L'Elu

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Le soir venu, Drago attend posément qu'Hermione rentre, assis seul à la table basse du salon. Il a passé le reste de cette journée à tenter de calmer ses nerfs, ce mélange de fébrilité, de colère et de remords qui l'a mordu au cœur devant la tombe de sa mère, et qui ne semble plus vouloir le lâcher depuis. Sensible aux conseils d'Hermione, Drago a tenté de solliciter ses perceptions pour étreindre à nouveau la réalité : c'est pourquoi il a allumé une petite bougie parfumée au cèdre dans l'un des angles de la pièce, tout en éteignant la lumière et en se préparant un thé à la cannelle, guidé uniquement par la danse des flammes tout juste ravivées dans la cheminée. De temps à autre,Drago trempe ses lèvres dans la tasse brûlante, tentant de se rappeler le goût du thé, sa chaleur, celle des flammes, les odeurs délicates de cèdre et de cannelle qui se contredisent, et le contact noble du cuir du canapé Chesterfield sous ses doigts. Cela marche. Un peu.

Vers vingt heures, la clé finit par tourner dans la serrure, et Hermione apparaît enfin, comme une réponse à tous les problèmes de l'univers. Sa présence à elle seule semble altérer l'atmosphère de la pièce : elle est soudain plus chaude encore, plus vive, pénétrante, et Drago reçoit une brève explosion sensorielle rien qu'à la voir franchir cette porte, l'espace de quelques secondes.

La jeune femme remarque aussitôt son trouble :

– Ça ne va pas ? demande-t-elle en constatant tout le petit rituel auquel il s'est livré.

– Je n'arrête pas de penser à ma mère, répond-il en baissant les yeux.

Il s'en veut déjà de troubler à nouveau sa tranquillité d'esprit. Mais cela fait partie du pacte implicite qui s'est noué entre eux ces dernières semaines : la vérité. La transparence absolue. Il ne peut tout simplement pas lui mentir :

– Je suis allé sur sa tombe aujourd'hui.

Le visage d'Hermione se voile de compassion :

– Ça a été ? s'enquiert-elle avec sa douceur naturelle.

Drago esquisse un sourire cynique :

– Je ne sais pas si ça pouvait bien aller...

– Mais est-ce que ça t'a fait du bien d'aller la voir ?

– Non... Je ne sais pas. Ce n'est pour cela que j'y suis allé, en tout cas.

Déposant ses affaires, Hermione vient délicatement s'asseoir auprès de lui :

– Pourquoi est-ce que tu y es allé, alors ?

Drago se décide enfin à relever les yeux sur elle :

– Pour elle, déclare-t-il sans la moindre hésitation. Parce que... Ce n'est pas un hasard si elle continue de me visiter chaque nuit. Elle, et tous les autres... Je l'ai abandonnée. Je me suis caché de cette vérité pendant trop longtemps. Des années durant, je me suis plains que le Ministère ne m'avait pas infligé le châtiment que je méritais, mais je n'ai jamais eu le courage de me punir moi-même pour autant...

– Drago, nous avons déjà eu cette discussion...

– Attends. Laisse-moi finir.

Hermione respecte sa demande, même si Drago voit bien que cela lui est douloureux :

– Je crois que ce dont j'ai besoin, c'est de prendre enfin mes responsabilités vis-à-vis de mon passé, déclare-t-il alors très lentement.

– Comment ? En te flagellant sur la place publique ? En te laissant mourir ?

– En ce qui concerne mes crimes, je ne sais pas...

La jeune femme grimace sur le mot « crime », mais il ne la laisse pas protester :

Perfect Sense (Dramione)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant