Chapitre 26

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Même après une bonne nuit de sommeil, l'information peine à passer. Mes gestes sont nerveux alors que je me prépare dans la chambre qui nous a été prêtée à Orphée et moi. Malgré les mots rassurants et les étreintes de mon compagnon, impossible de me calmer. Il a fini par s'éclipser afin de régler une affaire.

Je suis tellement sur les nerfs que le moindre bruit parvient à me faire sursauter. Comme à présent, alors que le parquet vermoulu craque sous le poids de mon prétendu oncle.

« Bel ! je m'exclame, surprise de la voir apparaître dans l'encadrement de la porte.

- Salut, petite.

- Arrête de m'appeler comme ça !

- Jamais.

Son clin d'œil m'arrache un petit rire. Cependant sa mine taquine se rembrunit et il souffle :

- Il va forcément falloir se battre sur cette île, Yerine.

- Tu doutes de mes capacités ?

Il secoue négativement de la tête, faisant un pas dans ma direction. Son regard doré est assombri par je ne sais quoi.

- Absolument pas. Mais... Pour toi je suis « oncle Bel », l'oncle dragueur, sympa. Si nous nous battons, c'est à Bellérophon le tueur de chimère que tu auras affaire. Je n'ai aucun scrupule à tuer lorsqu'il le faut. Et la lance n'est pas une arme des plus tendres.

- Tu sais, mes repères ont quelque peu été chamboulés ces derniers temps alors... je devrais m'en remettre.

Enfin je crois. J'aimerais beaucoup me débarrasser de cette fragilité qui me caractérise encore trop. Le héros hausse des épaules avant de souffler :

- Ta mère me tuerait si jamais tu étais blessée.

- Je ne vois pas comment elle pourrait... entre le fait que tu sois immortel et celui qu'elle soit... morte.

Ce dernier fait me fait toujours aussi mal au cœur. C'est encore bien difficile de parvenir à relativiser ce sujet. Bel m'offre un sourire contrit avant de murmurer :

- Tout peut arriver dans ce monde, Yerine. Absolument tout !

Je grimace. Je pense m'en être rendue compte au final. Face à mon mutisme, l'homme se détourne, prêt à s'en aller.

- Bellérophon ?

Il fait volte-face, surpris que je l'interpelle. Son regard plonge dans le miens tandis que je lui offre le sourire le moins tordu possible. La voix légèrement éraillées, je lâche :

- Merci pour tout vraiment. Tu n'es peut-être pas de ma famille mais...

Il balaye mes mots d'un geste avant de me rejoindre en deux pas et de m'offrir une étreinte tendre.

- Nous serons toujours une famille, petite !

La seule chose qu'il récolte en échange de son surnom, c'est un coup de poing dans les côtes qui n'a pas dû lui faire si mal que ça puisqu'il éclate de rire.

- Je suis sûre que maman te tuerait aussi si jamais tu m'appelais comme ça à nouveau.

- J'en doute largement.

Bellérophon se détache pour de bon. Il est temps pour lui aussi de se préparer. Pourtant, je l'appelle une dernière fois :

- Tu es heureux Bel ? »

Ses lèvres s'étirent en un semblant de sourire, même si ça se rapproche plus d'un rictus. Il m'adresse un clin d'œil avant de s'éclipser sans répondre, me laissant dans l'incertitude.

Yerine (Mélusine HS.1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant