Questions sans réponses

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                    Une sirène d'alarme annonce de sa mélodie à deux temps son arrivée, une grande fourgonnette blanche à rayures horizontales bleues laissant clairement apparaître sur son capot l'inscription: <<Ambulance>> s'arrête bientôt devant une voiture bleue, qui stagne sur la chaussée de la grande autoroute créant dans son freinage subite la panique et le désarroi chez ses compagnes à l'arrière, qui elles aussi durent faire comme elle pour éviter de se fracasser entre elles. Les autres passagers virent ceux de la voiture bleue quitter d'urgence les lieux encouragés par une angoisse sans nom. Ceux des autres passagers qui avaient suivis l'affaire de près surent immédiatement la raison de cette fuite. Les gens sortaient de leur voiture pour s'enquérir de la situation  pendant que les ambulanciers sortaient un à un de la fourgonnette avec une civière, ils s'approchèrent de la voiture où était empêtré dans le pare-brise brisé de tous ses éclats, le corps sans vie de Bella, ils firent un décompte et au bout de ce décompte, saisirent par les membres inférieurs et supérieurs le corps de Bella et le retournèrent sous les regards effrayés et dégoûtés de la foule. Il n'en fallut pas plus pour que la police intervienne au même moment, ils installèrent un périmètre de sécurité et obligèrent la foule à s'éloigner. Les ambulanciers, s'enquirent de l'état du corps dont ils avaient la charge, vérifiaient ou recherchaient le moindre signe distinctif de vie sur ce corps parsemé de tessons du visage aux cuisses, s'arrêtèrent fatalement sur une seule et évidente conclusion. Ils annoncèrent l'heure fatidique du décès et refermèrent les portières mais furent interrompus lorsqu'il voulaient s'en aller par un lieutenant de police présent sur les lieux.
- lieutenant Steven. (Dit-il en leur montrant sa plaque et en leur épargnant le reste du discours barbant qu'il est sensé annoncé) quel est l'état du patient ? (S'enquit il)
- il n'y a plus rien à faire. (L'informa une femme à la peau basanée). Il baissa un moment la tête dépassé par les évènements et s'interrogeant interrieurement pour savoir comment un si jeune être humain a pu écourter sa vie aussi brutalement ? Quelles en étaient les raisons ? Les parents ? Les camarades ? La société ? Ou tout simplement la vie elle-même ? Après ces secondes de conscience morale et compatissantes, il redevint l'homme de justice qu'il était et récupéra son sérieux.
- très bien ceci devient donc l'affaire de la police. Nous devons ouvrir un dossier sur ce cas pour au moins nous assurer que c'était bien volontaire. Nous devons donc récupérer le corps et l'autopsier.
- très bien, comme vous voulez. Nous vous devançons et apporterons le corps à votre médecin légiste après avoir établi un acte de décès médical dans les règles.
- très bien. Il retourna pour s'en aller mais refis demi-tour et demanda :
- est-ce qu'elle a un téléphone sur elle ? Les ambulanciers la palpèrent et ne trouvèrent rien.
- je crois que toutes ses affaires sont sur la route à votre disposition.
- merci quand mê....oh non ! Mais qui les a appelés ?(s'indigna t'il lorsqu'il vit des journalistes et des cameramen). Et finalement l'ambulance quitta les lieux, les marquants à tout jamais de la tragédie qui s'y est produit. Le lieutenant Steven ordonna à son équipe de fouiller les lieux à la recherche d'un téléphone ou quoique ce soit d'autre pouvant leur mettre sur une piste pour leur nouvelle enquête. Il se proposa de ramener la petite famille qui avait vue la vie quitter le corps Bella en s'écrasant sur leur pare-brise, il le faisait par bonté d'âme mais surtout pour éviter les journalistes et leurs questions sans pitié.

             De l'autre côté de la ville, loin de cette tragique pièce en un seul et unique acte, où les maisons alignées les unes à côté des autres se côtoyaient, Béatrice continuait de dévorer son bouquin, les jambes pliées sur le canapé, accoudée sur tout le long de son côté gauche, on aurait dit une de ces femmes appartenant à la royauté dans le Moyen-Orient ancien ou dans l'Égypte antique passant leurs journées à ordonner. Elle tournait une nouvelle page de son livre pour s'attaquer à de nouvelles lignes qui remplissait le dit objet, quand son téléphone retentit, elle poussa un râle de mécontentement en levant les yeux bien haut au plafond. Elle posa avec fainéantise son livre sur ses cuisses et approcha sa main de la table basse en face d'elle et saisit son téléphone, ne reconnut pas le numéro qui s'affichait mais décrocha tout de même.
- allô (fit-elle avec prudence)
- oui bonjour Madame. Je suis l'agent Yess, officier de police de [•••] je vous appelle parce que j'ai de mauvaises nouvelles malheureusement. Il n'en fallut pas plus à Béatrice pour que son sang change subitement de température et donne une nouvelle cadance à son cœur.
- Madame ? ..... vous êtes toujours là ?
- oui... je... suis là de quoi s'agit-il s'il vous plaît.
- et bien ce n'est pas facile à dire, alors excusez moi d'avance pour le manque de tact. Bien, aujourd'hui nous avons reçu le corps d'une jeune fille qui s'est jetée du haut de l'échangeur qui sépare notre ville de la ville voisine, et dans son téléphone, se trouvait votre numéro. Pour aller droit au but, nous vous appelons pour une identification de corps. Nul ne put contenir douleur plus terrible que celle que provoque la mort d'un enfant, car pour chaque parent, la hiérarchie des évènements veut que ce soit eux qui quitte la vie avant leurs enfants, et l'inverse, serait condamnés les parents à errer tels des corps sans âmes. Se fut donc pour Béatrice non pas un choc mais un véritable ras de marée qui la submergea sans grande résistance. Elle garda le téléphone collé à son oreille pendant qu'à l'autre bout du fil, s'epoumonait l'argent Yess qui essayait de questionner son interlocutrice pour savoir son état, chose bien vaine car n'importe qui put s'en douter. Béatrice sonda son salon comme s'il fut chose nouvelle pour elle, des larmes perlaient sur son visage traversant les deux ou trois lignes présentes sur celui-ci marquant sans grande discrétion son âge. Elle ne les essuya pas, immobilisée par cette perturbante idée que sa fille s'était jetée du haut d'un échangeur. Et puis, soudain comme dans un moment d'hallucination, des idées lui traverserent la tête, peut-être qu'on avait trouvé le téléphone de sa fille sur les lieux parce qu'elle était présente en tant que spectatrice, peut-être qu'on lui avait volé son téléphone et qu'on l'avait retrouvé là-bas, oui pour elle c'était logique car jamais sa fille ne ferais telle folie. Et puis elle se leva comme prise d'un entrain subite et bien décidée à se prouver que ce corps étalé à la morgue ne pouvait être celui de sa fille. Elle prit les clés de sa maison et celle de sa petite voiture deux places, se precita vers la sortie et claqua la porte derrière elle avant de la verrouiller. Quelques instants après, on entendit un moteur qui démarrait.

prédateurs chassésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant