut-être deux semaines qu'on est rentrés en cours, mais je peux t'assurer que tu ne laisses pas Caleb indifférent. Il me parle beaucoup de toi, et puis sa crise de possessivité quand tu m'as parlé !

J'aimerais bien que Marina ait raison... Me dire que je puisse plaire à Caleb, ça me fait ressentir quelque chose que je n'avais jamais ressenti, comme des papillons dans le ventre.

- Tu as de la chance, toi au moins... ajoute-t-elle en soupirant une nouvelle fois.

- Comment ça ?

- Garde-le pour toi, me dit-elle. Ca fait un an que je suis amoureuse de Niels. Et ce con, je n'arrive pas à savoir ce qu'il ressent. J'ai juste l'impression qu'il me considère comme sa meilleure amie.

- Tu devrais foncer, lâché-je. Un an, c'est super long.

Je suis très clairement le type de personne qui donne des conseils que je n'appliquerais jamais.

- Je vais essayer, mais bon... Je ne veux pas briser notre amitié.

- C'est à toi de voir, je lui souris faiblement.

Marina se lève et me prend dans ses bras.

- Je t'adore, toi !

Moi aussi, je t'adore. Quelle joie d'avoir enfin une amie après tout ce temps...