Chapitre 9

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Quand elle avait demandé la raison de sa visite à Subaru, il s'était contenté de dire qu'il voulait rendre visite à sa sœur, mais l'espace d'un instant, une lueur de culpabilité s'était pointé dans les yeux du jeune homme. Elle ne fut présente qu'un instant, mais c'était amplement suffisant pour que Kilari ne la remarque. Elle ne fit pas de commentaire et se contenta d'acquiescer.

Ils passèrent la soirée tranquillement, la télé diffusant un téléfilm qu'ils n'écoutaient qu'à moitié, voire pas du tout, étant en train de discuter de tout et de rien. Kilari prenait des nouvelles de sa famille, surtout de sa mère, vu qu'elle devait passer voir son père dans la semaine suivante, et qu'elle y verrait Na-san, d'ailleurs. Il lui manquait, son petit chat, aussi.

Quand vint le moment de se coucher, Kilari était pensive. Son frère la connaissait suffisamment pour savoir qu'elle cogitait, il l'interrogea sur la cause de ses tourments :

- Qu'est-ce qui ne va pas, Kilari ?
- Rien, rien...
- Ne te moque pas de moi, s'il te plaît. Je te connais, je vois bien que quelque chose ne va pas.
- Mais si, tout va bien. 
- Non.
- C'est juste que la, j'ai une semaine de congé, certes, mais je dois voir Hiroto mardi après-midi, je suis censée voir Fubuki dans la semaine, aussi, Seiji voulait me parler... Je suis épuisée.
- Ce sont des congés que tu as voulu ou qui ont été « forcées » ?

La blonde ne répondit pas. Elle ne souhaitait pas aborder le sujet, mais elle serait incapable de mentir à son frère. Elle l'avait compris dès l'instant où l'euphorie était retombée quand elle l'a vu devant sa porte. Voyant la non-réaction de sa sœur, Subaru reprit :

- Pourquoi t'a-t-on demandé de prendre des congés ? Tu as des soucis au travail ? 
- Non, enfin pas entièrement, c'est compliqué.
- J'ai tout mon temps.

Kilari soupira. Elle savait très bien qu'elle ne pourrait pas échapper aux explications. Elle se lança alors dans un récit de ce qu'était sa vie depuis quelques semaines en commençant par le jour où elle avait reçu le mail de Hiroto, ce qui avait plus ou moins été l'élément déclencheur. Elle parla des visites de Seiji, de son rôle dans un téléfilm, du baiser en dehors du tournage avec Hiroto, de la fameuse photo qui leur avait valu de se faire passer pour un couple... En finissant par son court séjour à l'hôpital, ses congés et le rendez-vous avec Hiroto.

- Eh ben, ça en fait des choses, en effet...
- Comme tu dis...
- Mais du coup, vous ne sortez pas vraiment ensemble, Hiroto et toi ? 
- Non. Pourquoi ? 
- Comme ça. Je pensais que si.

Tu sais, même si nous avons encore de l'attirance physique l'un envers l'autre, je ne sais pas si on peut parler de sentiments. Je l'ai aimé, il ne fait aucun doute quant aux sentiments d'Hiroto, il m'en a parlé, mais de là à ce que nos sentiments existent toujours aujourd'hui ? Je ne pense pas, honnêtement. Je peux toujours me tromper, mais...

- Mais tu penses qu'il t'a oubliée et tu renies tes sentiments, j'ai bien compris.
- Quoi ? Mais pas du...
- Chut, je te connais, petite sœur.
- Subaru...

La jeune femme observa son frère du coin de l'œil, allongée sur le dos. 

- Tu sais, Kilari, ils n'y sont pour rien, eux.
- Ils l'ont cru. Ils ont cru ce mec. Je ne sais même pas pourquoi on avait remplacé Madame Kumoï.
- Tu devrais peut-être leur demander ? 
- Pourquoi faire ? 
- Pour savoir la vérité. 
- La seule vérité que je connais, c'est celle dans laquelle ils m'ont tous lâchée, et que ce connard a détruit ma carrière.
- Il ne l'a peut-être pas tant détruite que ça, regarde aujourd'hui : tu as un rôle.
- Oui, mais il n'était pas prévu. Je ne voulais pas reprendre mon ancien métier. Aujourd'hui, je suis manager, pas actrice, chanteuse, mannequin ou je ne sais quoi d'autre. Aujourd'hui, je m'occupe de Fubuki et elle est satisfaite de mon travail. 
- Mais Kilari, c'était ton rêve, ta passion, toute ta vie... Tu ne peux pas avoir oublié tout ça comme ça... 
- Et bien la preuve que si. 
- Et les garçons ? Pourquoi tu refuses de leur parler ?
- Tu le sais très bien. 
- Eh bien, je doute. J'ai eu quelques contacts avec Seiji, je l'aime bien, lui. Il m'a raconté dans les grandes lignes qu'il essayait de te parler depuis un moment, mais que tu le fuyais comme la peste. 
- Je ne le fuis pas, je ne veux pas le voir.
- Si c'est le seul problème, alors pourquoi ne pas mettre les choses au clair une bonne fois pour toute ? Il te fichera la paix si il pense que la raison pour laquelle tu les as rayés de ta vie est valable.
- Mais je sais qu'ils ne la trouveront pas valable ! C'est pour ça que je ne veux pas leur parler ! 
- Et qu'est-ce qui t'empêches de leur parler, alors ? Je ne comprends pas. Kilari, tu n'es pas heureuse, comme ça. Tu as beaucoup changé. Tu étais rayonnante, souriante, entourée. Maintenant, tu es seule, triste, fatiguée... Ce n'est pas toi, Kilari... 
- Je le sais, ça, Subaru. Mais que veux-tu que je fasse ? Je n'ai pas le temps de faire quoi que ce soit, mon travail me prend tout mon temps, quand j'ai quelques minutes pour moi, c'est exceptionnel ! 
- Et bien raison de plus pour profiter de tes congés pour te changer un peu les idées.

Kilari ne savait pas quoi répondre à part qu'elle était fatiguée, mais elle s'abstint. Elle tourna la tête vers son frère et esquissa un sourire avant de lui dire qu'elle allait dormir. Il soupira, mais lui souhaita une bonne nuit. Elle se tourna de l'autre côté, vers la porte et son placard, et ferma les yeux. Elle essaya de réfléchir aux paroles de son frère. Après tout, c'était vrai, pourquoi s'obstinait-elle a refuser de voir qui que ce soit ?

Elle se remémora inconsciemment et indépendamment de sa volonté tous les souvenirs heureux qu'elle avait eu avec les Ships, dans son ancienne agence, avec Hiroto... Pourquoi ne leur donnait-elle pas une chance ? Ils en méritaient bien une, non ?

Elle était encore plus perdue qu'avant. La discussion qu'elle avait eu avec son frère ne fit que renforcer les doutes qui trottaient dans sa tête depuis la veille, lorsque Hiroto était parti et qu'elle avait fui en pleurant. Ce soir-là, elle n'essaierait même pas de nier le fait qu'elle avait essayé de fuir. C'était une évidence.


[Kilari] RévolutionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant