Chapitre 12: A feu et à sang

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J'ai chaud, vraiment très chaud. Non, ce n'est pas moi, c'est l'air. La chaleur tape tant sur ma peau qu'elle me réveille. Lorsque j'ouvre les yeux, je suis immédiatement aveuglée par une couleur orangée. Mes yeux me brûlent, je transpire à grosses goûte. Un feu, la maison est en feu. Sur ces révélations, la panique monte en moi, je suis pigée par les flemmes avides qui grimpent sur les murs. Je me lève du lit et tourne dans tous les sens, je suis en train de mourir de chaud. Cette chaleur mord ma peau et me pique les yeux. Le bois craque puis s'effondre dans le brasier. Le sang pulse dans mes veines, tapant sur mes tempes. Les flammes dévorantes qui m'entourent ne me laissent aucune échappatoire. Mon coeur palpite frénétiquement et je commence à avoir du mal à respirer. Je retombe sur le lit en toussant, puis je sens mon corps se transformer de lui-même. Mes muscles s'épaississent, les flammes crépitent, le bois qui craque résonne dans ma tête, les cendres monopolisent mon odorat, la chaleur m'étouffe, et le feu me rende presque complètement aveugle.

Je fais un pas vers les flammes, mais impossible de faire plus, le brasier est trop important. Paniquée, je regarde à droite à gauche. Un nouveau bout de bois s'effondre, envoyant des cendres chaudes sur mon pelage. Je gémis de douleur et aperçois enfin une fenêtre. Seulement, les flammes ne vont pas tarder à ravager aussi cette partie-là. Sans plus réfléchir, je m'élance à travers cette chaleur aussi étouffante qu'aveuglante, puis saute par la fenêtre, brisant le verre au passage. Mon visage me picote, ainsi que mes pattes, mais j'arrive à l'extérieure sans avoir été dévorée par le brasier. Je me tourne vers la maison, la vitre du 1er étage est complètement brisée et le bois est dévasté par le feu. En fin de compte, plusieurs maisons sont en feu, les membres du Clan s'agitent dans tous les sens et sous toutes les formes. C'est la cohue dans le village. Au loin, j'aperçois un splendide Lion au visage balafré se battre contre plusieurs trappeurs, mutilants, saignant à blanc, et égorgeant. Plusieurs membres du Clan se joignent à Père et tentent de repousser les attaquants.

L'atmosphère est épuisante. Les cris, les grognements, les hurlements, les pas affolés, les pleurs des enfants, le bois qui s'effondre, le bois qui brûle, les cendres, l'odeur de la peur, l'odeur aigre des trappeurs, toutes les odeurs de chaque membre du Clan, c'en est trop pour moi. Je suis assaillie par trop de sensations en même temps, je ne peux pas gérer tout ça. Je cherche une échappatoire, lorsque j'entends la voix de mon petit frère:

- Elisabeth !!

Je fais volte-face et vois Maël courir vers moi. Je me précipite aussi vers lui, la panique pulsant dans mes veines. Tout le monde se bouscule, tout le monde court, tout le monde s'alarme.

C'est alors que le cliquetis d'une arme à feu retentit. Je vois du mouvement derrière mon petit frère et me jette sur lui pour le plaquer au sol. L'assourdissante détonation retentit, et me fait gémir de douleur. Un acouphène persiste pendant quelques secondes, puis je me redresse pour grogner. Une imposante trappeuse se dresse devant nous, carabine poudrée à la main, et cigarette fumante à la bouche. Je ne la lâche pas des yeux, tandis qu'elle m'adresse un grand sourire et recharge son arme. Mon frère ne perd pas plus de temps et se transforme dans un grognement d'avertissement. La trappeuse laisse échapper un petit rire moqueur avant de pointer son canon sur l'imposant Ours à Lunettes. Cependant, la femme tire dans le vide, déviée dans sa trajectoire par un immense Lion balafré qui lui saute à la gorge. Il la tue d'un puissant coup de mâchoire, puis se tourne vers nous. Il observe mon frère avant de me fixer.

- Elisabeth ?

La voix forte de Père résonne dans mon esprit, laissant planer une profonde interrogation. Jamais il ne m'était arrivé de communiquer ainsi avec le Clan, tout simplement car je ne me transformais jamais avec eux. Et... ce premier contact est plutôt étrange. Comme si je me parlais à moi-même mais avec la voix de quelqu'un d'autre en même temps que des bribes de ressentis montent en moi.

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