Chapitre 28.

207 35 39
                                    

« Je sais que vous êtes là Yerine... »

La voix perfide de Flétrissure retentit dans mon esprit sans qu'il ne soit présent, comme cette-fois dans ses cachots.

« Pensiez-vous vraiment pouvoir venir sur mon île sans que je n'ai vent de votre présence ? »

Je frémis, luttant pour ne pas laisser la peur me gagner. La forêt semble ne jamais prendre fin et malgré la nature qui me guide, j'ai l'impression d'être perdue. Je suis à deux doigts de perdre espoir. Mais je n'en ai pas le droit. Pas alors que ma survie en dépend et avec elle, celle des deux héros que j'ai embarqué dans cette foutue aventure - même si c'est bien involontairement de ma part. La fatigue se fait de plus en plus sentir et je ne réagis même plus quand le chef des Apogonoì me lance à nouveau, alors que je suis la seule à pouvoir l'entendre :

« Abandonnez, Yerine. Rendez-vous. Nous épargnerons peut-être vos compagnons... »

À ce stade, je crois que même si je le voulais, je ne pourrais abandonner.

« Yerine, tu es vraiment sûre de vouloir continuer à ce rythme ?

La voix de celui que j'aime s'élève dans mon dos, son inquiétude vraiment perceptible.

- Orphée, je t'ai déjà dit que...

Je ne finis pas ma phrase quand un homme jaillit des fourrés pour se précipiter vers moi. L'instinct réagit plus vite que le reste. L'immense arbre sur sa gauche s'agite soudain et ses branches balaient l'air pour faucher l'Apogonos qui s'écrase quelque mètre plus loin sur un rocher. Orphée ricane dans mon dos.

- Rappelle-moi de ne jamais, jamais te prendre par surprise...

- Message reçu ! je croasse, alors que mon cœur peine à se calmer du choc qu'il vient de recevoir.

Bel nous dépasse alors que l'homme peine à se relever en hurlant des injures à notre encontre. Il va finir par alerter les autres de notre présent... Le héros aux cheveux bruns nous lance un regard en coin, presque désolé à notre encontre. Puis il lève sa lance. Je n'ai que le temps d'apercevoir un éclat de soleil sur la pointe de métal suivit par un reflet incarnat. Je détourne aussitôt le regard.

- Allons-nous en d'ici. Vite. Notre position est d'ores et déjà signalée. grommelle Orphée d'un ton neutre.

Je grimace avant de m'engager sur un petit chemin de Terre. Il devient difficile d'évoluer entre les buissons et les arbustes sans compter sur les déformations du sol de l'île puisque je manque de perdre l'équilibre lorsque la pente devient un peu plus abrupte. Nous nous enfonçons dans une partie de la forêt bien plus verte et plus danse. Les arbres semblent ici moins subir le contre-coût des sinistres pouvoirs de Flétrissure.

- Dis-moi, mère nature, que te disent les arbres ? À quelle distance se trouve ton fichu bassin ?

Je soupire avant de lancer à l'intention de Bel :

- Selon la nature, nous sommes vraiment tout près.

Soudain je me fige alors que la nature s'extasie à travers notre lien.

Le bassin. Devant nous. De la taille d'une piscine, sa surface est entièrement recouverte de nymphéas dont la couleur est du plus pur des écarlates. L'eau est dissimulée par les larges feuilles des nénuphars. Je suis tant époustouflée face à ce spectacle que je ne peux m'empêcher de m'exclamer :

- Oh mon dieu...

- Ça, tu l'as dit...

Orphée s'avance d'un pas, sa méfiance retombant d'un seul coup. Tous semblent subjugués par le paysage sous nos yeux. La fatigue de cette longue excursion en forêt s'abat soudain sur nous. Bellérophon se laisse tomber assis sur l'herbe grasse, sa lance reposant à ses côtés.

Yerine (Mélusine HS.1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant