Silver of Darkness - Tome 3: Le voyage de l'anneau [Terminée]

{𝐶ℎ𝑎𝑝𝑖𝑡𝑟𝑒 1} - 𝑈𝑛 𝑠𝑜𝑚𝑏𝑟𝑒 𝑝𝑟𝑒́𝑠𝑎𝑔𝑒

La lumière de l'aube qui pointait envahissait la pièce d'une douce clarté. Je me réveillai, encore une fois, de manière brusque. Redressée sur mon lit, je grognai de frustration en me frottant le front. Je faisais souvent ce rêve...

Je me retrouvais dans le noir complet. Il n'y avait rien ni personne, c'était comme si je flottais dans le néant. Mais après, une petite lumière apparaissait, et je courais vers elle pour la rejoindre, mais jamais je n'y arrivais. Puis une voix sombre et caverneuse se mettait à réciter cette sorte de chanson funeste, qui annonçait la fin du monde.

Ce jour là, les étoiles étaient voilées,
Le Monde plongé dans l'obscurité...
D'une lignée brisée,
Deux sœurs sont nées...

Sans aucun doute, c'était moi et Ilmana. Nous étions nées lors d'une sombre nuit d'hiver il y a quatre vingt ans. La lignée brisée, par contre, je n'avais aucune idée de ce que cela pouvait être.

L'une, descendante de l'ombre,
Murmurant une prière,
L'autre, héritière de la Lumière,
Au destin bien sombre.

Encore une certitude: j'étais là descendante de l'ombre, de toute évidence. Je détenais des pouvoirs perdus, apparemment destinés à faire le mal, alors que ma soeur incarnait une douce lumière de paix. Mais je n'avais jamais eu envie de rejoindre les forces obscures: quelle idée absurde! Heureusement que j'avais été élevée en Lórien, parmi des elfes sages.

Séparées durant des années,
Elles seront rassemblées.

Nous avions en effet été réunies il y a une quarantaine d'années, sous l'ombre de la forêt de Fangorn, après si longtemps.

Mais proche sera leur fin,
Et la guerre sera menée en vain.

C'était la partie qui m'inquiétait. Il y avait quarante ans, Galadriel ne m'avait elle pas parlé d'un mal qui s'étendait, en promesse d'une nouvelle guerre? Je frissonnais rien que d'y penser. Mais je le sentais au fond de moi: les ténèbres approchaient...

Car perdue dans la Terre Noire,
S'éteindra leur dernière lueur d'espoir.

Mais c'était cette dernière phrase qui me réveillait brusquement à chaque fois. Ces deux simples vers me provoquait une vague de terreur, qui pétrifierait le plus courageux des guerriers. Mais qui représentait ce «leur»? Et quelle était la lueur d'espoir?

Exténuée, je me levai et me débarrassai de ma robe de nuit. Je me postai devant le grand miroir de ma chambre. Mes cheveux étaient déjà emmêlés.

Mais je voulais absolument les garder longs et ondulés comme cela. Ma sœur était du même avis. C'était ce qui nous démarquait des autres elfes, en plus de nos mèches argentées et dorées.

Je soupirai. Mon corps était couvert de bleus, dus à mes récentes péripéties en compagnie d'Ilma et d'Alcar précédant notre arrivée à Fondcombe avant hier.

Mais je n'avais jamais eu aucune blessure qui ne disparaissait pas. La seule cicatrice que j'avais était celle d'il y a soixante ans. Je me tournai légèrement, de façon à apercevoir la marque derrière mon épaule gauche. Ce fut ma première blessure de guerre, et elle resterait à jamais.

Je me dirigeai vers une chaise près de mon lit, où étaient empilés diverses tenues. Je revêtis un haut blanc et un pantalon taille haute en cuir noir, ainsi que mes bottes marrons de la même matière résistante.

La chemise était joliment brodée et légèrement décolleté, laissant apparaître le pendentif lune que Galadriel m'avait offert la dernière fois que nous nous étions vues. Elle m'avait dit qu'il avait une valeur symbolique et familiale. Cela m'avait fait chaud au cœur, car elle me révélait  ainsi qu'elle me considérait entièrement comme l'un des siens. Une vraie elfe.

J'étais donc en tenue confortable, que j'aurais sûrement portée pour le combat, mais tout en étant présentable. Nous faisions souvent cela, avec ma soeur, quand nous venions ici. Nous ne portions pas de robes, pour rappeler que nous étions des guerrières prêtes à l'action quoi qu'il arrive, mais tout de même élégantes pour une question de rang: nous étions respectées ici, et puis cela faisait bien plaisir de se faire belle à diverses occasions.

Je laissai de côté toutes mes armes, à l'exception des trois couteaux que je dissimulais tout le temps sur moi. Il y avait quelques années aussi, Celeborn m'avait offert un nouvel arc, un nouveau carquois et deux dagues. Ils m'attendraient sagement dans ma chambre. Que pouvait il arriver, ici à Imladris?