DEAL ?

Chapitre 21

J'arrive devant le fameux immeuble, le coeur battant. Je respire lentement avant de pénétrer à l'intérieur du bâtiment et de me diriger vers l'ascenseur. Je m'arrête quelques instants devant, juste histoire de bien être préparée mentalement à ce qui va suivre.

Pourquoi ai-je si peur de Carter ? C'est simple, depuis qu'il m'a bousculée dans le couloir et aidée à ramasser mes livres, il ne cesse de me fixer. Pas un regard amical, non... Plutôt un regard de psychopathe. Et croyez-moi, je ne pense pas me faire des idées. Je prie pour qu'il y ait du monde chez lui et qu'on ne soit pas seuls tous les deux, car dans ce cas-là, je pourrais bien me faire kidnapper, séquestrer ou encore torturer. Peut-être que Carter se révèle être un énorme psychopathe et que je suis la prochaine victime sur la liste.

Bon, je vais peut-être un peu loin, là. C'est à cause des films que Liam et Caleb m'ont conseillé de voir, aussi...

Trêve de plaisanteries, j'inspire un grand coup et appuie sur le bouton pour appeler l'ascenseur. Les portes s'ouvrent immédiatement, et je rentre à l'intérieur de la cage. Quand il monte, je ne peux m'empêcher de triturer mes mains.

Arrivée devant la porte, j'appuie sur la sonnette. Je peux entendre quelques cris d'enfants derrière la porte, et cela me rassure énormément. Elle finit par s'ouvrir sur une jeune qui doit avoir dans les treize ou quatorze ans.

- Carter ! crie-t-elle en me voyant. Tu as de la visite !

La fille m'invite à entrer et je vois l'appartement. Il est assez grand, mais je peux apercevoir trois enfants, deux filles et un garçon qui se battent -sans doute pour jouer. Tiens, Carter a donc une famille nombreuse. En parlant de lui, il finit par arriver et me fait la bise.

- Bienvenue chez moi, annonce-t-il. Bon, c'est un peu le chaos à longueur de journée, mais j'espère que ça ne te dérange pas.

Je souris pour ne pas montrer ma gêne.

- Donc tu as déjà rencontré Lisa, reprend-il. Là-bas il y a Bianca, Sacha et Rose. Ne fais pas attention à eux, ils ont entre six et onze ans et ont besoin de se défouler assez souvent.

Je lâche un rire qui sonne un peu trop nerveux, puis Carter m'invite à le suivre dans sa chambre. Quand nous passons devant les trois plus petits, le garçon -donc Sacha- lâche :

- C'est ta copine ?

Une gêne immense s'empare de moi et je me sens rougir, incapable de me contrôler.

Jamais ! Au grand jamais je ne serais la copine de Carter.

- Non idiot, répond Carter en soupirant.

Quand nous entrons dans la chambre de Carter, celui-ci ferme la porte et s'excuse :

- Désolé pour ça.

Malgré tout, une question trotte dans ma tête :

- Lucie n'est jamais venue chez toi ?

Il est tout de même important de se rappeler que Carter est le petit-ami de Lucie, et si Sacha demande si je suis sa copine, cela veut donc dire que les frères et soeurs de Carter ne sont pas au courant.

Il passe sa main dans ses cheveux avant de répondre :

- Euh... Non, mais tu comprends, ce n'est pas trop son délire, famille nombreuse qui galère pour vivre. Donc si tu pouvais garder ça pour toi, ce serait sympa.

Mais quelle relation géniale ! Lucie n'est jamais venue chez lui, et ça ne l'intéresse même pas de savoir comment est son lieu de vie. Je ne devrais pas juger, je sais, mais c'est plus fort que moi.

Je regarde autour de moi. La chambre de Carter est très simple : murs blanc, un lit, un bureau, une armoire et une étagère. Pas un poster, une décoration ou même une quelconque babiole.

- On s'y met ? lancé-je, gênée, voyant qu'il commence à me fixer de sa manière maintenant habituelle.

Mon partenaire de travail -et je pense que ce ne sera jamais rien de plus- hoche la tête et attrape des feuilles posées sur son bureau, puis les étale sur son lit.

- Donc commencé-je, il nous reste la fin de cet argument, puis la conclusion.

Soudain, je suis coupée quand quelqu'un se met à frapper à la porte assez violemment.

- Carter ! crie une voix de petite fille de l'autre côté de la porte tout en continuant de frapper. Aide-moi, Bianca veut me frapper !

Carter soupire et répond d'un ton assez méchant :

- Rose, ce n'est pas le moment !

La petite Rose se met à crier et on l'entend repartir en courant. Leur grand-frère, quant à lui, se tape le front :

- Désolé, mais je dois aller régler ça.

Après avoir dit ceci, il se lève et sort de la chambre. Je reste immobile, mal à l'aise. Que suis-je censée faire dans cette situation ? Je peux entendre Carter engueuler ses deux petites soeurs. L'amour fraternel, je suppose. Il revient au bout d'un moment et ferme la porte de sa chambre en la claquant, me faisant sursauter.

- Etre le plus vieux d'une grande famille de fous furieux, c'est loin d'être un bonheur, grogne-t-il.

J'ignore sa phrase et baisse les yeux vers notre travail.

- Tu comprends pourquoi je ne parle pas de ma famille à Lucie, maintenant ? ajoute-t-il, alors que je peux sentir son regard sur moi.

C'est vrai que ça vaut mieux pour lui, s'il veut garder Lucie. Je suis sûre que si elle venait ici, elle ne tiendrait pas deux minutes avant de repartir, apeurée. J'aimerais bien demander, d'ailleurs, pourquoi Carter tient tant à être le petit-ami de Lucie. La popularité, va-t-il me répondre.

- Tu sais, reprend-il, je vais la quitter bientôt.

Je relève les yeux, surprise :

- Pourquoi cette idée si soudaine ?

- J'ai l'impression que c'est toi, Albane, qui me donne envie de virer les gens toxiques de ma vie. On ne s'est peut-être parlés que très peu, mais depuis que tu es dans notre groupe, tu me fais voir les choses différemment.

Je ne réponds rien. Je ne sais pas quoi répondre, en réalité. Je suis très flattée, d'accord, mais je n'ai pas envie que ce garçon ait l'idée de me faire des avances. Pitié, non...

- Je pense qu'au bal, Marina, Selena, Tom, Niels et moi on devrait faire comprendre à Lucie que c'est fini. Si on est tous contre elle, elle ne pourra rien faire.

- Bonne idée... lâché-je.

Il me sourit puis nous nous mettons sérieusement au travail. Le seul bon point de mon effroyable escapade chez Carter, c'est que la reine Lucie va tomber de son trône.