11 - Love u

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« I have a stepfather. His name is Cameron. I don't like him. »

Bing fronce un peu les sourcils.

« Pourquoi tu ne l'aimes pas ? »

« He's strange. I'm afraid of him. »

« Parles-en à ta mère ? Peut-être qu'elle peut faire en sorte que tu le voies moins souvent. »

Ça, c'est sûr que non, mais je lui promets d'essayer, sinon je sais qu'il va s'inquiéter pour moi. Cam vient de plus en plus souvent à la maison. Quand il est là, je fais de mon mieux pour l'ignorer, et lui aussi fait comme si je n'étais pas là. Maman a déjà essayé plusieurs fois de me faire engager la conversation avec son amoureux, mais je campe sur mes positions : je ne veux pas de lui chez moi, alors je l'ignore, un point c'est tout. Elle ne me fera pas changer d'avis.

Parfois, Cameron reste dormir la nuit, et je les entends chuchoter à travers la porte. Je me demande ce qu'ils se disent. Ils discutent jusqu'à ce que je m'endorme, et sûrement encore après. J'ai bien dû accepter de voir que Cam n'était pas alcoolique, et depuis la première nuit où je l'ai vu, il redouble d'attention sur le nombre de verres qu'il boit. À côté de lui, maman rayonne, mais lui, ses yeux sont toujours froid, qu'elle soit là ou pas. Je me demande pourquoi, et s'il est amoureux d'elle ou pas. On dirait que non, pourtant, il dit souvent « je t'aime » à maman, mais toujours sur le même ton monocorde. Elle, elle n'y voit que du feu, et elle rayonne encore plus.

Est-ce que je brille de bonheur comme maman à côté de Cam, quand je suis près de Bing ?

« Tu m'aimes toujours ? »

Je regrettes d'avoir écrit ça avant même qu'il ne le lise. Zut, zut, zut... qu'est-ce qui m'a pris ? J'ai fait ça sur un coup de tête, en regardant les mèches voler dans le vent autour de son visage. Il les a laissées pousser, comme je lui avais demandé. Pour l'instant, ses cheveux sont encore trop courts, ça ne ressemble pas à grand chose, mais j'ai hâte de le revoir comme en septembre, avec des cheveux dans les yeux. Après réflexion, ce n'était pas si moche que ça. De toute façon, peu importe sa coupe, il est toujours beau. Même le jour où il s'est fait un œil au beurre noir en tombant contre un coin de table, il était beau. C'est simple, c'est le plus joli garçon que j'aie jamais rencontré.

— On peut discuter à l'oral ? Tu peux parler en français. C'est plus pratique comme ça.

Il me regarde, avec ses grands yeux marron tellement doux et innocents. Je me sens rougir, mon cœur s'emballe, mon regard passe à toute vitesse du bout de mes pieds à son visage.

— Oui, Leo, je t'aime toujours.

J'adore quand il m'appelle Lio, pourtant, là, je n'ai pas le temps de m'attendrir, parce qu'il reprend :

— Pourquoi ?

La voilà, la question implacable que j'attendais avec angoisse. Je ne peux pas lui mentir. Maintenant que j'ai commencé, je dois finir. Je dois lui avouer que moi aussi, je l'aime. Mon souffle est saccadé, mes genoux sur le point de flancher. Je me souviens dans un éclair de génie du MP3 qui attend sagement dans ma poche. Ma main est tremblante lorsque je le lui tends. Je vois ses yeux bouger au fur est à mesure qu'il lit.

D'un coup, je n'en peux plus, il faut que je m'en aille ou je vais craquer ; alors je pars en courant, je m'enferme dans les toilettes, et je m'assieds sur la cuvette, pliée en deux, m'efforçant de reprendre une respiration et un pouls normaux. Je m'attends à ce qu'il vienne frapper à la porte pour me demander de parler, mais il n'en fait rien. Je doute que l'idée lui ait même effleuré l'esprit, il doit être trop heureux pour y penser.

La cloche sonne. Je dois retourner là-bas. Je dois y aller, me ranger à côté de lui, puis passer le reste de la journée sur une chaise avoisinant la sienne. J'attends quelques secondes, dans ma cabine, priant pour que tout le monde m'oublie ; et puis je reviens à la réalité : personne ne m'oubliera, je n'ai pas le choix, je dois sortir de ma cachette.

Il ne me dit rien. Il a un vague sourire aux lèvres. Mais il se tait, et, comme souvent, le silence entre nous est plus chargé de mots que n'importe quelle conversation. Je pense qu'il a compris que je n'étais pas encore prête à en parler plus. J'aime quand il me comprend sans que j'aie à lui expliquer les choses. Il a juste à me regarder, et il sait. C'est presque magique. Une bouffée d'amour me gonfle le cœur à cette pensée.

Il ne parle pas de ça pendant le reste de la journée, et moi non plus. Je le surprends parfois à sourire jusqu'aux oreilles en me regardant, et ça me réchauffe drôlement.

Beurk, l'amourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant