Chapitre 4.

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Je hais l'avion. Peut-être encore plus que je hais le bateau, le train et la voiture. Pour ce qui est de la pollution, il n'y pas mieux ! Ou plutôt, pas pire. Je refrène l'élan de joie qui me parcourt lorsque je mets enfin pieds à terre, hors de l'aéroport d'Athènes. Nous n'avons aucune valise, aucun bagage hormis un petit sac de voyage. Et je crois que je ne peux qu'en être satisfaite... Nous aurions alors été bien trop entravés dans nos mouvements.

Le climat méditerranéen est presque doux en cette période de début de printemps. Le dégel est déjà passé ici et la nature s'éveille petit à petit de son sommeil lourd. Attrapant le bras d'Orélien pour l'emprisonner du mien, je lève mon visage vers le ciel, savourant la caresse du soleil tandis que ma seconde main tripote le pendentif toujours autour de mon cou. C'est comme si mon père était toujours présent près de moi. Mon ami laisse échapper un rire doux et murmure :

« L'air de la Grèce te réussit bien mieux qu'à d'autres, Yerine...

Je crois que c'est un compliment. Pour toute réponse, je lui renvoie mon sourire et il y répond, avec une expression si tendre que je sens la boule d'anxiété qui s'est logée dans ma gorge diminuer légèrement de taille. J'ai besoin d'évacuer la tension qui s'agglutine en moi. J'ai besoin de sa présence, de ses sourires, de sa douceur. De son amour, même si ce n'est qu'amical, même si je ne suis qu'Yerine. Et peut-être parce que j'ai aussi besoin d'entendre encore sa voix si grave, j'interroge :

- Dis-moi Orélien, es-tu grec ?

- Qu'est-ce qui te fait penser cela ?

- Peut-être le fait que je t'entends parfois chanter en grec quand tu penses que je suis trop perdue dans mes études pour écouter ce que tu fais... Et que grâce à maman, je suis capable de reconnaître cette langue.

Un éclat nait dans son regard émeraude avant de s'assombrir à nouveau. D'un ton neutre, il m'explique, en se frottant la nuque :

- Je viens du nord de la Grèce, en Thrace, si tu arrives à situer.

J'esquisse une moue. Pas vraiment. Les cours de géographie n'étaient pas mes préférés au lycée et je n'en fais plus depuis que je suis à la fac. Quelque chose me chiffonne et m'arrêtant un instant, je m'enquiers :

- Pourquoi oncle Bel' t'a-t-il envoyé, toi ?

Orélien se gratte un instant le menton, sourcils froncés, l'air de chercher quoi répondre. Il semble opter pour la vérité, cependant j'aurai préféré que celle-ci s'exprime de façon moins sibylline :

- Nous sommes pareil, lui et moi.

- Tu es au courant que ça ne m'aide en rien à comprendre ? je soupire, croisant les bras sous ma poitrine.

Il sourit, l'air gêné. Mon sang ne fait qu'un tour et j'accuse :

- Tu me caches encore des choses !

- Je suis désolé.

Un soupire m'échappe. Moi qui pensait que la chose la plus compliquée que j'essayerai de comprendre au cours de ma vie c'était un foutu traité de médecine, je me trompais largement. Cette période me semble lointaine et pourtant elle ne remonte qu'à hier matin. Quand j'étais en cours et que tout allait bien. Entre temps, je me suis retrouvée saoule à une soirée, puis je me suis faite agressée, j'ai appris que mes parents s'étaient faits assassiné – à cause de moi – et je me retrouve désormais à l'autre bout de l'Europe. Dépitée, je passe une main dans mes cheveux blonds retenus par un simple bandeau. Quelque chose me dit que les choses ne font que de commencer... Finissant par me raccrocher à nouveau à Orélien, je marmonne :

- Tu as intérêt à tout me raconter.

- Promis Yerine.

- Bientôt ?

Yerine (Mélusine HS.1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant