Or rouge

Chapitre 12

     Étendu sur mon lit, j'ai peine à accepter ce qu'il vient de se passer. J'ai joui, jusqu'à la libération totale, avec un homme. Est-ce que c'est possible ça, quand on se croit 100% hétéro ? Je remets ma vie en question. Et mon père qui, la semaine dernière encore, me harcelait au téléphone pour savoir quand est-ce que j'allais me décider à lui présenter une fiancée...

     « Mike, tu veux payer maintenant et je pars ? Me demande Dior d'une petite voix.

     Je me tourne vers lui, il a un air étrange, que je n'ai pas vu depuis longtemps chez qui que ce soit. Est-ce qu'il s'en fait pour moi ?

     « Et toute une journée, tu prends combien ? »

     Une fois le deal passé il me rejoint, enroulé dans une de mes longues serviettes, moi sur le dos, lui sur le ventre à mes côtés.

     « T'es pas triste j'ai 22 ans ? Me demande-t-il alors.

     - Quoi ? Non pas du tout ! Au contraire...

     - Ah ? c'est bien, t'es gentil... »

     Il baisse les yeux et je ne peux m'empêcher de le trouver mignon. Je tire un bord de sa serviette pour lui frotter ses cheveux encore mouillés. Ça le fait rire.

     « Hier, à la fête de l'hôtel, tu m'as pas reconnu ? Je lui demande en repensant que moi, il m'a fallu un peu de temps pour me rappeler de lui, de son visage...

     - Oui... Je reconnais toi.

     - Alors... Pourquoi t'es pas venu me voir, me parler ?

     - Tu veux ? »

     Pourquoi je demande ça ? Je suis con ou quoi ? Bien sûre que non je n'aurais pas voulu !

     « Eu... ouais non en fait.

     - Oui... Le client il veut pas... pas bon endroit. »

     Il a du mal à trouver ses mots, mais je trouve qu'il ne se débrouille pas si mal que ça en anglais.

     « Où tu as appris à parler anglais ?

     - Ooh... Avec clients. Un peu avec boss. »

     Il baisse soudain les yeux, comme s'il avait parlé de quelque chose de mal.

     « Le boss ? T'as un patron ?

     - Oui... c'est lui qui donne téléphone et clients.

     - C'est celui qui a essayé de m'emmener hier ?

     - Non non... Tu vois pas qui c'est. »

     J'arrête là mes questions qui ont l'air de le déranger. Je voudrais encore profiter un peu de sa présence...

     « Mike ! La télé ! »

     Pour lui faire plaisir j'allume l'écran plat. Il est tellement sidéré par la taille qu'il en ouvre grand les yeux et la bouche. Il s'empare de la télécommande, zappe immédiatement et tombe sur la série que j'ai préféré ne pas regarder l'autre jour. A mon grand étonnement il bondit et va s'asseoir sur le divan. Je le rejoins, laconique.

     « Tu regardes ça ?

     - Oui ! »

     Là il me fait un résumé, autant qu'il peut, de l'intrigue toute tracée de la série. Comment est-ce qu'on peut perdre son temps à regarder une meuf se poser la question de savoir si oui ou non elle accepte de fréquenter cet homme ? Il est beau, jeune, séduisant et richissime. Elle est d'un milieu plus modeste quoique confortable. Lassé, je me tourne vers Dior. Il regarde l'écran mais ses yeux ont une toute autre expression. Son corps est là mais son esprit semble ailleurs. Dior... Pourtant, soudain, il s'esclaffe devant un gag grossier. J'avoue avoir du mal à le comprendre.