Chapitre 17-1

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La la la laaaa, la la la...

Je fredonne dans ma tête un air très joyeux. J'avais commencé à haute voix mais mon timbre mélodieux déconcentrait un peu trop la conduite d'Aaron. Il m'a donc priée de garder mes talents de Castafiore pour moi, le temps du trajet. 

La Castafiore, carrément... Quel flatteur !

En même temps, ça me permet de peaufiner ma nouvelle création avant de lui faire profiter comme il se doit de la totalité de mes prouesses vocales. Je vais appeler cette mélodie « Ronron's Vibe ». Ça sonne bien.

J'ai la banane depuis que nous avons pris la route. En fait, depuis que Monsieur pète-sec a finalement accepté de reconnaître qu'il s'était éclaté, durant cette sortie improvisée en ma compagnie. Je suis sûre qu'il n'avait jamais mis les pieds dans une fête foraine avant aujourd'hui. Enfin, avant-hier plutôt, parce que minuit avait déjà sonné depuis trois bonnes heures lorsque nous nous sommes retrouvés sur le parking.

Le soleil est désormais en train de se lever.

Ah ! Quelle aventure ! Aaron peut me remercier, il chérira le souvenir de cette soirée toute sa vie. Cette expérience l'aura déridé pour de bon, il ne pourra en ressortir que complètement métamorphosé. 

Les rôles se sont inversés, l'élève est devenu le maître. Grace à moi, son sourire Colgate deviendra bientôt sa signature personnelle. J'en fais mon cheval de bataille ! Du moins, s'il parvient à le retrouver... il semble sujet à des aigreurs d'estomac depuis toute à l'heure.

Je jette un coup d'œil en biais dans sa direction. Crotte, il arbore toujours son air pincé, pour ne pas dire constipé.

— Des soucis intestinaux ? m'enquiers-je avec compassion.

Il me retourne un regard confus, voire offusqué. Puis il se concentre à nouveau sur la route, en secouant la tête et en marmonnant je ne sais quoi dans sa barbe quasi inexistante. C'est plutôt un bouc, à la Chris Pratt. Miam.

Bon, c'est vrai, notre rencard a légèrement viré en eau de boudin sur la fin mais, si on oublie l'apparition impromptue des pros de la gâchette tranquillisante, c'était chouette. On a même failli s'embrasser.

Je crois que Ronron préfère attendre de monter encore un peu plus en pression avant de se laisser aller complètement à ses pulsions charnelles. 

J'ai souvent vu cette technique appliquée dans des romans d'amour ou au cinéma. Le héro de l'histoire se retient, se retient, se retient... et BOUM ! Il explose et emballe l'héroïne d'un coup, sans prévenir, en lui dévorant la bouche comme un sauvage. Une partie de jambes en l'air endiablée s'ensuit inévitablement. Et c'est encore plus torride quand les principaux protagonistes se sont engueulés juste avant.

J'ai hâte qu'on y soit. Je sens encore le goût de ses lèvres sur les miennes après notre premier rapprochement collé serré. Vivement qu'il en goûte d'autres...

Il va falloir que je réfléchisse à une façon de lui faire perdre ses nerfs définitivement. Ce sera l'apothéose avant l'apokalipse !

Mais oui ! Voilà un programme très prometteur.

Ah ! J'aime ma vie, songé-je en faisant tourner entre mes doigts la fine branche de bois foncé qui ne me quittera plus.

J'ai toujours voulu être majorette.

On est passé récupérer mes affaires à l'hôtel, comme prévu. C'était plutôt rigolo de jouer les ninjas en se collant aux murs pour éviter d'attirer l'attention des possibles filigays, restés là en embuscade. Enfin, moi, je me collais aux murs. Ronron, lui, préfère la méthode bourrine, visiblement.

Deka Kerberos - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant