La dernière cible : Robert Mounch

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                     Becca avait passé le reste de la semaine à préparer son plan pour confronter son ultime cible, Robert. Désormais, elle était fin prête à le mettre à exécution. Elle avait déjà enregistré le lieu, communiqué par Michael, sur le GPS de son smartphone. Il était dix heures du matin et elle se trouvait encore chez elle, affublée d'un hoodie bordeaux aux lanières et à la fermeture éclaire blanches. Son jeans noir moulant sur sa paire de sneakers, lui donnait un aspect cliché, celui d'une adolescente lambda et non clui d'une fille qui pouvait vider tous les stocks d'une boutique de haute couture avec un simple bout de plastique magnétisé.

Elle se décida à sortir de la maison, mais pas pour aller tout de suite à la rencontre de sa cible, mais plutôt vers la maison des employés. A la manière d'une voleuse, elle se faufila au sein de ses murs. À peine avait-elle posé ses yeux sur la table basse au centre de la pièce commune, qu'elle vit la veste d'un des employés de la sécurité déposée négligemment, sur laquelle reposait une arme à feu, un pistolet 92 FS 9mm. Elle zieuta à gauche puis à droite avant d'avancer vers la table, elle hésita durant quelques secondes avant que sa détermination ne revienne pulser dans ses veines, elle saisit alors le pistolet et le fourra à l'arrière de son jeans en le recouvrant précautionneusement avec son t-shirt et son hoodie. Elle ressortit à la hâte, sans se faire prendre et courut jusqu'au portail. Elle sortit son téléphone pour faire venir un taxi. Environ dix minutes plus tard, une voiture grise se gara devant elle, elle y monta;
- emmenez-moi à cette adresse ! (Urgea-t-elle, en montrant l'écran de son téléphone au chauffeur.)
- écoute, jeune fille ! Cet endroit est plutôt loin, et ça risque de te coûter cher. T'es sûre de vouloir y aller ?
- vous ai-je dit que je n'avais pas de quoi payer? Le chauffeur ne répondit rien, l'air étonné du comportement hautain de la jeune fille.
- c'est bien ce que je pensais, alors faites votre boulot ! (Scanda-t-elle, de façon autoritaire, presque tyrannique sans oublier son sempiternel cynisme.) Il fit face à la route, les mains serrés sur le volant et démarra.

Une heure trente plus tard, le taxi la déposa à l'adresse indiquée, elle régla la note avec presque tout ce qu'elle avait sur elle, tellement qu'elle se demandait comment elle ferait pour rentrer. Elle se tenait devant une sorte de motel pittoresque avec trois bâtiments formant un arc carré, chacun d'entre eux comptait trois étages. Et au centre, un parking presque desert, seulement cinq voitures y étaient stationnées, preuve que le motel n'était pas bondé. Elle revérifia le numéro de son studio. Elle s'engengea alors dans les escaliers du bâtiment du milieu et ne s'arrêta qu'au deuxième étage devant une porte numérotée : <<36.>> Elle toqua et attendit qu'on lui ouvre. Même pas dix secondes de patience, que la porte s'ouvrit, dévoilant un Robert en débardeur blanc, bien portant et quasiment souriant.
- oui? C'est pour quoi ? (S'enquit-il avec bonhommie.)
- vous êtes Robert Mounch? (Demanda-t-elle, par souci de sécurité.)
- oui. Pourquoi ?
- j'ai besoin de vous parler...seul à seul. (Prononça-t-elle sur un ton directif.)
- euh...ok...euh...entre. (lui permit-il, légèrement perplexe.) Il s'écarta derrière la porte et elle investit les lieux. Son studio n'avait rien d'extraordinaire, ni de particulier. Un canapé occupant le petit espace servant de salon ainsi qu'une table basse en bois toute simple, une cuisine séparée du salon par un muret et dans le fond, ce qui semblait être une chambre.
- euh... assieds-toi. (L'invita-t-il.)
- pas la peine. (Dit-elle, durement.) Il commençait à stresser face au ton stoïque de la jeune fille. Elle le fusillait du regard et il baissait le sien. Ça dura un petit moment avant qu'il ne coupe court à l'échange de regards.
- bon! (Commença-t-il), tu as dit que tu voulais me parler. Alors ?
- très bien. Je ne tournerais pas autour du pot.
- tant mieux alors. Ça nous fera gagner du temps.
- à condition que vous me disiez la vérité du premier coup.
- quelle vérité ?
- qu'est-ce que vous avez fait à Bella ? Là, Robert blêmit, ses yeux marquèrent, à son insu, sa surprise.
- je vois à votre expression que vous savez de quoi je parle ! (Conclut-elle.)
- je ne vois pas de quoi tu parles. (Tenta-t-il, en reprenant contenance.)
- ah oui ?
- bien sûr que oui! (S'écria-t-il, soudain perturbé par la nervosité.)
- vous en êtes sûr ?
- bah oui! Je ne sais pas ce qu'elle t'as dit, mais c'est clair que c'est faux.
- qu'est-ce que vous croyez qu'elle aurait pu me dire?
- j'en sais rien moi! Qu'est-ce qu'elle est capable d'inventer?
- ah oui ? Alors pourquoi vous avez soudainement disparu sans dire un mot ? Même pas à Béatrice !
- ça, c'est pas tes oignons !
- écoutez ! J'en ai ma claque ! Vous allez me dire oui ou non, ce que vous avez fait à Bella ?
- je lui ai jamais rien fait à cette gamine ! T'as qu'à lui demander !
- je le ferais, si je le pouvais !
- et ça ! Ça veut dire quoi encore ?
- qu'elle est morte ! Elle s'est suicidé ! La teinte de son épiderme changea encore pour un blanc marbré. Son esprit se mit en pause le temps d'assimiler l'information qu'il venait de recevoir. Ça faisait écho dans sa tête, elle s'est suicidé ! Par sa faute ! À cause de ce qu'il lui avait fait. Il y repensa, sa conscience se permit de lui renvoyer les images de ce jour-là, images qu'il avait enfuit sous un tas d'autres et qu'il pensait ne plus jamais se remémorer. Mais, la vie était comme une roue de la fortune, parfois on avait de la chance et la plupart du temps, la chance faisait des caprices. Et dans son cas, ce n'était pas seulement la chance qui l'avait lâché, mais la justice qui l'avait rattrapé, une justice plus grande que celle des hommes, d'aucuns la nomme Karma, une justice qui chatiait justement.
- on dirait que vous n'étiez pas au courant. (Remarqua Becca.)
- n-non...c'est...c'est...(il déglutit sa propre salive et reprit), c'est arrivé quand ? (Dit-il, sans pour autant un effort.)
- en décembre. Avant les fêtes de fin d'année. C'était confirmé, c'était bien à cause de lui. Il se laissa tomber comme une masse sur le canapé, toujours aussi tourmenté par sa conscience.
- vous êtes décidé à me dire la vérité ? Il ne répondit pas, toujours dans ses pensées.
- Robert ! (Scanda-t-elle.) Il revint à lui brutalement et répondit machinalement :
- je lui ai rien fait... Le visage de Becca se barra d'une grimace de colère. D'un geste rapide, elle tira sur le pistolet planqué dans son dos et le pointa devant Robert.
- woh! Pose ça ! (Fit-il, totalement paniqué devant l'arme.)
- peut-être que maintenant vous serez plus apte à parler. Bella avant de se suicider, a laissé une lettre avec une liste de noms, noms appartenant à des personnes qui se sont avérées toutes responsables de son suicide, et en dernier sur cette liste, il y a votre nom. Au départ je préférais d'abord enquêter pour savoir ce qu'ils avaient faits et ensuite agir, mais là, j'ai plus envie d'être patiente. Vu ce que ceux qui vous précède sur la liste lui ont fait, je n'ai plus trop envie de prendre des pincettes. Alors vous allez me dire ce que vous lui avez fait ou je vous abat ! Il gardait ses mains en l'air en tentant de convaincre Becca de se calmer, en vain.
- VOUS ALLEZ ME LE DIRE ! (hurla-t-elle.)
- ok. Ok! Calme-toi. Il lui fit signe de la main de poser son arme, mais à la place, elle retira le cran de sécurité et garda l'arme pointé sur lui, fermement tenu entre ses mains, ce qui fit monter la tension artérielle de Robert, et donc naturellement, multiplier la vitesse des battements de son cœur.
- bien je vais te raconter, mais je te préviens que ça pourrait ne pas te plaire. (La prévint-il.)
- ça je m'y suis préparée.
- euh... voilà, Bella... Bella n'était pas vraiment comme tu croyais. Elle n'était pas vraiment... comment dire, blanche comme neige. Becca plissa les yeux de méfiance à l'égard de la suite de sa phrase.
- elle me...(il se gratta légèrement la gorge, et continua), elle me faisait des avances.
- vous mentez! (Cingla Becca.)
- non! C'est la vérité. Et... Nous avons... couché ensemble. (Prononça-t-il sur un ton hésitant.)
- quoi! Becca pensait être préparée. Elle l'était sûrement, mais pas pour une telle information, pas pour ça. Elle était déstabilisée par la nouvelle, repensant à son amie, à tous ses traits de caractère, son comportement, ses convictions, ses valeurs. Et finalement, non! C'était impossible pour Becca d'accepter l'idée que Bella ait pue consentir à entretenir un rapport charnel avec le compagnon de sa mère. Mais soudain, quelque chose la titilla, "consentir", et si? Becca ressurgit de ses pensées, totalement affolée et lança :
- vous l'avez violée ! Comme le dit le dicton : <<jamais deux sans trois>>, Robert perdit encore des couleurs face à cette révélation, où plutôt affirmation, pour la moins véridique.
- oui... c'est ça. Vous l'avez violée. (Bafouilla-t-elle.)
- écoute, tu ne sais pas ce que tu dis. Je ne lui ai rien fait de mal. (Tenta-t-il.) Mais malheureusement, il prêchait une convaincue.
- si! Vous êtes immonde ! Vous avez violé la fille de votre compagne. Une adolescente de seize ans !
- non... Il n'eut pas le temps de terminer sa phrase que Becca avait déjà tiré sans même réfléchir dans son canapé. Robert était sous le choc, remarquant que l'impact n'était pas très loin de lui. Il se retourna vers Becca, totalement effrayé, il releva les mains et supplia :
- je t'en prie, ne fais rien que tu pourras regretter.
- je veux... que vous avouiez votre crime. Je veux que vous me disiez la vérité, sinon mon prochain tir se dirigera au centre de vos yeux. (Dit-elle avec conviction.)
- très bien...très bien. Je l'ai violé. Ce jour-là, je l'ai trouvé dans les pommes dans sa chambre et je l'ai amenée à la douche pour lui verser de l'eau, elle s'est réveillée et j'ai vu qu'elle n'était pas bien et elle se débattait comme si je représentais un danger pour elle. Ensuite je l'ai laissée seule et quelque temps après, je l'ai vu sortir en serviette et j'ai attendu pour la suivre dans sa chambre et là...je me suis pas contrôlé. Je suis désolé. (Avoua-t-il en larmes.) Becca était désarçonnée par cet aveu. Elle n'avait plus de mots disponibles pour exprimer son ressenti actuel, dans sa léthargie, elle abaissa légèrement son arme et tel le lâche qu'il est, Robert profita de la situation pour lui sauter dessus par derrière et se saisir du pistolet. Becca revint subitement à elle. Elle resserra avec vigueur ses doigts autour de l'arme. Ils se disputaient tous les deux l'engin métallique et ne remarquèrent pas la table basse qui les fit trébucher. Dans leur chute, l'arme s'échappa vers la porte, pendant que Robert écrasait Becca de tout son poids pour l'empêcher de se relever. Il se releva habilement en maintenant Becca au sol et se dirigea vers l'arme, Becca le retint par la jambe, mais il lui asséna un coup de pied en plein visage. La douleur la paralysa pendant que Robert se saisissait de l'arme et la pointa sur elle. Se sentant désormais tout puissant, il jubila.
- je suis désolé ma cocotte, mais il est hors de question que tu sortes d'ici en sachant ce que tu sais. Il est hors de question que j'aille en prison.
- vous allez faire quoi ? Me tuer ou me violer ? (Argua audacieusement Becca.)
- peut-être bien, peut-être bien.
- je vous préviens que j'ai dit à mon père où j'étais.
- ton père ? Ah oui... t'es la petite gosse de riche. La fille de ce boxeur là... c'est quoi son nom déjà ?....ah j'ai oublié ! (Fit-il négligemment.) Il s'avança vers Becca, posa le bout du pistolet sur le front de cette dernière qui était au paroxysme de son effroi. Elle recherchait n'importe quoi pour l'aider mais ne trouva rien à sa portée.
- malheureusement, tu sais qui je suis, ce que j'ai fait et où je vis...je me vois dans l'obligation de me débarrasser de toi. Mais avant, je vais d'abord prendre mon pied. Je vais lentement ouvrir ma braguette et toi, en gentille fifille, tu vas gentiment ouvrir ta bouche. Le cerveau de Becca beugua d'un coup, il n'analysait plus convenablement les informations et n'arrivait plus à gérer les fonctions motrices de son corps. Becca était tétanisée. Est-ce que cet homme projetait réellement de la violer ? Elle ne voulait pas avoir la réponse et encore moins trop tard, alors retrouvant soudainement son courage, elle passa ses deux mains autour des chevilles de l'homme qui la surplombait et tira de toutes ses forces, ce qui le fit vaciller et tomber. Elle profita de sa position de faiblesse pour grimper sur lui et récupérer l'arme, mais il ne se laissa pas faire. Ils se disputaient l'arme à même le sol, jusqu'à ce que Becca assène un coup de coude en plein visage à Robert, que ce dernier dessaisit l'arme. Becca la ramassa, mais encore une fois, il donna un violent coup de poing à Becca qui la reconduisit sur le sol, dans sa chute, l'arme glissa à nouveau vers la porte, Robert courut la ramasser et Becca lui fit une cale avec le pied, elle se redressa, enjamba Robert et se jeta sur l'arme. Dans un énième effort, Robert se releva et fonça sur Becca. Dans une envie de le maintenir à distance, elle pointa l'arme dans sa direction, mais le cran de sécurité n'étant plus en place et le doigt de Becca ayant glissé sur la gâchette, une balle s'échappa à l'insu de Becca et se percuta dans une zone entre le bas-ventre et  l'aine de Robert. Tous deux restèrent stupéfaits. Becca, réalisant son geste en voyant le sang suinter sur le corps de Robert, tenta de garder son calme. Pendant que Robert se tordait de douleur, dans des râles abominables. Becca continuait d'observer son œuvre, totalement effarée. Elle réagit soudainement de façon instinctive, elle sortit son téléphone et composa un numéro puis colla le téléphone à son oreille. La personne au bout du fil décrocha presque instantanément.
- allô bonjour, vous avez composé le numéro d'urgence des secours, en quoi puis-je vous aider ? (Fit la voix au bout du fil.)
- oui... Allô ! Y a un homme blessé...il perd beaucoup de sang. Il est au [•••]. Venez vite s'il vous plaît ! Et elle raccrocha. Elle remit l'arme à sa place, dans son dos, remonta la capuche de son hoodie sur sa tête et quitta rapidement les lieux.

prédateurs chassésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant