CHAPITRE 7

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Sodad commença à plonger vers le sol. Le vent sifflait à mes oreilles, mon corps se crispa lors de sa descente. C'était absolument effrayant, mais surtout absolument extraordinaire.

Yhann resserra sa prise autour de mon abdomen afin que je ne glisse pas vers l'avant, et je plaquai mes jambes contre la jument par réflexe. L'atterrissage se passa en douceur, et Yhann sauta au sol. Le souffle court, je réalisai à peine ce que je venais de vivre. Je me rendis compte que j'avais les lèvres étirées en un sourire.

— Ça va ?

Je le regardai, toujours souriante.

— Oui, je crois bien, oui.

Il m'aida à descendre.

— La première fois est toujours particulière.

J'étais bien d'accord. Je me tournai vers la jument, superbe créature dans la lumière du soleil déclinant. Les rayons orangés jouaient sur son pelage blanc, comme un pinceau glisserait sur une toile vierge. Mon Dieu, je ne savais plus que penser de cet endroit. L'horreur et la magnificence se côtoyaient de si près que cela en devenait absurde.

— Le village de ma mère est juste à côté. Arriver avec Sodad aurait été un peu trop... voyant.

À ces mots, il glissa un regard protecteur vers sa jument. Son affection pour elle était évidente, et réellement adorable. Cet homme aurait-il des sentiments finalement ? pensai-je avec ironie.

— Je comprends, opinai-je. Les chevaux ailés sont peu nombreux de ce que j'ai compris ?

Yhann tourna la tête vers moi, son regard sombre s'égara dans des pensées qui m'étaient inconnues. Puis il cligna des yeux et acquiesça. Je le suivis, et nous grimpâmes la colline située à côté du pré où nous avions atterri. L'herbe haute nous frôlait les jambes à chaque pas.

Nous avions un beau point de vue sur une partie de la vallée. Le château se dressait à une centaine de kilomètres, signe de la souveraineté du Royaume. Il était splendide, surtout à ce moment, entre chien et loup. Je pouvais deviner les remparts qui entouraient la ville, les tours du château, sa grandeur.

— Le château est très beau, commentai-je avec une certaine admiration.

À ma surprise, le visage de Yhann se rembrunit.

— Il ne l'est pas autant de l'intérieur, crois-moi.

— Qu'est-ce que cela veut dire ?

Yhann poussa un profond soupir, proche de la lassitude, puis se contenta de hausser les épaules.

— Le roi n'est pas très bien vu en ce moment.

Je sentais qu'il ne me disait pas tout, mais je me contentai d'acquiescer. Je ne connaissais pas grand-chose dans ce monde. Mais j'avais le pressentiment que quelque chose de mauvais se tramait. Je jetai un dernier coup d'œil au château, illusion de majesté, avant de suivre Yhann jusqu'au village.

Je ne sais pas ce à quoi je m'attendais. À vrai dire, je n'avais pas eu le temps d'imaginer quoi que ce soit. Mais je réussis à être tout de même surprise. Le village était composé d'une soixantaine de maisons de taille moyenne, faîtes de briques grises ou rouges. Les habitations ne faisaient pas toutes la même taille. On devinait facilement que la demeure la plus grande, celle de trois étages au centre du village, devait appartenir à un riche marchand. Une forge, une auberge, un épicier, et un boulanger faisaient vivre l'endroit. Il n'y avait pas de pavés au sol (c'était sûrement réservé aux villes) mais on voyait que les rues de terre battue étaient entretenues. C'était un village chaleureux, idée renforcée par les nombreuses fleurs, aux fenêtres ou dans de grands bacs, qui offraient une impression de gaité. Yhann dut se douter de ma surprise.

Chroniques de Vahaïra : L'Héritière de la luneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant