6 - Missed you

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Ces deux semaines ont été les plus longues de ma vie. Je pensais sans cesse à Bing, je revivais la dernière scène en boucle. Je m'en voulais chaque seconde un peu plus. Comment ai-je pu être aussi bête ?

Maintenant, on est dans l'avion, on a déjà fait le changement à New York et il ne reste que deux heures de vol. Je suis épuisée par le voyage, mais l'excitation me maintient éveillée. Je vais revoir Bing demain, à la rentrée ! Je pourrai tout lui expliquer. Je saute presque sur mon siège. J'ai mal aux fesses à force d'être assise. Je jette encore un regard par le hublot, mais je ne vois toujours pas L.A. Je trépigne d'impatience. Ma mère passe une main lasse dans mes cheveux en me disant de me calmer.

•••

Je saute hors de l'avion, mon sac sur le dos. Il faut encore récupérer les valises, à l'aéroport. La nuit est tombée, il n'y a pas d'étoiles dans le ciel. Seule la lune brille dans le noir. J'ai lu quelque part que c'est la pollution lumineuse qui empêche de voir les étoiles en ville.

J'attrape la valise alors qu'elle atterrit sur le tapis roulant, et fais un grand sourire à maman.

— Je ne pensais pas que tu serais si heureuse de revenir.

— Moi non plus !

J'aurais plutôt pensé avoir tendance à angoisser à l'idée de le revoir, mais là, j'ai plus hâte que peur. Cette sensation est bizarre, et un peu désagréable, mais pas trop.

Le trajet est long jusqu'à la maison. Je somnole dans le taxi, la tête sur l'épaule de maman. Elle me réveille doucement quand on arrive, il est près de trois heures du matin. En France, avec le décalage horaire, il est déjà midi. Je me rends compte que je viens de sauter une nuit.

Je m'écroule dans mon lit, encore toute habillée. Je n'ai pas la force de me mettre en pyjama et ma mère n'a pas la force de m'obliger à le faire. Je m'endors comme une masse.

Le réveil sonne à sept heures, impitoyable. Je dois me lever pour aller à l'école. Maman a de la chance, elle a pris un jour de congé aujourd'hui pour pouvoir se reposer. À l'idée que je vais enfin revoir Bing, mes tripes se nouent. Je ne peux plus rien avaler. Je suis tellement impatiente, et terrifiée... Comme hier, fois mille.

Je vais à l'école toute seule. Mon cartable me scie les épaules. Il est plus lourd aujourd'hui parce qu'on doit prendre toutes nos affaires pour les vacances, et les rapporter dans nos casiers à la rentrée.

Je le cherche du regard dans la cour, mais je ne le vois pas. Je sens mes battements de cœur devenir irréguliers. Je fais le tour de la cour, inquiète. Je fouille la masse d'élèves des yeux. Il n'est pas là. Cette réalité me frappe de plein fouet alors que je m'assieds, un peu tremblante, en classe. Il n'est pas là. Il est absent. Sa place est vide à côté de moi. Pas de carnet en vue, ni de récitations des mots anglais que j'ai appris.

Je passe la journée seule avec mon livre. Je lis sous mon bureau pendant le cours pour ne pas me rendre compte de sa cruelle absence. La maîtresse ne dit rien. Peut-être qu'elle sait pourquoi il n'est pas là. Peut-être que je devrais le lui demander. Mais je ne le fais pas. J'ai peur de la réponse, je crois.

Je suis allongée dans le noir, les yeux grands ouverts sur l'obscurité. Est-ce à cause de moi qu'il n'était pas là ? C'est moi qui l'ai fait fuir ?

Je me tourne et me retourne sans parvenir à m'endormir. Les pensées tournoient dans ma tête sans plus aucune cohérence. Je m'effondre dans les bras de Morphée au petit matin.

•••

Ses cheveux châtain me sautent aux yeux dès que je pose un pied dans la cour. Je me mets à courir vers lui. Il me voit à son tour, et sourit. Je saute dans ses bras. Il ferme les yeux et inspire profondément. Je sens son cœur battre dans sa poitrine. On se détache enfin l'un de l'autre. Il a un peu grandi, mais je ne sais pas si c'est juste mon imagination. Deux semaines, ce n'est pas si long.

« I missed you. »

« Moi aussi. Je suis désolé pour la dernière fois, Leo. »

Je referme le carnet. Son regard croise le mien. Je ne sais pas s'il va comprendre tout ce que je vais dire, mais hors de question que je parle dans une langue que je maîtrise mal pour quelque chose d'aussi sérieux.

— Bingham, c'est moi qui suis désolée. Je n'aurais jamais dû te repousser aussi violemment. Je regrette, vraiment. C'est juste que... je trouve que tes sentiments vont un peu vite. Enfin, je veux dire, on ne se connaît que depuis quatre mois, et tu me dis ça maintenant... C'est trop rapide pour moi, il faut me laisser le temps. Mais... tu veux toujours être mon ami ?

— Bien sûr.

Je lui saute dans les bras à nouveau, en riant. Il est tellement compréhensif !

Beurk, l'amourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant