Chapitre 1

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     Je suis assis sur le bord du lit. J'ai une sévère gueule de bois. Je me retourne et vois la jolie créature qui se trouve à mes côtés. J'ai du goût en matière de fille. Elle tourne la tête vers moi et redresse le buste. C'est un mec...

     QUOI ? C'est l'alcool qui me joue des tours ! C'est pas possible ! Qu'est-ce qu'un mec fait dans mon lit ?? Allongé sur le ventre il s'accoude au matelas, relève les pieds et m'adresse un petit sourire mièvre. Sa peau hâlée contraste harmonieusement avec le blanc des draps... Non ! Je me dégoûte moi-même ! ça fait pas 3 semaines que je suis à Bangkok et me voilà déjà dans une situation absurde.

     « Qu'est-ce que tu fais là ? Fis-je, un peu abruptement, la bouche encore empâtée.

     - Toi tu payes pour toute la nuit...» Me répond-il dans un anglais approximatif.

     Putain un gigolo en plus... Sa voix, haut perchée pour un mec, un peu nasillarde à cause de l'accent, m'agace autant qu'elle me rassure : je l'ai sans doute pris pour une femme. Faut dire que c'est pas la première fois que je me rend dans des lieux mal famés pour en ressortir au bras d'une ou deux jolies Filles...  Mais certains coins sont de véritables repères... Je ne me rappelle même plus où j'ai pu le dénicher celui-là.

      « Comment ça ?... Toute la nuit ? »

     Mais quelle heure est-il ? Il fait déjà jour dehors... Sous les tropiques ça signifie qu'il est au moins... 7h du mat' ! Le réveil me l'indique très clairement.

     « Oui... toi tu veux service pour toute la nuit... » Continue-t-il à répéter, d'une voix calme et posée.

     Je m'essuie le visage, j'ai l'impression que j'ai fais un immense bond dans le vide sans m'en rendre compte. Mais mes sens sont encore beaucoup trop engourdis par l'alcool. Moi qui rêvais d'expériences nouvelles en m'expatriant ici, je suis servi !

     Par excès de pudeur, j'attrape le draps qui recouvre en partie le gigolo et m'en entoure les reins. Cela le fait sourire. Il cache un rire discret autant que féminin. Il m'énerve ! Je ne sais plus trop ce que je fais, je reste sur place, indécis. Alors, souplement il se lève et me fait face, nu comme un vers.

     Il n'est pas très bien bâti, selon moi. Il est petit, complètement glabre, svelte comme un arbrisseau et ses cheveux lisses et noirs lui tombent sur les épaules. Son sexe est petit lui aussi. Pourquoi cette réflexion ? De toute façon je suis sûr que c'est moi qui l'ai... ça me dégoûte rien que d'y penser. Il est si gracile...

     « Quel âge tu as ?

     - J'ai 16 ans. »

     Un gosse putain ! Je me suis tapé un gosse !! Mais quel porc je suis !

     « On a... ? On l'a fait ? Je lui demande en balbutiant.

     - Oh oui... tu es très fort... » Me répond-il, presque provocateur.

     Je suis doublement écœuré. Comment l'alcool a-t-il pu avoir de tels effets ? C'est horrible, c'est un cauchemar ! Je me rassois sur le bord de mon lit King-Size, spécialement apporté des Etats-Unis. Mon grand appart est d'un luxe indécent, avec son carrelage blanc qui reflète la lumière des grandes baies vitrées, vue sur Bangkok et le quartier des affaires où je bosse la journée. Heureusement que je ne commence qu'à 9h... En arrivant il y a trois semaines, le lit était tellement grand que je n'avais presque plus de place dans la chambre pour en faire le tour. Pour quelqu'un qui bosse dans le tourisme de luxe, avec immenses résidences, quelle ironie ! Du coup ça fait trois semaines qu'il trône dans l'angle de la pièce de vie, cerné de baies vitrées d'un côté, de la cuisine ouverte avec bar de l'autre...

     J'ai mal au crâne... la tête entre les mains, les coudes sur les genoux j'essaie de m'éclaircir les idées.

     « Je peux prendre une douche ? »

     Il m'a parlé timidement, d'une voix incertaine. J'en avais presque oublié sa présence. Pourtant c'est lui qui est la cause de mon vertige.

     « Oui vas-y... »

     Est-ce une erreur ? Et finalement qui me dit que ce n'est pas lui qui a profité de mon état de d'ébriété pour m'escorter ? Il parait que certains font ça... se glisser près de toi, se faire ramener, sauter au besoin, le temps de repérer les lieux et tout ce qu'il y a à piquer...

     Il se dirige vers la salle de bain, fait coulisser la porte et disparaît à l'intérieur. J'en profite pour jeter un coup d'œil aux alentours. Mes vêtements gisent par terre avec ce que je suppose être les siens... Je me lève et fait le tour des tiroirs du buffet, voir s'il n'a rien volé. Plus facile à dire qu'à faire, c'est un bordel là-dedans ! Je me rassois sans savoir comment réagir. Est-ce une erreur de le laisser seul dans la salle de bain ? Mais je deviens parano avec tout ça, il n'y a rien à piquer dans la salle de bain... Il en ressort quelque minutes plus tard, une courte serviette autour des rein, et j'ai les yeux plus en face des trous. Il est jeune. Trop jeune.

     Ses petits cheveux mouillés tombent en pagaille autour de sa tête. Son nez, légèrement épaté, sa bouche épaisse et ourlée, ses yeux noirs en amande... Mais qu'est-ce qui me prend ?!

  


Or rougeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant